Ludovic Tassy, Afflelou : "Grâce au Cloud, entre 10 et 15 % d'économies"

Quelques jours après le premier Gala des DSI organisé par l'Agora des DSI, son co-président Ludovic Tassy, le DSI du groupe Alain Afflelou, revient sur les mutations d'une profession qui peut profiter de la montée en puissance du Cloud pour refonder le modèle de la direction informatique. Et préparer un avenir qui rimera de plus en plus avec le digital.

LeMagIT : Au travers de l'Agora des DSI (club qui réunit des directeurs informatiques pour la plupart de sociétés de taille intermédiaire) que vous présidez, quelles vous paraissent être les grands enjeux de ce métier aujourd'hui ? 

Ludovic Tassy : La création de valeur est le sujet du moment. Cette volonté se décline tant avec des chantiers portant sur l'optimisation (via la virtualisation, le Cloud, le remplacement d'un ERP...) qu'avec des projets portant sur le monde Internet. D'autant que cette année, l’environnement économique nous contraint à être encore plus vigilant sur le respect des enveloppes budgétaires. Optimiser le run, le fonctionnement du SI, pour dégager des moyens pour le change, les projets, devient donc essentiel. 

LeMagIT : Est-ce que le Cloud reste la piste la plus prometteuse pour optimiser le run ? 

L.T. : Oui. Dans l'ensemble de la partie hardware et back-office, les économies potentielles sont importantes. Dans le modèle classique, la DSI achetait des baies de stockage ou des serveurs qu'elle finançait sur trois ans. Or, les cycles projets se raccourcissant, ces matériels devaient être remplacés avant même d'avoir été totalement amortis. Aujourd'hui, le modèle consiste à faire fonctionner sur des environnements dédiés, fortement optimisés grâce à la virtualisation par exemple, les applicatifs ayant les exigences de sécurité les plus importantes (ERP, messagerie). Et, pour tout le reste, notamment les environnements de développement, de tests et de recettes - ce qui représente énormément de ressources -, à se tourner vers des systèmes dans le Cloud, avec des SLA plus faibles. Sur la production, chez Alain Afflelou, ce modèle devrait nous permettre d'économiser entre 10 et 15 %, qui seront réinvestis dans les projets et la prospective. 

LeMagIT : Quelles sont les compétences que doit réunir la DSI pour gérer cette nouvelle donne ? 

L.T. : La DSI doit répondre à trois problématiques complémentaires. Le maintien d'une compétence technique, car elle doit être en mesure de dialoguer avec les experts présents chez ses prestataires. La capacité à orchestrer les services, qu'ils soient fournis par l'interne ou par un prestataire, ce qui renforce le rôle des architectes. Enfin, la DSI doit s'armer de chefs de projets davantage fonctionnels que techniciens. L'expertise technique - production ou connaissance des outils - a vocation à être outsourcée chez des spécialistes. En tout cas, dans les DSI de taille intermédiaire. 

LeMagIT : Ce qui signifie aussi acquérir des compétences en matière de gestion des contrats... 

L.T. : Absolument. Chez Alain Afflelou, nous faisons par exemple appel à des cabinets d'avocats spécialisés. S'y ajoute la gestion opérationnelle des contrats. C'est un des nouveaux rôles du chef de la production, avec la sécurité et la gestion de la conformité à la loi Informatique et libertés. Ce dernier sujet prenant de plus en plus d'importance à mesure que la relation avec les clients se digitalise. Car, même avec une application en mode SaaS, c'est l'entreprise qui collecte les données qui demeure responsable auprès de la CNIL.

Portrait robot : un membre du ComEx proche des métiers

Au cours de sa soirée de gala, qui s'est tenue le 7 février au Grand Hôtel Opéra (Paris), l'Agora des DSI a sondé ses membres sur le profil idéal du DSI de demain. Voici, par ordre d'importance, les critères qu'ont mis en avant les quelque 250 décideurs présents lors de la soirée : 1) Il est membre du ComEx 2) Il est proche des métiers 3) Il participe à la création de valeur 4) Il est expert stratégique 5) Il a une influence transverse 6) Il partage avec ses pairs 7) Il a une dimension internationale 8) Il évangélise le digital dans l’entreprise 9) Il maîtrise les technologies

LeMagIT : Quel rôle peut jouer un club comme l'Agora des DSI dans ces transformations ? 

L.T. : On y retrouve des pairs qui partagent des problématiques communes. Au lieu d'aller sonder des prestataires - qui invariablement expliquent être en mesure de mener à bien tous types de missions -, je préfère échanger avec les DSI du retail au sein du club, si je suis confronté à des problématiques relatives à ces métiers par exemple. Ce qui permet de gagner du temps dans le déploiement des projets. Ainsi, une autre entreprise du club est en ce moment confrontée à un déploiement que nous avons réalisé il y a un an chez Alain Afflelou, celui d'un nouveau portail de pilotage de la performance. Les directeurs du contrôle de gestion de nos sociétés respectives vont se rencontrer pour permettre à cette société d'aller plus vite. Ces échanges remplacent des proof of concept, très consommateurs de temps. 

LeMagIT : Le DSI reste un dirigeant à part dans les entreprises : il a tendance à rester confiné à l'informatique contrairement à d'autres profils de direction. Est-ce que cette particularité est appelée à disparaître ? 

L.T : C'est un réel sujet de réflexion dans la profession. On a l'impression que les DSI voient leur intégration dans le ComEx comme l'aboutissement de leur carrière, sans perspective au-delà. Même s'il existe évidemment quelques contre-exemples, comme des DSI qui prennent en main les achats, la logistique, les call centers... La montée en puissance du numérique dans la relation client amène une autre opportunité. Car si elles sont aujourd'hui très souvent séparées, les directions informatiques et du digital ont vocation à ne faire qu'une dans les années qui viennent.

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