Cet article fait partie de notre guide: NLP : des attentes fortes, une réalité contrastée

La BRED engage Watson pour gérer les e-mails de ses conseillers

Après un pilote concluant, les e-mails des conseillers de la BRED sont maintenant traités à l’aide de Watson, le moteur de traitement du langage naturel d’IBM. Objectif : leur faire gagner du temps.

La Banque Populaire coopérative BRED sert pas moins d’un million de clients et gère 4,6 milliards d’euros de capitaux propres. Cette filiale de la BPCE compte 5 600 collaborateurs (25 % sont hors de Métropole et des DOM).

Les conseillers en agence traitent de plus en plus les demandes de leurs clients par mail. Les courriels ont un taux de croissance de 5 % par an. Or, répondre à tous ces messages réclame un temps considérable. Cela laisse moins de possibilités pour s’occuper des rendez-vous des clients ou bien pour traiter les tâches liées à la gestion d’une agence bancaire.

En ce sens, la BRED voulait faciliter le travail de ses collaborateurs.

« Le fait de proposer un outil d’assistance au conseiller est une volonté forte de la direction de la BRED », explique Jean-François Mondou, directeur informatique - banque de détail, chez la BRED.

Il fallait donc une solution pour gérer les courriels entrants et accélérer leur traitement. La DSI de la filiale de la BPCE s’est rapidement intéressée au traitement du langage naturel (NLP) pour identifier les demandes des clients et créer des modèles de réponse préconçus à modifier par les conseillers.

« Il y a quelques années, nous avions testé une autre solution de réponse aux e-mails qui ne nous a pas satisfaits. Nous avons observé d’autres solutions d’intelligence artificielle qui ont mené à des POC », affirme François Mondou.

Le cahier des charges de la BRED pour Watson

La banque a finalement choisi une solution basée sur l’intelligence artificielle d’IBM : Watson.

« Quand IBM est venu nous présenter sa solution liée à Watson en nous démontrant qu’elle était mature, nous avons accepté de la déployer dans un premier temps sous forme de POC. Après quelques mois, la promesse était tenue, nous sommes passés en production », explique le directeur informatique de la BRED.

Selon le responsable, le fait que Watson a un champ d’applications beaucoup plus large que l’analyse et la réponse aux e-mails a facilité la décision.

Par ailleurs, la BRED a apprécié les références affichées par l’éditeur. « IBM a implémenté Watson dans d’autres banques. Nous voulions également être en avance de phase sans trop prendre de risques concernant la relation client », précise Jean-François Mondou.

Cependant, une telle décision dépend souvent des relations qu’une entreprise entretient avec ses fournisseurs de technologies.

« IBM est un partenaire privilégié de longue date à la BRED, puisqu’IBM s’occupe de notre mainframe », assure le directeur informatique. « Les projets que nous avons pu mener avec IBM se passent très bien et nous avons fortement “challengé” le coût de la solution », ajoute-t-il.

Ce cas d’usage est issu de la combinaison de deux services afin de proposer un système personnalisé. Les algorithmes de Watson Natural Language Understanding sont capables de reconnaître les intentions et les entités dans un texte non structuré. Ensuite, Watson Knowledge Studio permet, dans une approche low-code, d’entraîner et de superviser les modèles développés à l’aide du premier outil.

« La capacité d’IBM à construire ce moteur cognitif adapté à notre contexte et à nos besoins nous a plu », remarque Florent Beaudoire, directeur de projets développement - banque de détail chez la BRED.

Pour la BRED, Watson devait effectuer trois tâches :

– Analyser la demande des clients,

– Proposer des modèles de réponse en fonction de l’intention détectée,

– Indiquer la notion d’urgence.

Faire collaborer le SI et les métiers

Afin de répondre à ce cahier des charges, la banque coopérative et IBM ont organisé conjointement des ateliers pour orchestrer les chantiers du côté SI et du côté métiers.

« Pour construire et personnaliser le moteur cognitif utilisé par la BRED, nous avons travaillé en mode Agile dans le cadre d’ateliers. »
Florent BeaudoireBRED

« Pour construire et personnaliser le moteur cognitif utilisé par la BRED, nous avons travaillé en mode Agile dans le cadre d’ateliers sur une période de quelques mois, sur la base de nos e-mails clients », affirme Florent Beaudoire.

« Techniquement, IBM était moteur au cours des ateliers techniques afin de concevoir l’ensemble de l’architecture que nous souhaitions mettre en place. Tous les points concernant l’infrastructure et la sécurité ont été abordés avec l’ensemble des spécialistes de notre DSI », ajoute-t-il.

Le moteur cognitif a été déployé sur un VPC IBM dédié à la BRED. L’installation a pris deux mois selon les dirigeants.

La banque a confié un « gros échantillon de courriels anonymisés » à IBM que l’éditeur a fait analyser par Watson. « Le moteur cognitif identifie l’intention du client », précise Jean-François Mandou.

Actuellement, le moteur cognitif identifie une vingtaine d’intentions : des demandes de virement, de prise de rendez-vous, suivi d’un crédit, souscription

Ensuite, une équipe a été mise en place pour gérer la bibliothèque de modèles de réponse. Ceux-ci dépendent d’un arc de décision, selon le directeur informatique.

Cette préparation technique, juridique et les ateliers métiers ont eu lieu en parallèle.

« Nous n’avons pas souhaité faire un déploiement Big Bang. Y aller par étapes nous a permis d’accompagner le changement », avertit Florent Beaudoire. « Nous avons réalisé un pilote de quatre mois sur 300 conseillers déployés progressivement de mi-juillet à janvier 2020 », précise-t-il.

En janvier 2020, la BRED a déployé en production la solution propulsée par Watson auprès de 1 800 conseillers des particuliers et des professionnels dans des agences situées en Île-de-France, Normandie et outre-mer.

Le NLP réclame une amélioration continue

 Déployer un moteur cognitif ne demande pas simplement des préparatifs techniques d’après les responsables de la BRED.

« Nous avons une équipe d’amélioration continue parce qu’un moteur cognitif, c’est un peu comme un enfant que l’on élève. Il faut continuer à lui donner de nouveaux e-mails à analyser et lui indiquer quand il s’est trompé », illustre Jean-François Mondou.

Deux personnes s’occupent de maintenir et de faire évoluer la solution.

« Il y a beaucoup de relecture sémantique, de choix des mots pour que nous puissions déterminer les intentions, les entités, les tonalités. »
Jean-François MondouBRED

 « Il y a beaucoup de relecture sémantique, de choix des mots pour que nous puissions déterminer les intentions, les entités, les tonalités : le mécontentement et la notion d’urgence. À partir de ces informations-là, nous pouvons construire des arbres de décision afin de produire automatiquement des modèles de réponse en fonction des intentions détectées », détaille le directeur informatique.

Au bout de quelques mois, les apports de Watson se feraient déjà ressentir.

« Les conseillers peuvent prioriser le traitement des e-mails parce que l’on affiche l’intention sans même qu’ils aient à lire les messages depuis Outlook. Des petits pictogrammes traduisent l’urgence ou l’insatisfaction liée à la demande du client. C’est un confort d’utilisation qui est apprécié des conseillers », assure le directeur des projets développement. 

La Banque populaire ne veut pourtant pas que l’intelligence artificielle endosse le rôle des humains.

« Pour chaque intention détectée, nous allons avoir 1 à 5 modèles de réponse proposés aux conseillers. Le conseiller peut les insérer dans son mail. Le modèle va servir de trame qu’il peut modifier à sa guise avant de l’envoyer à son client. C’est bien le conseiller qui garde la main au bout du compte », dixit Florent Beaudoire.

La BRED veut poursuivre l’amélioration de l’outil afin qu’il reconnaisse davantage d’intentions et aide à créer des modèles de réponse toujours plus pertinents. Par ailleurs, la banque coopérative veut faciliter son intégration dans sa chaîne d’outils métiers.

« Dans la feuille de route, nous prévoyons d’ajouter des liens dans les e-mails vers les outils nécessaires à leur traitement. Par exemple, pour prendre rendez-vous, le conseiller pourra accéder à son application d’agenda. S’il est question d’effectuer un virement, d’ouvrir un compte, l’outil dédié sera accessible plus rapidement », conclut Jean-François Mondou.

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