Suppression des frais de rapatriement de données : AWS s’aligne sur GCP

C’est au tour d’AWS d’annoncer une mesure pour supprimer les frais de transfert s’appliquant au moment de quitter son cloud. Un effet d’annonce qui permet au géant du cloud de s’aligner avec Google Cloud et de respecter – a priori – le Data Act européen.

Le fournisseur, avec ses plus de 200 services et plus de 750 instances, est souvent pointé du doigt par ses concurrents pour l’application « d’egress fees », de coût de transfert de données conséquent. CloudFlare et DigitalOcean l’ont transformé en argument marketing.

Surtout, les autorités européennes ont induit, à travers le Data Act, la suppression des frais de transfert de données dans le cas d’une migration vers un autre cloud ou sur site. Une mesure qui devrait être pleinement appliquée 36 mois après l’entrée en vigueur du texte. Il s’agit de mettre fin à des clauses contractuelles abusives imposées par les fournisseurs à leurs clients au moment de quitter une infrastructure cloud.

En 2021, AWS avait déjà annoncé la possibilité de transférer gratuitement 100 Go de données par mois par région cloud (au lieu de 1 Go auparavant) pour des services comme EC2, S3, Elastic Load Balancing et d’autres, mais AWS n’en précise pas la liste complète. De même, il avait rendu gratuit le rapatriement d’un téraoctet de données par mois depuis AWS CloudFront. Ces limites sautent aujourd’hui, à une condition près.

Seulement 10 % des clients d’AWS seraient potentiellement concernés

Selon Sébastien Stormacq, principal developer advocate chez AWS, « 90 % des clients ne payeraient pas de coûts de sortie des données », parce que le fournisseur a pris ces deux mesures.

Les grands clients souhaitant quitter AWS devront demander à leur responsable de compte la procédure à suivre quand le volume de données dépasse 100 Go par mois.

« Il est nécessaire de passer par l’assistance, car vous effectuez des centaines de millions de transferts de données chaque jour, et nous ne savons généralement pas si les données transférées vers l’internet font partie de votre activité normale ou s’il s’agit d’un transfert ponctuel dans le cadre d’un passage à un autre fournisseur de services en cloud ou sur site », justifie Sébastien Stormacq, dans un billet de blog.

Il faudra que la demande soit justifiée et validée par l’équipe support d’AWS. Une fois l’accord obtenu, le client « recevra un crédit temporaire pour le coût du transfert des données, basé sur le volume de toutes les données stockées sur les services AWS au moment du calcul » par le fournisseur cloud.

Des conditions plus ou moins négociables

« Vous pouvez revenir à tout moment. Bien entendu, nous exercerons une surveillance accrue si le même compte AWS demande plusieurs fois à bénéficier d’un transfert gratuit. »
Sébastien StormacqPrincipal developer advocate, AWS

Comme chez Google Cloud, une fois acceptée, cette migration devra se faire en 60 jours. « Le crédit ne sera pris en compte que pour l’utilisation du transfert de données et ne s’appliquera pas à l’utilisation d’autres services », précise la FAQ d’AWS. « Après avoir quitté les services AWS, vous devez, dans les 60 jours, supprimer toutes les données et charges de travail restantes de votre compte AWS, ou vous pouvez fermer votre compte AWS ».

Selon le même document, cette condition est négociable. « Si vous souhaitez déplacer l’utilisation totale d’un seul service, mais pas l’ensemble, contactez le service clientèle d’AWS », lit-on dans la FAQ. De même, que les deux mois pour rapatrier les données sont sujet à discussion avec le support du fournisseur.

« Nous ne vous demandons pas de fermer votre compte ou de modifier votre relation avec AWS de quelque manière que ce soit », affirme Sébastien Stormacq, dont les propos ne semblent pas traduire toute la subtilité du contenu de la FAQ. « Vous pouvez revenir à tout moment. Bien entendu, nous exercerons une surveillance accrue si le même compte AWS demande plusieurs fois à bénéficier d’un transfert gratuit », ajoute-t-il. Clairement, le fournisseur entend facturer les usages abusifs de cette option de rapatriement.

« Je doute que beaucoup de clients les prennent vraiment au mot, car il faut tout déplacer d’AWS pour obtenir les crédits. »
Darryl Ruggles Cloud Solutions Architect, AWS

Qui plus est, AWS signale que « seuls les frais de transfert des données liés à l’abandon d’AWS sont éligibles à des crédits gratuits ». Les frais d’usage ainsi que le recours aux services de transferts de données –, CloudFront, AWS Direct Connect, Snow Family, AWS Global Accelerator demeurent payants.

Ici, il ne s’agit pas d’éliminer tous les frais de transfert de données, mais uniquement ceux liés au rapatriement des données vers un autre cloud ou vers des instances on premise.

Et au fournisseur de préciser qu’il « peut à tout moment apporter des modifications concernant les transferts gratuits de données vers l’internet ».

« C’est mieux que rien », considèrent les ingénieurs IT

Ce sont, à peu de variables près, les mêmes conditions imposées par Google Cloud en janvier dernier. Pour autant, le coût de la migration ne se situe pas dans les frais de réseau, mais bien dans les aspects organisationnels d’une telle opération, expliquait François Denis, directeur Conseil Cloud pour l’ESN Wenvision, en réponse à l’annonce de GCP.

En clair, peu de clients se lanceront dans un tel projet qui demande, potentiellement, de former une équipe à la suite de services d’un autre fournisseur.

« Il s’agit surtout d’une opération de relations publiques (pour égaler Google), mais c’est mieux que rien, je suppose. Je doute que beaucoup de clients les prennent vraiment au mot, car il faut tout déplacer d’AWS pour obtenir les crédits », estime Darryl Ruggles, Cloud Solutions Architect chez Ciena, s’exprimant en son nom sur X (Twitter).

« Une diminution du coût de transfert des données (egress fees) aurait été encore plus appréciée. »
Olivier BazoudVP Platform, Sendinblue

« AWS est désormais aligné sur son principal concurrent sur le marché du cloud. C’est un bon départ pour éviter l’enfermement propriétaire », considère de son côté Olivier Bazoud, VP Platform chez Sendinblue. « Une diminution du coût de transfert des données (egress fees) aurait été encore plus appréciée », ajoute-t-il, sur LinkedIn.

Pour rappel, certains fournisseurs incluent les egress fees et les rapatriements de données dans leurs services. C’est le cas d’OVHcloud, de Scaleway, de 3DS Outscale, de Clouflare (pour R2) tandis qu’Oracle propose le transfert de 10 téraoctets gratuit par mois.

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