pathdoc - stock.adobe.com

Chez Salesforce, l’IA va assurer jusqu’à 50 % du travail

Le Chief Digital Officer de Salesforce revient sur cette promesse de son président, Mark Benioff. Il dévoile ce que l’éditeur fait déjà avec l’IA en interne, les usages naissants, et la manière dont ces évolutions impactent le travail, mais aussi les résultats.

Marc Benioff, PDG de Salesforce, l’affirme haut et fort : l’intelligence artificielle (IA) sous toutes ses formes pourra prendre en charge entre 30 % et 50 % du travail interne au sein de son groupe. Cette déclaration a évidemment fait réagir.

Mais que recouvre réellement ce chiffre ? Et avec quelles implications pour les salariés ? Nous avons posé la question à Joe Inzerillo, nommé début 2025 directeur du numérique de l’éditeur de CRM après un parcours chez Disney, la Major League Baseball et SiriusXM.

« L’IA nous permet de produire 30 % de code en plus »

« C’est une question compliquée », admet d’entrée Joe Inzerillo. « L’IA est partout chez nous, elle est intégrée dans différents outils. Dans le cas de Cursor par exemple, il n’y a aucun doute : nous écrivons environ 30 % de code en plus qu’auparavant. Et comme une grande partie de notre activité consiste justement à produire du code, c’est un bon point d’ancrage. »

Photo de Joe Inzerillo Joe Inzerillo,
Chief Digital Officer
de Salesforce

 Salesforce exploite aussi ses propres outils, comme Agentforce, ou d’autres logiciels enrichis d’IA. « Chaque semaine, nous constatons une adoption accrue. Donc oui, c’est un chiffre parfaitement plausible », défend Joe Inzerillo.

Mais selon lui, il serait réducteur de voir cette évolution comme une simple substitution.

« Les agents IA sont efficaces dans certains domaines, les humains dans beaucoup d’autres. Il ne s’agit pas seulement de dire qu’ils effectuent 30 % du travail. En réalité, nous faisons 30 % de travail supplémentaire. Ces agents prennent en charge des tâches basiques – rappels, prise de rendez-vous, relances – qui peuvent désormais être automatisées de manière satisfaisante. Les collaborateurs humains, eux, se concentrent sur des missions à plus forte valeur. »

Pas de destruction massive d’emplois

À ceux qui craignent que l’automatisation des tâches simples ne bloque l’accès à l’emploi pour les plus jeunes, Joe Inzerillo évoque sa propre histoire. « Quand j’étais étudiant, les calculatrices programmables étaient interdites. Aujourd’hui, les élèves arrivent en cours avec un ordinateur portable ! Les métiers changent. Je pense que ces outils élèvent le niveau général et que le poste junior de demain ne sera pas le même que celui d’hier. »

Lui qui a connu « la révolution du web, du mobile et du streaming » affirme que l’essor de l’IA agentique est « la plus rapide » des transitions qu’il ait observées. « Mais pour l’instant, nous ne voyons pas d’effet de substitution. Nous voyons une multiplication de la force de travail. »

Une gouvernance stricte des agents

Cette accélération ne doit cependant pas se faire sans de sérieux garde-fous. Salesforce a par exemple mis en place un comité de gouvernance de l’IA (AI Governance Board) qui réunit des experts de la technologie, des juristes et des responsables RH.

« Nous sommes attentifs à l’efficacité des agents, mais aussi à leur comportement », insiste Joe Inzerillo.

Agentforce, souligne-t-il, se distingue des modèles de langage (LLM) déployés sans contrôle. « [La plateforme d’agents IA] est conçue avec des couches de confiance, des mécanismes d’ancrage des données et des garde-fous qui l’empêchent de dérailler. On ne risque pas de voir apparaître un agent qui se mettrait soudain à tenir des propos antisémites », assure-t-il.

Agents IA et forces commerciales

Dans le service client, les agents numériques seraient déjà omniprésents.

« Un agent peut réinitialiser un mot de passe, fournir des informations ou orienter vers un commercial », illustre Joe Inzerillo. « Plus intéressant encore, ils gèrent désormais des tâches un peu plus complexes en langage naturel, comme approuver une note de frais ou organiser un déplacement. »

Une autre application de l’IA, dans Tableau cette fois (Tableau Next), démocratiserait également grandement l’analytique avancée et la BI en interne – des domaines qui ont jusqu’ici toujours demandé un certain niveau d’expertise en Data Literacy. « On peut aujourd’hui poser une question en parlant à Tableau et obtenir un dashboard avec lequel on peut ensuite interagir de manière dynamique ».

Au finale, ces agents allégeraient considérablement les centres de contact. « La première interaction sur notre site d’aide est désormais assurée par un agent. Et il s’avère plus rapide et plus efficace que les humains », avance le responsable. Salesforce a d’ailleurs annoncé que ses agents avaient traité leur millionième demande de support la semaine dernière.

Et côté ventes ? « Là aussi, la pénétration est forte, surtout via nos intégrations à Slack », confie Joe Inzerillo. « Les commerciaux ne perçoivent même plus l’agent comme tel : ils se rendent sur un canal Slack, posent leurs questions et obtiennent des réponses ».

Plus de chiffres précis à Dreamforce

« Nous multiplions aussi les projets pilotes. Les ventes sont plus complexes que le service, il nous faut plus de temps pour générer de la valeur. Mais si un commercial passe 40 % de sa journée à faire de la recherche et qu’on peut en déléguer 90 % à un agent, cela libère énormément de temps pour ses clients. »

Joe Inzerillo conclut sur une promesse : « Nous n’avons pas encore de chiffres à communiquer sur l’impact en matière de ventes. Mais je peux vous dire qu’il y a un impact ! Nous aurons des résultats à partager prochainement ».

Probablement lors de Dreamforce cet automne.

Propos recueillis en juin 2025 par notre collègue Don Fluckinger.

Pour approfondir sur Gestion de la relation client (CRM)