Recrutement : une sélection qui met les développeurs au centre du jeu

Lier le processus de recrutement à la valorisation du métier de développeur : une initiative prometteuse ?

Faut-il être passé par le monde des start-ups pour savoir reconnaître ce qui fait courir les développeurs ? C'est en tout cas l'expérience du quatuor à l'initiative d'une modalité de recrutement 100% dédiée aux développeurs, médiatisée par la plate-forme breaz.io. Une modalité – en ces temps de regain de mobilité chez les professionnels de l'IT – qui pourrait bien faire école pour d'autres profils que les développeurs et pour les entreprises en quête d'agilité.

Le principe en est simple. Faire gagner du temps aux deux parties, en tablant sur la mise en correspondance la plus pointue possible entre l'offre d'emploi et l'intérêt du candidat potentiel. Preuve s'il en est besoin, que pour des métiers dits «en tension », les méthodes d'approche plus classiques (publication d'annonces, etc), même si elles se sont mises à l'heure de l'interactivité high tech (réseaux sociaux, etc) ne sauraient suffire. D'autres job boards généralistes ou dédiés IT (Qapa, chooseyourboss, etc) jouent cette carte du « matching ». Mais breaz.io entend inverser plus ostensiblement encore le processus de sourcing et de casting.  

Lors d'une session de recrutement organisée par et sur cette plate-forme, c'est bel et bien le développeur qui se voit proposer le choix entre plusieurs employeurs. Un « dating » qui n'a rien de « speed » puisqu'il laisse du lundi au samedi les contacts et les décisions s'élaborer. Et pas seulement sur la foi d'argumentaires prémâchés. Des deux côtés, employeurs et candidats, les participants à ces sessions – sur rendez-vous – sont triés sur le volet.

Mise en concurrence des employeurs

Le rendez-vous est bimensuel pour l'instant. Ainsi, encore dans sa version beta, 10% des candidats ont été retenus pour participer à la première session fin mai. Dès le buzz du lancement de breaz.io émis dans le milieu des start-ups, en 3 jours, 200 développeurs s'étaient inscrits. Et réciproquement, la première session d'enchères a fait le plein côté employeurs avec une trentaine d'offres de postes. Résultat : 40% des postes présentés ont été pourvus. Pour un montant cumulé de salaires avoisinant 1,5 M€. Bien que le terme de session d'enchères soit pertinent pour définir le processus, le salaire est loin d'être le critère prédominant dans cette mise en concurrence.

De fait, la spécificité du métier et du contexte (technique, économique) joue à plein. La sélection des candidats se fait, certes, sur fond d'évaluation des compétences techniques. Un critère crucial aux yeux des employeurs que mettent en exergue par ailleurs les hackatons et autres mises en situation. Mais pour cette phase de validation, la démarche de l'équipe de breaz.io se veut plus proche de celle d'un cabinet de recrutement. « On teste et juge autant le niveau technique des candidats que leur comportement, leur état d'esprit. » D'autant plus que, abondamment sollicités par les propositions de défis de programmation en tous genres, les développeurs semblent apprécier que l'on mette l'accent sur la correspondance du poste proposé et de leurs motivations, dont peut faire partie le challenge technique à relever, mais pas seulement. Sondés l'an dernier (fin 2013) par Chooseyourboss sur leurs critères de sélection dans la recherche d'un emploi, les candidats développeurs plaçaient en tête de liste la localisation, puis le salaire, la notoriété de l'entreprise et l'intérêt du poste.

Je bouge donc je suis

L'enquête MobiCadres qui vient d'être publiée par Deloitte, en analysant les raisons de la mobilité chez les cadres (tous métiers confondus), y ajoute une touche quasi-existentielle : « je bouge donc je suis ». Que la mobilité volontaire soit dans la même entreprise ou en allant voir ailleurs, mobilité et aspiration à la  reconnaissance vont de pair. Certes, le regain du turnover observé dans le secteur IT (sur 21% des changements de postes opérés en 2013, 52% correspond à un changement d'employeur) s'explique, selon Deloitte, par « une forte demande des entreprises sur des profils experts ». Mais pour ces derniers, et pour les développeurs, l'évolution de carrière et celle de l'environnement professionnel pèsent sans doute autant dans la balance que pour l'ensemble des cadres. Plus que le critère du salaire, en tout cas, selon ce baromètre MobiCadres.

Réciproquement, le choix du quatuor de breaz.io de n'ouvrir son service de médiation pour l'instant qu'aux start-ups ou aux entreprises dont le sort dépend de leur équipe de développeurs, est lié à ce souhait de se focaliser sur la « valorisation » de ce métier. Un milieu dans lequel eux-mêmes ont fait leurs armes, notamment au sein des entreprises de e-commerce lancées par le groupe Rocket Internet, d'origine berlinoise, notoire pour sa réputation de « cloneurs » de start-up.

Ainsi parmi les employeurs retenus (30% de ceux qui ont pris contact) pour les premières sessions de recrutement organisées en mai et juin, pas de SSII ou ESN ni d'agences web. Des petites structures, naissantes ou en forte croissance, dont certaines se développent déjà hors frontières. Le principal atout de ces employeurs dans le processus d'enchère (au sens de mise en concurrence) étant de savoir démontrer leur volonté de « valoriser leurs développeurs ». Edouard Rosenblum, directeur général de breaz.io, et ses comparses, ont l'ambition de faire de leur initiative un outil « au service de la mobilité et de la fluidité sur le marché de l'emploi en Europe ». Et le modèle économique qu'ils ont l'intention de faire vivre dans ce contexte est lui aussi relativement innovant. A la différence de la pratique d'un cabinet de recrutement, la commission prélevée sur chaque embauche concrétisée par leur médiation se chiffre en % du salaire annuel du poste pourvu, mais sous forme de versement mensuel étalé sur 18 mois - le prélèvement s'arrêtant en cas de départ avant terme.

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