Entretien avec Jim Zemlin, directeur de la Linux Foundation

Alors que s’est tenue cette semaine la conférence LinuxCon Europe à Dusseldorf, la rédaction s’est entretenue avec le directeur de la Linux Foundation Jim Zemlin. Il revient sur le projet Drone Code, sur la portée de la Core infrastructure Initiative ainsi que le programme de certification mis en place par la fondation.

« Nous adaptons l’ADN de Linux à d’autres projets »

Alors que s’est tenue cette semaine la conférence LinuxCon Europe à Dusseldorf, la rédaction s’est entretenue avec  le directeur de la Linux Foundation Jim Zemlin. Il revient sur le projet Drone Code, sur la portée de la Core infrastructure Initiative ainsi que le programme de certification mis en place par la fondation.

LeMagIT : La Linux Foundation a annoncé le projet Drone Code. Pouvez-nous nous expliquer la démarche ?

Jim Zemlin : Le code du projet DroneCode est en fait utilisé dans nombre de produits commerciaux qui font partie de l’industrie du drone. Dans les secteurs de l’agriculture et de la cartographie, notamment. Nombre d’entreprises utilisent déjà cette technologie et ce code. Le projet repose sur une plate-forme Open Source [APM de 3D Robotics] démarré par Chris Anderson de 3D Robotics, également auteur de renom. Ce projet avait besoin d’une organisation comme la Linux Foundation pour héberger et rassembler tous les efforts dans un projet indépendant où la propriété, ainsi que tous les aspects du projet en lui-même, sont partagés.

La plupart des entreprises qui dépendent de ce projet initial sur lequel elles ont adossé une gamme de produits et services souhaitaient une entité neutre pour encadrer ce projet et non pas une unique entreprise individuelle.

LeMagIT : L’industrie du drône représente donc un nouveau débouché pour Linux, au même titre que l’embarqué ?

J.Z : Assurément. Linux est parfaitement adapté à ce type d’industrie et d’applications. Linux est une plate-forme idéale pour les drônes.

LeMagIT : Avec le rôle central que jouent aujourd’hui Linux ainsi que l’Open Source dans des projets IT clés, comme le cloud, la virtualisation, le Big Data et les réseaux, notamment, le rôle de la fondation a-t-il évolué ?

J.Z : Nous continuons de supporter Linux et l’ensemble de l’écosystème. Cela n’a pas changé. Comme la portée de Linux s’est étendue aux différents piliers de l’IT, ainsi qu’aux secteurs de l’automobile et de l’automatisme, l’institution a évolué pour supporter une grande variété de secteurs. Linux est devenu plus grand et cela est plutôt naturel. Nous avons évolué en un sens : plusieurs segments de l’industrie IT viennent nous voir pour mettre en place et appliquer les pratiques de développement Open Source utilisées pour Linux. C’est le cas dans les SDN, le NFV, l’Internet des objets, notamment. Ils ne sont pas spécifiquement intéressés par Linux, mais par le modèle de développement, et comment cela peut aider à mettre en place des projets Open Source. C’est ce que nous avons réalisé avec de nouveaux projets.

LeMagIT : Vos processus ont-ils été adaptés ?

J.Z : Nous prenons nos processus en place et nous les appliquons à d’autres secteurs. Nous adaptons l’ADN de Linux à d’autres projets.

LeMagIT : La Linux Foundation a créé la Core Infrastructure Initiative (CII), dont l’objectif est de financer des projets Open Source vitaux pour l’IT moderne et Internet. OpenSSH, OpenSSL et NTP ont déjà reçu le soutien du projet. Comment se développe aujourd’hui CII ?

J.Z : Nous venons juste de lancer un appel à projets pour demander aux projets ayant besoin de financement de contacter la CII pour être épaulé. Nous travaillons en fait sur une série de projets à partir de plusieurs critères. Le premier, ces projets doivent être suffisamment importants et déployés à grande échelle pour être un élément critique de la sécurité et l’intégrité d’Internet. Et deuxièmement, ils doivent manquer de ressources et en avooir besoin pour améliorer le projet, en terme de membres, d’infrastructure et ses coûts associés, bonnes pratiques de développement. Nous cherchons à développer un programme qui peut être appliqué à tous les projets Open Source (bonnes pratiques, de testing, de sécurité du code) et améliorer l’écosystème Open Source dans son ensemble. Nous nous intéressons donc à des projets spécifiques, mais aussi à appliquer des bonnes pratiques globalement pour renforcer les projets. Il s’agit davantage d’une approche pro-active en matière de sécurité pour renforcer l’intégrité et la stabilité d’Internet.

LeMagIT : Cela illustre-t-il également une mutation de la contribution ?

J.Z : Je pense qu’il s’agit plutôt d’une autre méthode de contribution. Je ne pense que les méthodes de contributions aux logiciels Open Source aient fondamentalement changé.

Les ressources derrière ces projets devraient être équivalentes aux rôles que jouent ces projets dans la société. Dans ce contexte, les personnes qui dépendent de ces technologies devraient s’assurer que ces projets disposent des ressources suffisantes et si ce n’est pas le cas, proposer davantage d’investissement en matière d’infrastructure pour éviter que ne se reproduise ce qui s’est passé avec OpenSSL.

LeMagIT : La Linux Foundation a lancé son propre programme de certification de professionnels. Où en est-on ?

J.Z : L’un des plus importants chantiers et enjeux pour la Linux Foundation est que le rythme d’adoption de Linux et des technologies Open Source a dépassé de loin l’offre d’emplois. Nous avons fait des efforts pour fournir au marché davantage de développeurs et d’administrateurs formés et certifiés. Nous avons également mis en place un Mooc. Quelque 270 000 personnes suivent actuellement ce cours.

Plusieurs milliers de personnes ont également fait la demande de nos certifications. Ce genre de test et de certification, réalisés à distance, sont une première pour le marché. Il fallait généralement se rendre sur site, dans une salle, pour réaliser les tests. Cela ne permettait pas d’avoir suffisamment de flexibilité pour suivre le rythme d’adoption de Linux. C’est pour cela que nous avons créé ce programme et obtenu un très bon accueil chez les développeurs, capables de montrer leurs compétences, mais également chez les entreprises, à la recherche de personnes qualifiées.

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