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Open Data : l'écosystème français se construit petit à petit

par Cyrille Chausson

Le mouvement Open Data - qui prone une large ouverture des données publiques et gouvernementales aux entreprises et aux citoyens - se structure progressivement en France. Alors que l'un des plus importants remue-méninges (brainstorming en anglais) sur la donnée publique se teint à Varsovie (l'Open Government Data Camp, les 20 et 21 octobre), la France profite de l'opportunité pour avancer ses pions dans l'Open Data. A la clé, l'ouverture officielle de la première place de marché de la donnée chez Data Publica et la publication de la licence ouverte qui fournira un cadre juridique à l'utilisation des données publiques. Bref, un écosystème commence à prendre en forme en France. Lentement.


Le concept d'ouverture de l'accès aux données publiques n'est pas nouveau mais il a connu un regain d'intérêt avec les efforts de l'administration Obama autour du site data.gov. Ce mouvement de libéralisation de la donnée publique vise notamment à rendre transparente l'information publique, cloisonnée jusqu'alors dans les bases de données des administrations, afin de la mettre à disposition des citoyens.  L'Open Data a pour objectif de favoriser le concept de l'e-démocratie et également de faire émerger une classe de services, plus commerciaux, axés sur la donnée. En France, le mouvement reste pour l'heure embryonnaire, derrière les initiatives anglo-saxonnes menées au Royaume Uni et aux Etats-Unis, notamment via les portails data.gov.uk et data.gov. Les villes de Paris, Rennes, Montpellier, Toulouse, notamment ont lancés leurs portails (que l'on retrouve dans datacatalogs.org.

Une place de marché chez Data Publica

Pour donner l'exemple, justement, Data Publica a été la première entité commerciale française à se lancer sur ce créneau, en mars 2011. Avec la ferme intention de se positionner sur une marché d'avenir. Quelque 7 mois après son lancement, et une levée de fonds toute fraiche de 400 000 euros dans son tour d'amorçage, la société de François Bancilhon déploie officiellement son arsenal. Nom de code : Data Store. Ce service, qui sera la place de marché principale, forme l'un des piliers du modèle économique de la société. "Il s'agit d'un espace sur lequel des données, celles de nos partenaires ainsi que les nôtres, seront commercialisées", explique François Bancilhon. Ce service viendra ainsi compléter l'autre flux de revenus de Data Publica : la réalisation de jeux de données sur mesure. Ces services sont logiquement intégrées au moteur de recherche intégré à Data Publica qui permet de naviguer dans les jeux de données, gratuits et payants, présents sur le portail. Parmi les données payantes, on retrouve notamment une analyse des flux Twitter des primaires socialistes, des données liées aux élections présidentielles 2012 identifiant les régions avec un potentiel de bascule, des catalogues produits, liste François Bancilhon.

Un prix qui se cherche


Au total, une cinquantaine de jeux de données, qui proviennent de partenaires, dont le métier est de vendre de la donnée ou encore d'autres qui n'y ont pas pensé, mais y voient un potentiel", explique-t-il. L'idée pour Data Publica étant au final d'ouvrir ce marché de l'Open Data au PME, notamment, et d'attirer davantage de vendeurs pour soutenir son modèle économique.  "Vers une massification", en somme.

Mais si ce marché de la donnée existe, quel est son prix ? Selon François Bancilhon, nous sommes encore dans un "processus d'apprentissage" où le prix est fixé en fonction "des ajustements du marché".  Selon les "raffinements" appliqués aux données, le prix peut varier entre 30 et 500 euros par jeu de données, souligne-t-il.

Ce tarif peut ainsi servir de référence pour la création d'un modèle économique reposant sur l'Open Data en France. Et certainement donner une première tentative de réponse au modèle de financement du mouvement.

Une licence pour stabiliser l'éco-système

Alors nous dirigeons-nous vers un mouvement de l'Open Data hexagonal plus structuré ? Si Data Publica semble montrer l'exemple qu'une société peut se reposer sur un tel modèle, qu'en est-il des conditions d'utilisation et d'exploitation de ces données ? Hasard du calendrier, c'est également cette semaine qu'a choisi la mission Etatlab, chargée de la mise en place du portail data.gouv.fr, pour apporter sa réponse à ce point critique.
A la clé : la publication de la très précieuse licence, censée encadrer juridiquement l'utilisation de les données rendue publiques dans l'Hexagone, et instaurer ainsi un climat de confiance à l'ensemble de la chaîne des acteurs.

Dans un communiqué Etatlab, explique que cette licence ouverte autorise « la reproduction, la redistribution, l’adaptation et l’exploitation commerciale des données ».  Y compris dans un contexte commercial. Comme l'indique le texte (cf ci dessous), cette licence est également compatible avec des licences existantes - et déjà appliquées. "Cette licence a été conçue pour être compatible avec toute licence libre qui exige a minima la mention de paternité. Elle est notamment compatible avec les licences « Open Government Licence » (OGL) du Royaume-Uni, « Creative Commons Attribution 2.0 »(CC-BY 2.0) de Creative Commons et « Open Data Commons Attribution » (ODC-BY) de l’OpenKnowledge Foundation."

Licence Ouverte Open Licence (Français)

Pour François Bancilhon, cette formalisation d'une licence constitue une avancée pour le secteur. Pourquoi ? Parce qu'elle vient établir une référence ainsi qu'un standard juridique en la matière. D'abord compréhensible car courte, estime-t-il , cette licence vient surtout lever les doutes que pourraient avoir les acteurs du secteurs et les potentiels vendeurs de données "qui se demandaient bien quelle licence adopter". Toute démarche consistant à formaliser les conditions d'usage constitue ainsi un progrès notable, insiste François Bancilhon.

Mais ce n'est pas tout. Un flou artistique était également entretenu par une multiplications des licences. Semant la confusion dans l'ensemble de l'éco-système. En France, par exemple, raconte-t-il , plusieurs licences s'appliquent : la LIP (Licence « information publique librement réutilisable ») du ministère de la Justice,  les "Conditions Générales de Réutilisation des Informations Publiques" définies par l’APIE (Agence du patrimoine immatériel de l'Etat), l'Open Data Base License (ODBL) et enfin la licence ouverte. De quoi donner le tournis aux collectivités locales qui cherchaient entrer dans l'Open Data.

Par exempl,e le portail de Paris et un projet de la région Sud-ouest (Datalocale) s'adossent à la licence ODbL (Open Database Licence) de l' Open Knowledge Foundation, tandis que le site de Rennes a choisi la licence APIE (« Licence de réutilisation des données publiques - Rennes Métropole en accès libre" ), tout comme la ville de Montpellier.

Enfin, conclut-il, "cette ouverture constitue également un bon point pour la dimension commerciale de l'Open Data. Elle ne contient pas de notion de viralité, freinant la mise en place d'un modèle économique", ajoute-t-il. De quoi alors construire, en France, un environnement propice à la promotion de l'Open Data.

21 oct. 2011

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