Microsoft convertit Windows Azure à l'IaaS

Le PaaS est peut-être l’avenir de l’informatique, mais pour l’instant les revenus qu’il génère restent sensiblement inférieurs à ceux générés par le cloud d’infrastructure. Réaliste, Microsoft vient donc d’enrichir son service Cloud Azure, avec une offre IaaS permettant de faire tourner des machines virtuelles Linux et Windows. L'offre PaaS n'est toutefois pas oubliée et s'enrichit de multiples nouveaux services.

Microsoft l’avait promis en fin d’année 2011, c’est désormais chose faite. Windows Azure est désormais un cloud « hybride » à même de fournir aussi bien des services de type PaaS et de type IaaS. Si cela n’est pas une révolution pour le monde de l’informatique, c’en est sans doute une pour Microsoft. Avec Windows Azure, l’éditeur a en effet dès 2008 fait le pari du PaaS, un pari courageux et sans doute visionnaire, mais donc le succès a été mitigé. Certes, comme l’explique Jérôme Trédan, le directeur des produits serveurs et plateformes de Cloud Computing de Microsoft à StratégiesCloud, « les ventes des services compute d’Azure doublent tous les six mois et le stockage tous les 2 mois ». Certes, les abonnements à Windows azure sont en forte croissance. Mais le succès du service de Microsoft est à des lieux de l’insolente réussite d’Amazon avec son service EC2. La cruelle vérité pour l’éditeur de Redmond est que la première bataille du cloud a été gagnée par les services de cloud d’infrastructure et qu’il devenait donc difficile pour l’éditeur de rester à l’écart de ce marché, d’autant que la pression de ses propres clients était forte : nombre d’entre eux, insatisfaits des limitations du VM Role d’Azure (une première tentative limitée de fournir des services d’infrastructure) militaient en faveur de vrais services IaaS capables de compléter les services PaaS existant.

Surfer sur l’IaaS, tout en continuant à développer le PaaS

Microsoft a donc décidé de franchir le Rubicon (et l’objectif de multiplier par 5 le CA de Windows Azure au cours de l’année fiscale à venir n’y est sans doute pas pour rien) et de lancer une offre complète de services IaaS, tout en continuant à mettre l’accent sur la pertinence de ses offres PaaS. Tout d’abord parce que l’éditeur voit l’IaaS comme une transition vers le PaaS : « Certains clients déploieront ainsi des applications dans des VM, mais pourront par exemple confier l’étage de base de données à Windows Azure SQL » estime Julien Lesaicherre, le responsable de l’offre Windows Azure en France. Et puis Microsoft ne perd pas de vue que « chaque année les entreprises redéveloppent environ 15% de leurs applications (source Gartner)» et que cela représente autant d’opportunités pour Microsoft de les inciter à basculer leurs nouveaux développements sur le PaaS Azure.

Concrètement, Windows Azure proposera 5 tailles de machines virtuelles capables de faire tourner des images Windows Server 2008 R2, Windows Server 2012 et Linux (Suse, Ubuntu et CentOS – on notera l’absence de Red Hat). L’interface de provisioning d’Azure, revue pour l’occasion – et recodée en HTML5- proposera en standard des images préconfigurées (OS de base, OS avec SGBD…), et il sera aussi possible de créer son propre catalogue d’images. Une dernière possibilité pour les entreprises sera tout simplement de transférer des fichiers d’images virtuelles VHD créées en interne pour Hyper-V vers Windows Azure. Avec l’arrivée prochaine du SP1 de System Center Virtual Machine Manager, il sera enfin possible de déplacer des machines virtuelles d’un cloud interne vers Windows Azure, et également d’instancier à la volée des VM dans Azure. La facturation devrait se faire et inclura le coût de la licence Windows. Ainsi, pendant la phase de preview qui commence dans les prochains jours, une VM d’entrée de gamme avec Windows Server 2008 sera proposée à 0,013€ par heure, soit moins de 10 € par mois, un prix pour le moins agressif. Notons que le plan est de proposer les machines virtuelles Linux au même prix que les VM Windows… Bien sûr, les grands comptes disposant d’accords d’entreprise disposeront de tarifs adaptés.

L’arrivée de services d’infrastructure dans Azure s’accompagne de celle d’un service de VPN (baptisé Windows Azure Virtual Network) dont l’objectif est d’offrir aux entreprises une solution de raccordement sécurisée entre leurs datacenters et les datacenters Windows Azure. Ce service de VPN IPSec permet de définir précisément la topologie du réseau ainsi que les règles de sécurité. Selon Julien Lesaicherre et Jérôme Trédan, chaque VPN pourra supporter environ un millier de VM.

Faciliter l’hébergement de sites web

Une autre nouveauté importante est le lancement par Microsoft d’une offre d’hébergement de sites web simplifiée baptisée Windows Azure Web Sites. Ce nouveau service à mi-chemin entre les services de cloud et d’hébergement permet aux développeurs de sites web de déployer simplement des sites basés sur ASP.NET, PHP et Node.js. Le tout avec le bénéfice d’une infrastructure mondiale. Microsoft propose des environnements préconfigurés avec les CMS les plus populaires du marché comme WordPress, Joomla!, Drupal, Umbraco ou DotNetNuke ainsi qu’un choix de bases de données (Windows Azure SQL ou MySQL). Enfin, le services Windows Azure Web Sites supporte de multiples outils de développement et protocoles de transfert de fichiers tels que  Visual Studio, Git, FTP…

Les services PaaS enrichis avec de nouvelles fonctions

Si Microsoft fait des concessions au monde de l’IaaS, il n’entend pas pour autant lever le pied sur les fonctions de son service PaaS. Windows Azure se voit ainsi enrichi du support des langages Python et Java, en plus des actuels supports des frameworks .Net, PHP et node.js (Javascript serveur). L’éditeur annonce aussi dans la foulée l’arrivée d’un plug-in Eclipse pour Java, MongoDB et Memcached (hors environnement .Net).

Les services de caching d’Azure se voient enrichis de nouvelles options, dont une permettant d’utiliser la mémoire des rôles web et worker pour le cache local des données (jusqu’alors Microsoft proposait un service de cache multi-tenant mutualisé). Selon Microsoft le nouveau cache est compatible avec le protocole Memcached et peut-être accédé depuis les environnements .NET, Java, PHP or Node.js.

La dernière nouveauté d’importance est l’arrivée d’une nouvelle option pour les utilisateurs des services de stockage Windows Azure qui n’ont pas besoin de redondance sur de multiples zones géographiques. Pour ces clients, Microsoft propose désormais une option qui se « limite » à une redondance locale, ce qui permet d’abaisser les coûts.

 

« Un besoin de clouds souverains »

Alors que Microsoft fait ses premiers pas dans l’IaaS, StratégiesCloud a demandé à Jérôme Trédan comment l’éditeur percevait les investissements massifs effectués dans les deux projets retenus dans le cadre du projet Andromède (75M€ pour le couple Orange/Thalès et 75 M€ pour le duo SFR/Bull). Prudent –et ne souhaitant sans doute pas insulter l’avenir alors que l’éditeur discute avec ces deux consortiums - le patron de l’activité serveur de Microsoft en France indique que « la réalité du cloud, cela va être des cloud pluriels » et qu’il y a aussi besoin pour certains clients de clouds souverains. L’intervention de l’Etat n’est-elle pas de nature à fausser la concurrence ? Pour Jérôme Trédan, c’est loin d’être sûr. Car la « vraie question est de savoir si ces clouds, du fait de leur taille nationale seront compétitifs sur les prix (par rapport aux acteurs internationaux) ».

Jérôme Trédan s’est en revanche refusé à spéculer sur les technologies qu’utiliseront ces clouds souverains tout en indiquant discuter avec les deux consortiums. Jusqu’à présent, les deux projets ont indiqué vouloir fonder leur infrastructure sur des briques libres, mais on n’est pas à l’abri d’une surprise (d’autant qu’Hyper-V motorise déjà le cloud de SFR). On se rappelle par notamment l’épisode de la guerre des formats bureautique, qui avait au final permis à l’éditeur – après un lobbying impressionnant - de maintenir ses formats bureautiques dans la liste des formats approuvés par le gouvernement face à un ODF à l’origine prévu comme format unique…

 

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