Archives numériques : bientôt une loi, mais pour quoi faire ?

Une nouvelle loi va prochainement s'attaquer au sujet des archives, notamment électroniques. En toile de fond, la mutualisation des multiples plates-formes de l'administration. Un sujet déjà entrevu au temps de la RGPP.

Imposer aux éditeurs d'inclure dans leurs logiciels métier des fonctions d'archivage à long terme. A l'occasion d'un point presse pour le lancement du premier forum des archivistes (qui se tiendra à Angers du 20 au 22 mars), l'Association des archivistes français (AAF) n'a pas fait mystère de ses revendications. Car, comme le résume Roger Nougaret, responsable des archives historiques de BNP Paribas et président du comité scientifique du forum, "souvent, le numérique apparaît comme la solution, alors que, pour notre profession, il est plutôt source de problèmes". 

A l'occasion d'un rendez-vous avec la ministre en charge de l'Economie numérique, Fleur Pellerin, la semaine dernière, l'association a fait valoir son point de vue. "Notre réflexion porte sur la recherche de leviers réglementaires permettant d'imposer aux éditeurs l'intégration de ces fonctions, détaille Jean-Philippe Legois, le secrétaire général de l'AAF. La première piste envisagée consiste à l'imposer par la commande publique". 

L'enjeu ? Voir la future loi archives et patrimoine, portée par la ministre de la Culture Aurélie Filipetti - un texte qui doit passer en conseil des ministres vers novembre prochain -, intégrer cette exigence. L'AAF souhaiterait voir le comité interministériel aux Archives de France - que peut réunir le délégué interministériel en charge du sujet ( Vincent Berjot), placé sous l'autorité du Premier ministre - prendre en charge la validation des applications importantes, afin de vérifier la conformité des fonctions d'archivage pérenne aux attentes des archivistes. "Bien sûr, certains logiciels intègrent déjà ces exigences. Mais ce n'est pas systématique, regrette Jean-Philippe Legois. Par exemple, nous avons détecté un problème de traçabilité de l'information dans Apogée (Application pour l'organisation et la gestion des enseignements et des étudiants, développée par l'AMUE, NDLR)". 

"Initiatives foisonnantes, mais non coordonnées" 

Autre sujet qui sera regardé avec attention dans cette loi : l'organisation des archives électroniques dans l'administration centrale ainsi que dans les territoires, qui aujourd'hui reflète le mille-feuille territorial français (communes, départements, communautés de communes, régions). D'autant que les discussions sur la loi archives et patrimoine se dérouleront en parallèle de celles sur l'acte III de la décentralisation, qui entend déboucher sur une simplification dudit mille-feuille. Cette question de l'organisation est également technique car, dans la lignée de la Modernisation de l'action publique (MAP), la mutualisation des plates-formes et outils permettrait sur ce terrain également des économies d'échelle. Un sujet pas réellement nouveau. Un rapport remis en mars 2011 par le conseille d'Etat Maurice Quénet au Premier ministre soulignait déjà ce besoin, parlant à l'époque "d'initiatives foisonnantes mais non coordonnées". 

Plusieurs acteurs de la sphère publique - la BnF avec Spar, la DGFiP avec Atlas, la Caisse des dépôts en partenariat avec l'Inpi, notamment - se sont en effet lancés dans la construction de plates-formes d'archivage, parfois avec la volonté de rentabiliser l'investissement en l'ouvrant à d'autres acteurs (en devenant tiers-archiveur donc). Un développement logique ; Spar ayant coûté plus de 20 M€ entre 2005 et 2011 par exemple. Dans son rapport au Premier ministre, Maurice Quénet soulignait : "Pour l’archivage intermédiaire (sous la responsabilité des administrations émettrices), il est urgent de mutualiser les outils existants". Et de réclamer la mise en place d'une politique commune coiffant toutes ces initiatives. "Elle devra porter les questions normatives mais aussi la mutualisation des projets, écrit le conseiller d'Etat. Une articulation forte sera recherchée avec la nouvelle DISIC (Direction interministérielle des systèmes d'information et de communication, créée en 2011)." On en est encore au même point, même si la MAP a officiellement remplacé la RGPP.

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