Philippe Trautmann, HP : "Nous sommes redevenus leaders sur le HPC"

Dans un entretien avec LeMagIT, Philippe Trautmann, le responsable des ventes HPC et Pod d'HP en Europe revient sur le marché du HPC et sur ses évolutions.

LeMagIT a récemment pu s’entretenir avec Philippe Trautmann, le responsable des ventes HPC et Pod d’HP en Europe. Précédemment en charge du marché du calcul intensif chez Sun/Oracle, Philippe Trautmann, fait le point sur les évolutions du marché HPC, sur l’offre d’HP et sur les efforts menés dans le centre de compétence HPC du constructeur, basé à Grenoble.

Philippe Trautmann, directeur des ventes HPC et Pod d'HP EMEA

LeMagIT : HP est récemment devenu beaucoup plus actif sur le marché du calcul intensif. Qu’en est-il aujourd’hui de votre position sur ce marché ?

Philippe Trautmann : HP est redevenu leader devant IBM avec 198 systèmes dans le top 500. Notre force est de savoir délivrer de façon industrielle des clusters. Chaque année, en Europe, nous livrons à nos clients entre 300 et 400 clusters.

LeMagIT :Quel est le rôle joué par le centre de compétence de Grenoble en la matière ?

Philippe Trautmann : Cette structure regroupe toutes les ressources qui nous permettent de répondre aux questionnements de clients. Elle rassemble des gourous du HPC, des architectes, des équipes de benchmark ainsi que des équipes de support après vente. La structure est aujourd’hui capable d’intervenir sur toutes les phases d’un projet HPC, qu’il s’agisse du design, de l’installation, de l’optimisation, à la mise en place et à l’exploitation des clusters. Nous disposons aussi d’outils comme Insight CMU (Insight Cluster Management utility, N.D.L.R.), pour le provisioning et le mappage proactif des systèmes.  Notre focus se porte sur les projets où il y a de la valeur ajoutée plutôt que de travailler sur des grands projets symboliques sur lesquels la priorité est le dollar par flops.

LeMagIT : Cela veut-il dire que vous vous concentrez non pas sur les grands projets universitaires et gouvernementaux, mais plutôt sur des clusters de « taille moyenne » dans le monde industriel.

Philippe Trautmann : L’essentiel des opportunités pour nous sont des clusters de taille moyenne. On est pragmatique sur nos chances sur les très grands projets où d’autres facteurs rentrent en ligne de compte. Par exemple, nous venons de remporter pour la seconde fois consécutive le marché du calcul chez Airbus. C’est un projet intéressant d’un point de vue technologique et d’un point de vue service. HP opère en effet l’infrastructure de calcul d’Airbus en échange d’une facture mensuelle.

LeMagIT : vous voyez un intérêt pour des approches « as a service » ?

Philippe Trautmann : C’est une approche intelligente, qui permet à HP de se différencier. On voit une vague de demande dans le monde du manufacturing, dans celui de la sécurité et de la défense pour des approches de HPC as a service. Cela permet de masquer aux utilisateurs la complexité opération d’un système HPC.

LeMagIT : Cela veut-il dire qu’à terme HP pourrait opérer un service de calcul en mode cloud ?

Philippe Trautman : Je ne peux pour l’instant pas répondre à cette question, mais il y a une demande. Il faudra toutefois réconcilier la nature partagée des infrastructures cloud avec le besoin des clients de se voir garantir la sécurité de leurs données.

LeMagIT : On parle beaucoup de clusters hybrides avec des composantes GPU ou à base d’accélérateurs. Où en est-on sur le sujet ?

Philippe Trautman : Il est évident qu’il se passe des choses autour du GPU. Toutefois la partie GPU reste mineure dans les clusters. Une petite quantité de clients peuvent utiliser des grands clusters de GPU car leurs applications sont optimisées pour ces architectures. Mais la majorité des clients conservent une approche plus générique car leurs clusters doivent faire tourner de nombreuses applications. Le constat que l’on peut faire pour l’instant est qu’il n’y a pas de priorité absolue à l’efficacité. Certes, dans le monde académique, il y a des gens qui « jouent » avec des approches dédiées. Mais la majorité des clusters restent traditionnels car ils doivent faire tourner 20 à 30 applications différentes dont une majorité ne tire pas encore parti des accélérateurs.

LeMagIT : Sur ce marché, Intel tente de contrer l’avance prise par Nvidia avec ses cartes Knight Corner. Jusqu’à présent on n’a pas l’impression qu’Intel ait rencontré un grand succès.

Philippe Trautmann : Vous comprendrez qu’il est délicat pour moi de répondre à cette question. Ce que je peux dire est que nous avons eu des ventes knight corner. HP a des partenariats avec Intel et Nvidia autour du HPC. À Grenoble, nous disposons d’un centre d’excellence HP Intel sur le HPC. Il accueille des clients ou des ISV désireux de réaliser des « Proof of concept » sur une infrastructure qui est en permanence mise à jour. Cette infrastructure s’appuie sur les dernières offres Intel en matière d’interconnect et aussi sur l’implémentation Lustre d’Intel. C’est opéré par des professionnels d’HP et Intel et ça marche très bien, au moins autant que le Moonshot discovery lab. C’est un vrai outil de promotion et de vente. Dans le même temps, Grenoble héberge un « GPU technical computing center » avec Nvidia. Nous y proposons nos derniers serveurs y compris en avance de phase. Dans les deux cas, nous réalisons des benchmarks sur ces configurations. C’est une manière de montrer à nos clients qu’il est possible de faire plus en s’appuyant sur ces technologies.

LeMagIT : Vous avez évoqué MoonShot, quel usage à cette offre dans le cadre de clusters ?

Philippe Trautmann : Nous avons des clients qui testent Moonshot pour des utilisations spécifiques. Airbus les utilise, par exemple, pour les serveurs de login et de session sur son cluster. Pour l’instant, il est difficile d’utiliser MoonShot pour le calcul lui-même car les cartouches adaptées ne sont pas encore là. À Grenoble, nous avons déjà réalisé plus de 100 « proof of concept » avec MoonShot. L’architecture est par exemple prometteuse dans des secteurs comme « l’oil and gas » qui sont très sensibles à la performance énergétique.

LeMagIT : Une autre composante du HPC, dont on parle moins, est le stockage. Or les grands clusters génèrent de grandes quantités de données et ont de très grands besoins en matière d’IOPS.  Il semble qu’avec les serveurs SL de la série 4500 vous ayez une vraie carte à jouer sur le secteur, en « bricolant » des architectures de stockage sur mesure sur base de logiciel ouvert pour vos clients.

Philippe Trautmann : On ne peut pas vraiment parler de « bricolage ». Mais c’est vrai, le SL 4540 permet de créer des solutions de stockage spécifiques adaptées aux besoins des clients et s’appuyant sur des approches  « software defined ». Et on a même du mal à faire face à la demande sur ces machines.

LeMagIT : En janvier lors de sa conférence de rentrée, HP avait notamment évoqué de multiples déploiements avec Scality…

Philippe Trautmann : Scality répond à des besoins big data ou analytiques qui sont périphériques au HPC pur, que ce soit pour des projets Hadoop ou de stockage objet à grande échelle. Ce sont désormais des approches intégrées à notre mode de fonctionnement sur le HPC. Et les SL 4540 sont parfaitement adaptés à ce type de déploiement.

LeMagIT : Un autre sujet sur lequel HP est présent est celui des conteneurs (ou pods), comme l’illustre l’approche avec Airbus ?

Philippe Trautmann : Il n’y a pas qu’Airbus. La plus grosse installation de Pod est en Europe centrale pour un site de disaster recovery bancaire (8 pods avec 40 racks chacun). Il y a une très grosse activité autour des pods militarisés. Plus généralement, la demande des clients va vers des choses plus souples et pour lesquels le datacenter fait partie de l’investissement. Au lieu de construire un datacenter en dur ce qui demande 2 ou 3 ans et un amortissement sur une très longue durée, les pods permettent d’amortir un « datacenter » sur le temps d’exploitation du cluster. Et puis il y a l’avantage de la vitesse de déploiement : Un pod peut être mis en place en quelques semaines, notamment quand tous les services d’utilité (électricité, refroidissement) utilities sont en place. Le remplacement de l’infrastructure de calcul d’Airbus s’est ainsi fait en quelques jours par simple grutage des nouveaux pods en remplacement des pods précédents. On n’est pas les seuls à fournir ce type d’infrastructures, mais c’est une activité étonnamment vivante.

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