Worawut - stock.adobe.com

Valkey, le poulain de la Linux Foundation face à Redis

Après OpenToFu, la Linux Foundation soutient Valkey, une alternative à Redis Core. Le projet est surtout un moyen pour AWS, Google Cloud et Oracle – tous trois officiellement supporters de Valkey – d’éviter une forme de dépendance à Redis Inc.

La décision de Redis Inc. (ou Redis Labs) le 20 mars dernier de changer de licence de Redis Core a provoqué – sans surprise – des remous dans la communauté open source. Vécu comme une forme de trahison par certains, non moins à cause du passage à une licence propriétaire permissive duale (SSPLv1 et RSALv2) que du non-respect de l’engagement pris par Redis de conserver Redis Core sous BSD-3, la décision avait immédiatement suscité la mise en avant de projets alternatifs. Une réaction désormais typique.

Le même phénomène s’était produit lors du changement de licence de Terraform par HashiCorp. Des éditeurs s’étaient rapidement réunis pour créer le projet OpenTF que la Linux Foundation a accueilli en septembre 2023 sous le nom d’OpenTofu. Cette fois-ci, la fondation a été bien plus rapide et s’est engagée en son nom dès le 28 mars à soutenir une alternative open source. La LF s’évite de manière anecdotique le sujet du nom polémique : les porteurs d’OpenTofu souhaitaient tourner en dérision la stratégie d’HashiCorp. « Nous l’appelons Valkey, car il s’agit d’une variante du magasin de données clé-valeur », lit-on dans la page du projet alternatif à Redis Core mis sur pied le 22 mars.

AWS, Oracle et Google Cloud à la manœuvre

Valkey s’appuie sur la version de Redis Core 7.2.4 et conserva la licence BSD-3 du projet originel. Valkey est porté par AWS, Google Cloud, Oracle, Ericsson et Snap Inc. En clair, une bonne partie des entreprises visées par la mesure prise par Redis Inc.

Considérant que la base de données in-memory est l’une des bases les plus utilisées par les développeurs selon le sondage 2023 de Stack Overflow et que le projet a bénéficié de plusieurs centaines de contributions depuis son lancement en 2009, la Linux Foundation adoube Valkey qui ne devrait pas perturber outre mesure la feuille de route alternative du SGBD.

« J’ai travaillé sur Redis open source pendant six ans, dont quatre ans en tant que membre de l’équipe centrale qui a conduit Redis open source jusqu’à la version 7.2. Je suis très attaché aux logiciels open source et je veux continuer à y contribuer. En créant Valkey, les contributeurs peuvent reprendre là où nous nous sommes arrêtés et continuer à contribuer à une communauté open source dynamique » avance Madelyn Olson, ancienne responsable de Redis, co-créatrice de Valkey et ingénieure principale chez AWS, dans un communiqué de la Linux Foundation.

Le fait qu’AWS soutienne l’initiative de son employée n’a rien de surprenant. Le géant du cloud avait pris une mesure similaire quand Elastic avait changé la licence d’Elasticsearch en créant le projet OpenSearch.

Des améliorations comme la simplification des migrations, l’évolution du système de clustering, l’optimisation des performances multithreads, la prise en charge de la recherche vectorielle demeurent au programme. Les contributeurs ne disent pas si le projet restera compatible avec les clients Redis qui demeurent sous licence open source.

Des effets minimes sur la feuille de route

Les contributeurs derrière Valkey sont principalement d’anciens contributeurs à Redis, note Jim Zemlin, directeur général de la Linux Foundation. Outre Madelyn Olson, Ping Xie, ingénieur logiciel chez Google Cloud, et Viktor Söderqvist, co-mainteneur de Valley et développeur open source sénior chez Ericsson ont déjà œuvré sur le projet Redis par le passé.

La Linux Foundation que Valkey suivra un modèle de gouvernance ouvert, similaire aux autres projets qu’elle héberge. Les anciens contributeurs à Redis ont déjà formé un comité technique, affirme la fondation. Pour l’heure, il n’y a pas de documents officiels pour attester de l’existence de ce comité. En revanche, quinze personnes ont publié au moins un commit au dépôt GitHub du projet. Madelyn Olson est la personne ayant le plus contribué au projet fraîchement lancé. Valkey a déjà été forké 273 fois à l’heure de publier cet article. Selon les contributeurs principaux, il s’agit de l’étape préalable avant de proposer un pull request. Ils s’attendent à un déluge de demandes de modification et de corrections de bugs ou de vulnérabilités.

« Il est agréable de voir une communauté forte se former si rapidement autour de Valkey. Nous pensons que le fait de continuer à avoir une option innovante et bien entretenue pour ceux qui préfèrent l’open source servira bien la communauté », écrit Andi Gutmans, GM et VP Engineering, Databases chez Google Cloud.

L’espoir des groupes et des individus ayant rejoint le projet est que Valkey devienne la référence en matière d’alternative à Redis. De fait, une myriade de solutions open source concurrentes ou dérivées de Redis étaient en lice pour reprendre le flambeau. De son côté, Microsoft Research a lancé le projet Garnet. Le choix de la Linux Foundation devrait faire jurisprudence. Et c’est bien parti pour que ce soit le cas. Outre l’appui des fournisseurs cloud, l’éditeur allemand SUSE a déjà intégré Valkey à sa galerie d’applications Rancher. Reste à voir l’effet de ce projet sur la distribution commerciale de Redis. Pour rappel, les modifications de licence actées par Elasticsearch et MongoDB ne les ont pas fait disparaître.

Pour approfondir sur Base de données

Close