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Dell dévoile son propre OS réseau ouvert basé sur Debian Linux

Après avoir goûté aux OS réseaux ouverts en proposant ceux de Big Switch ou de Cumulus sur ses commutateurs Ethernet, Dell se lance dans le grand bain avec OS10, son propre OS réseau ouvert et modulaire basé sur Debian Linux. Il équipera à terme tous les commutateurs du constructeur.

Dell a dévoilé hier une nouvelle génération de système d’exploitation ouvert pour ses équipements réseaux, un OS modulaire basé sur un noyau Debian Linux et dont l’ambition est d’offrir plus de choix et de capacités aux utilisateurs de ses commutateurs Ethernet.

Baptisé Operating System 10 (OS10), le nouvel opus de Dell Networking s’inspire des OS réseaux (ou NOS) ouverts proposés actuellement par des acteurs comme Big Switch ou Cumulus, que la firme supporte par ailleurs sur certains de ses commutateurs. OS10 participe de la désagrégation en cours entre matériel et logiciel dans le monde des réseaux. Comme dans le monde des serveurs, depuis 20 ans, on assiste actuellement à une séparation progressive entre matériel de commutation et logiciel de commutation. Un mouvement popularisé par l'adoption des approches SDN, qui a permis à plusieurs OS réseau ouverts d’émerger, des OS en général basés sur Linux et qui ont la caractéristique de fonctionner sur des commutateurs fabriqués par des constructeurs divers.

Un OS ouvert, alternatif à ceux de Big Switch, Cumulus, ou IP Infusion

Comme ces OS ouverts, l’OS10 de Dell est architecturé autour d’un noyau Debian Linux déployé au dessus d’une couche d’abstraction conforme à l’API SAI de l’open Compute Project, qui lui permet d’ accéder aux capacités de l’ASIC de commutation. Au dessus de ce package de base, l’OS permet de déployer des fonctions additionnelles proposées de façon modulaires et fournissant les différents services attendus d’un commutateur moderne (fonctions de niveau 2 et 3, analyse de trafic, reporting, supervision, sécurité, filtrage, API d’automatisation...).

Ces modules peuvent être soit ceux proposés par Dell ou des modules provenant de fournisseurs tiers. Ils peuvent aussi être développés spécifiquement par les entreprises utilisatrices. L’objectif de Dell est de permettre aux exploitants réseaux de ne déployer que les composants pertinents pour leurs besoins, mais aussi de permettre aux développeurs de tirer parti de façon spécifique des capacités des commutateurs. On peut par exemple imaginer des opérateurs développer et déployer des fonctions NFV basiques directement sur l’OS du commutateur.

Joyent, un fournisseur de services de cloud IaaS et PaaS, qui a participé à la phase de développement d’OS10, a ainsi mis en œuvre le nouvel OS dans ses datacenters en l’enrichissant avec le code de routage BGP open source de la suite Quagga. Pour Jason Long, le directeur des opérations et de l’architecture réseau de Joyent,  « l’OS10 de Dell Networking apporte à un fournisseur Cloud moderne les gains de flexibilité et la facilité de programmation nécessaires pour innover et prospérer dans un environnement fortement évolutif ».

Antonio Cisternino, le directeur adjoint du centre IT de l’université de Pise voit un autre avantage à l’ouverture d’OS10. Il explique : « L’ouverture d’OS10 et son adaptabilité de programmation m’ont permis d’installer un runtime mono standard et le pack langage F# et de développer rapidement une passerelle sécurisée pour applications IoX. Je peux même compiler et déboguer sur OS10, et comme j’ai la même pile logicielle, je peux le faire sur mon PC pour être plus productif».

Une arrivée qui va s’étaler tout au long de 2016

La version de base d’OS10 est attendue pour la fin du mois de février et une version bêta de la version premium (incluant une pile complète de services de commutation et de routage, des outils d’administration, des services IP, la gestion des politiques de trafic,...) sera aussi proposée à la même date (la version finale est attendue vers la fin août). Dans un premier temps, OS10 fonctionnera sur les commutateurs Dell de la série S avant de supporter les commutateurs plus évolués de la série Z en fin d’année.

À plus long terme, OS 10 devrait aussi permettre à Dell de faire converger ses deux OS réseau historiques, l’OS6 des commutateurs PowerConnect et l’OS9 des commutateurs Force10 des séries S et Z.

Plus qu’un OS de commutation

Si OS10 est un OS pour commutateur aujourd’hui, il pourrait avoir un rôle plus large à jouer. « Aujourd’hui il est question d’un Network Operating System Linux, mais il pourrait servir de fondation logicielle à un Linux unifié pour l’ensemble de l’infrastructure datacenter de Dell – compute, réseau et stockage » explique Brad Casemore, un analyste d'IDC. Cette fondation simplifierait « l’automatisation, la programmation et l’orchestration autour d’outils et de pratiques DevOps communes ».

OS10 pourrait devenir une brique essentielle dans la construction de briques convergées et hyperconvergées du futur Dell/EMC. L’OS pourrait aussi être le point d’interface pour l’interconnexion avec NSX de VMware. Enfin l’OS pourrait servir de fer de lance ouvert à une offensive dans les SDN face à l’approche framework ACI de Cisco.

Dans un premier temps la cible de Dell avec OS10 est l’univers de la finance, les fournisseurs de services cloud, ainsi que les entreprises disposant de très grands datacenters virtualisés. L’idée est d’offrir une alternative à l’approche propriétaire d’un Cisco ou aux approches de nouveaux entrants tels qu’Arista Networks.

Il est à noter que le fait que l’OS soit bâti au-dessus de l’API SAI pourrait en théorie permettre à Dell de proposer son OS sur les commutateurs ouverts de concurrents. Pour l’instant, la firme a toutefois décidé de le limiter à ses propres équipements. Aucun prix n’a pour l’instant été dévoilé.

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