Christophe Lemaire, Eurostar : "la refonte de notre site web est l'un de nos plus grands projets"

Le DSI d’Eurostar, Christophe Lemaire, a supervisé le mois dernier le lancement du nouveau site internet de la société, l’un de ses plus gros chantiers technologiques de la décennie et la pierre angulaire de la nouvelle architecture IT d'Eurostar

Pour Christophe Lemaire, le DSI d'Eurostar, le lancement le mois dernier de la nouvelle plate-forme Eurostar.com est plus qu’un simple lancement de site web : «Il s’agit d’un investissement important et l'un des plus grands projets de systèmes d'information que nous ayons mené au cours des dernières années», explique-t-il.

Christophe Lemaire pilote la DSI d'Eurostar depuis trois ans. Il était auparavant en charge du datacenter lillois de la SNCF

Le précédent site datait de 2002, ce qui est plus qu’ancien dans le monde du e-commerce. "De ce fait, l’expérience utilisateur pour les clients était limitée – il fallait alors jusqu’à 12 clics pour effectuer une réservation, et il fallait aussi fournir pas mal d’informations à chaque fois que vous alliez sur le site web. L'expérience utilisateur était ultra-moderne il y a dix ans, mais plus aujourd’hui." 

"Maintenant, le nouveau site ne requiert plus que cinq à six clics, et l'expérience sur le site est bien plus personnalisée - même si vous ne faites pas partie du programme de fidélité. Par exemple - comme sur la plupart des sites web récents - il y a la possibilité de stocker des données de carte de crédit pour l'option d'un "Express Checkout" la prochaine fois que vous allez réserver." 

Un projet de deux ans, qui n'est qu'un tremplin vers d'autres changements 

Le développement du nouveau site web est un projet qui a pris environ deux ans, mais il n'est que la première étape d'une refonte de l'informatique du groupe. «Dès cet été, nous allons ajouter l’information en temps réel sur la circulation des trains, une fonctionnalité attendue par les clients et par les personnes qui les attendent dans nos gares ferroviaires. Pour l’instant, la seule façon d’obtenir l’information est de consulter le panneau d'information en gare,» explique ainsi Christophe Lemaire. 

«Parce que les produits d’Eurostar ne sont pas des objets tangibles, et que la disponibilité des billets est soumise à plusieurs variables, les systèmes qui sous-tendent les ventes de billets sont plus complexes que les plates-formes standard de e-commerce. «Les systèmes sont très complexes, et le produit que vous achetez est construit pour vous en temps réel ». 

C’est pour toutes ces raisons qu’une reconstruction complète a été nécessaire, un développement confié à Capgemini UK. Eurostar emploie 1700 personnes au total, mais seulement 50 personnes au sein de l'équipe systèmes d'information. Cela signifie que la société doit externaliser les services et de la maintenance informatique, tout en conservant les compétences autour de l'architecture des systèmes, de l’analyse métier et du service management. Cette structure est pilotée par Lemaire – précédemment en charge du datacenter Lillois de la SNCF - depuis trois ans. 

«Nous n'avons pas beaucoup de développeurs en tant que tels. Sur tous nos nouveaux projets, nous avons tendance à acheter des systèmes existants et les développements restants sont externalisées », dit-il. «Nous avons beaucoup appris au cours du projet Eurostar.com. Nous voulions construire un nouveau site, mais aussi la première pierre d'un nouveau système de distribution. Il y plein de façons d’acheter un billet Eurostar - centre de contact, mobile - qui sont basées sur des systèmes différents. Avec le site, nous voulions mettre en place une boîte à outils qui rende la plupart de la logique et du code derrière l'interface client réutilisable, cette interface étant la seule partie "sur-mesure".» 

«Le logiciel que nous avons acheté et adapté, va être utilisé pour le mobile, le centre de contact et pour les gares ferroviaires - si vous souhaitez réserver à St Pancras.» Il va ainsi s’appuyer sur l'informatique et les systèmes de paiement derrière le site pour le reste de son fonctionnement. «Notre plan est de réutiliser, donc c'est un peu comme nous avons acheté une boîte de Lego. La feuille de route informatique pour les quatre prochaines années est de commencer avec le site web, et d'étendre cette architecture pour les systèmes de distribution, la finance et les systèmes de production ». 

«Construire le site était quelque chose que nous avions à faire de toute façon du fait de l’âge du système précédent, mais c'était aussi l'occasion pour nous de penser beaucoup plus loin.» 

Mieux connaître ses clients 

À plus long terme, Lemaire veut utiliser les technologies de business intelligence (BI) pour compléter des capacités manquantes en matière d’information sur la clientèle. «Nous nous demandons quelle est l'information dont nous avons besoin pour fournir des services innovants.» 

«La façon dont nos systèmes informatiques sont conçus va probablement être plus dirigée par les données que par les processus comme c’était le cas jusqu’alors ». La valeur réside déjà dans les données, dit-il. « Mais aujourd'hui, si vous ne faites pas partie d'un programme de fidélité et voyagez souvent avec nous, il est probable que vous aurez à ressaisir vos coordonnées à chaque fois que vous réservez un billet. (…) Il y a beaucoup d'informations que nous avons sur nos clients dans nos bases de données que nous devrions utiliser d'une meilleure façon, plus intégrée.» 

«Nous prévoyons également d'améliorer notre capacité à analyser de façon plus globale les réservations. Nous devons mieux repérer des réservations à caractère spéculatif qui peuvent être dommageables pour notre entreprise. Nous ne pouvons pas régler tout cela sans une meilleure organisation de toutes les données que nous collectons et sur lesquelles nous basons notre fonctionnement ». La société va travailler avec des tiers pour développer ce secteur d'activité. 

«Nous avons travailler avec nos collègues des ventes et des services à la clientèle pour obtenir une vision de ce dont ils ont besoin de savoir de nos clients, aujourd’hui et dans le moyen et le long terme. Nous avons commencé à partir de ce qui était réalisable à court terme, » explique Lemaire, en ajoutant que l’adoption par les dirigeants sera un facteur clé du succès du projet BI. «Ce n'est pas un projet normal avec un sponsor clair au sein de l'entreprise. Ce n’est pas comme le CRM où la personne en serait le directeur des ventes. Ce n'est pas un investissement traditionnel dans la technologie, où le DSI peut être le seul sponsor. Dans ce cas, il s'agit d'un mélange de technologie et de nouvelles capacités pour les métiers de l'entreprise.(...) Les données ont un impact pour l’ensemble de l’entreprise, donc le seul dirigeant réellement responsable pourrait bien être le PDG. Ce que nous avons choisi de faire est d'avoir plusieurs sponsors provenant de différents métiers ». 

Le volet coûts ne devrait pas simplifier les choses car le projet implique des investissements importants et touche à tous les compartiments de l’entreprise explique Lemaire. «La chose importante est de ne pas se précipiter. Il y a tellement de possibilités et ce n'est pas gratuit. Vous devez bien creuser dans quelques études de cas - tant les possibilités sont nombreuses - et retenir quelques idées potentielles. Il s’agit de trouver celles dont vous pensez qu’elle pourraient avoir le potentiel de générer des revenus supplémentaires. Par exemple, lorsqu’un client appelle le centre de contacts, et que ce dernier connaît ses derniers voyages, ainsi que le type de client qu’il est - par exemple s’il est un voyageur fréquent qui n’accorde que peu d’importance au coût du voyage. Il est important que nous connaissions ce type d’information au moment du contact, les solutions de voyage proposées pouvant être différentes selon le type de client auquel nous parlons. » 

Pour Lemaire, le service personnalisé rendu possible par la BI pourrait donner à Eurostar l’avantage dans un marché du voyage très concurrentiel. «Être plus conscients de nos clients et utiliser cette information d'une manière intelligente pourrait se traduire par de petits gestes, comme de petites choses mentionnées dans notre dialogue avec le client. Et dans le contexte de concurrence actuel, je crois que ces choses peuvent faire une différence. "  

Entretien réalisé par nos confrères de ComputerWeekly lors de l’événement « UK CIO Commitee »  organisé par Global Business Events, les 19 et 20 mars dernier à Londres.

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