La bataille pour le contrôle de SFR s'intensifie

Le groupe Bouygues a officialisé hier sa proposition d'un mariage entre Bouygues Telecom et SFR. Une offre qui constitue la riposte du groupe à celle d'Altice, qui contrôle Numéricable/Completel.

La bataille pour le contrôle de SFR s’intensifie. Hier, le groupe Bouygues a proposé à Vivendi une offre de fusion entre sa filiale Bouygues Telecom et SFR, une offre qui donnerait naissance au numéro 2 français des télécoms et au n° 7 européen du secteur. Cette proposition audacieuse s'inscrit dans le prolongement d'un accord de mutualisation des infrastructures mobiles déjà signé entre les opérateurs et de l'accord de collaboration dans la fibre. L’offre de Bouygues  valorise SFR à 14,5 Mds€. Elle propose à Vivendi 10,5 milliards d’euros en numéraire et 46 % du nouvel ensemble. 


Désireux de désamorcer par avance toute critique sur l’impact économique d’une telle fusion, le groupe Bouygues met en avant la contribution qu’aurait le nouvel ensemble en matière d’investissement. Selon le groupe Bouygues, la société issue de la fusion serait en mesure d’augmenter sa contribution au déploiement de la fibre optique dans les grandes métropoles et dans les zones moins denses : « avec 400 millions d’euros d’investissements par an dans la fibre optique, soit un doublement du rythme actuel, il s’inscrirait pleinement dans les objectifs du plan France Très Haut Débit » explique l’opérateur dans un communiqué. Bouygues se veut aussi rassurant sur l’emploi :  « le nouvel ensemble serait en mesure d’éviter tout départ contraint et de redynamiser l’emploi dans le secteur ». On notera au passage que Bouygues se limite à évoquer l’absence de départs contraints, ce qui ne veut pas dire que la fusion se ferait sans suppression d’emplois… D’ailleurs le groupe de BTP évoque des synergies en année pleine s’élevant à 1,4 milliard d’euros dont 80 % de synergies de coûts et 20 % de synergies d’investissements.

Le nouvel ensemble serait Introduit en bourse dès la réalisation de la fusion ce qui permettrait à Vivendi de céder immédiatement 15 % supplémentaires du capital de l’opérateur (il pourrait ensuite progressivement rendre liquide le solde de sa participation dans le calendrier de son choix. En clair, pour contrer l’offre d’Altice, Bouygues fait miroiter à Vivendi une possible appréciation du cours de l’opérateur issu de la fusion du fait des synergies et de l’impact de la consolidation du marché, qui lui permettrait de valoriser SFR à un niveau supérieur aux quelque 15 Md € proposés par Altice (qui propose de son côté de racheter SFR pour le fusionner à l’ensemble Numericable/Completel).

L'épineuse question de l'Autorité de la Concurrence

Reste toutefois l’obstacle du gendarme de la concurrence. Si la Commission Européenne ne semble a priori pas opposée à une consolidation du secteur des télécoms en Europe (plus de 15 ans après l’ouverture de la concurrence, les géants européens restent des nains face aux géants américains et asiatiques, faute d’avoir réussi à développer des empreintes continentales), l’autorité de la concurrence française s’était montrée particulièrement rétive à une éventuelle opération de consolidation du secteur menée par Free. En décembre son président, Bruno Lasserre, avait ainsi averti que « certaines configurations de rapprochement se heurteraient à un refus net de notre part ». Il sera intéressant de voir sa réaction à une éventuelle fusion Bouygues/SFR, surtout qui aboutirait à la naissance d’un second opérateur puissant face à France Télécom et qui ferait de Numéricable Completel et de Free des nains face au nouvel ensemble. La menace d’un éventuel veto de l’autorité de la concurrence ou de sévères mesures de contrôle pourrait refroidir l’intérêt de Vivendi pour une fusion de sa filiale télécoms avec Bouygues Telecom et lui faire privilégier l’offre d’Altice ou une mise en bourse pure et simple de sa filiale. Car l’offre d’Altice n’a pas que des avantages. Elle repose sur un important levier d’endettement (près de 8 Md€), qui, dans une configuration de concurrence à 4 opérateurs, pourrait mettre en péril l’équilibre économique de SFR…

 

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