Google et Apple unis... contre le fisc

En comptant les pénalités et amendes, le fisc réclamerait 1,7 milliard d'euros à Google. En cause : les montages fiscaux baroques de la firme. Une gymnastique que connaît bien Apple. La firme à la pomme fait même figure de champion toutes catégories de "l'optimisation fiscale".

La facture que le fisc français s'apprĂŞte Ă  rĂ©clamer Ă  Google s'Ă©lève Ă  1,7 milliard d'euros et non Ă  un milliard comme annoncĂ© la semaine dernière. La mise Ă  jour de la douloureuse, explique le Canard enchaĂ®nĂ©, qui avait dĂ©jĂ  rĂ©vĂ©lĂ© l'affaire la semaine dernière, provient des pĂ©nalitĂ©s de retard et amendes que l'administration fiscale entend bien rĂ©clamer Ă  Google. Comme la semaine dernière, le moteur de recherche a rĂ©affirmĂ© n'avoir pas reçu de notification de redressement fiscal de la part de l'administration. Tout en dĂ©fendant son organisation, basĂ©e sur un siège europĂ©en Ă  Dublin (Irlande) pour ses activitĂ©s commerciales, et la conformitĂ© de ses opĂ©rations aux "lĂ©gislations fiscales de tous les pays dans lesquels l'entreprise opère, et avec les règles europĂ©ennes", a expliquĂ© un porte-parole de l'entreprise Ă  Reuters. 

Ce qui n'a pas empĂŞchĂ© Google de tenter d'obtenir au moins par deux fois l’annulation des perquisitions et saisies opĂ©rĂ©es en juin 2011 par le fisc dans ses bureaux parisiens. La Cour d’appel de Paris a rejetĂ© Ă  deux reprises les arguments du moteur de recherche. Dans son dernier arrĂŞt, datant du 31 aoĂ»t, la Cour prĂ©cise les griefs de la direction gĂ©nĂ©rale des impĂ´ts : cette dernière estime que « la sociĂ©tĂ© Google Ireland Limited exerce en fait en France en utilisant les moyens humains et matĂ©riels de la sociĂ©tĂ© Google France, une activitĂ© commerciale, sans souscrire les dĂ©clarations fiscales y affĂ©rentes Â». L'astuce : la signature d'un contrat de prestations de services dĂ©nommĂ© “Marketing and Services Agreement”, par lequel une grande partie de l'activitĂ© rĂ©alisĂ©e en France atterrit sur les comptes de la filiale irlandaise, avant de partir vers d'autres cieux via d'autres montages (Pays-Bas, puis les Bermudes). Google France ne jouant officiellement qu'un rĂ´le d'assistance technique et marketing. 

En France, selon les estimations, le gĂ©ant de la recherche aurait rĂ©alisĂ© en 2011 un chiffre d’affaires compris entre 1,25 et 1,4 milliard d’euros. Tout en ne versant qu’un peu plus de 5 millions d’euros d’impĂ´t. 

RĂ©munĂ©rer la presse française : c'est non pour Google 

Cette bataille entre Google et le fisc français intervient alors que le moteur est sommĂ© par l'exĂ©cutif de trouver un accord avec les Ă©diteurs de presse, aboutissant Ă  une rĂ©munĂ©ration de leurs contenus. Dans un entretien au New York Times, Eric Schmidt, le prĂ©sident de Google, a dit espĂ©rer parvenir Ă  un accord avec la presse française d'ici Ă  la fin de l'annĂ©e, s'affirmant favorable Ă  la nomination d'un mĂ©diateur par le gouvernement mais Ă©cartant toute forme de rĂ©munĂ©ration pour les contenus amenĂ©s par les sites de presse. Alors qu'il s'agit prĂ©cisĂ©ment de l'objet de la nĂ©gociation... 

Comme nous l'indiquions la semaine dernière, citant les cas de Microsoft et Oracle, Google n'est pas, loin s'en faut, le seul tĂ©nor de l'IT Ă  pratiquer les montages fiscaux les plus baroques pour Ă©chapper au fisc français ou Ă  ses homologues d'autres pays europĂ©ens. Selon BFM Business, le champion toutes catĂ©gories serait Apple. Nos confrères estiment que la sociĂ©tĂ© rĂ©aliserait dans l'Hexagone 3,5 milliards d'euros de chiffre d'affaires tout en ne payant que... 6,7 millions d'impĂ´ts. Une aumone. LĂ  encore, selon BFM, le montage fiscal passe par l'Irlande (et le Luxembourg concernant iTunes Store) puis par les Ă®les Vierges britanniques, un paradis fiscal nichĂ© dans les CaraĂŻbes, oĂą Apple dispose d'une filiale prĂ©sentĂ©e par nos confrères comme "une simple boĂ®te Ă  lettres sans activitĂ©" hĂ©bergĂ©e dans les bureaux d'une banque de Hong-Kong. 

Apple : un taux d'imposition infĂ©rieur Ă  2% 

Et ça marche. Les rĂ©sultats de cette gymnastique fiscale sont tout bonnement Ă©bouriffants. Grâce Ă  ses montages, Google n'a payĂ© que 248 millions de dollars d'impĂ´ts en 2011 pour ses activitĂ©s Ă  l'Ă©tranger, alors que 54 % de son chiffre d'affaires sur cet exercice (près de 38 Md$) provenait de ses activitĂ©s hors des Etats-Unis et qu'il y a rĂ©alisĂ© un bĂ©nĂ©ficie avant impĂ´t de 7,6 Md$. Soit un taux d'imposition de 3,2 % (Ă  comparer au taux d'imposition aux Etats-Unis : 42,5 %). "La quasi-totalitĂ© des bĂ©nĂ©fices rĂ©alisĂ©s via des opĂ©rations Ă  l'Ă©tranger proviennent de la filiale irlandaise", explique Google dans son dernier rapport Ă  la SEC, le gendarme des bourses amĂ©ricaines. 

Apple fait encore mieux. Lors de son dernier exercice fiscal, clos le mois dernier, la firme californienne n'a payé que 713 millions de dollars d'impôts à l'étranger, alors qu'elle y réalisait 36,8 milliards de dollars de profits. Soit un taux d'imposition de moins de 2 %. Sur son sol, le constructeur de l'iPhone paie en revanche plus de 13 Md$ d'impôts, alors que ses bénéfices y sont bien inférieurs.

Pour approfondir sur Législation

Close