Big Data : des CDOs et des CDOs dans une entreprise française sur quatre d’ici un an

La révolution numérique (alias la « Révolution Digitale ») crée de nouvelles fonctions. Et par ricochet de nouveaux métiers. Selon le Baromètres BCD20, voici venu le temps du CDO et du CDO. Deux postes aux acronymes similaires mais aux contenus différents.

Après les Data Scientists - moutons à cinq pattes de la BI, des statistiques et des mathématiques - l’analytique Big Data et la « transformation digitale » passent aujourd’hui par des CDOs et des CDOs. Mais il ne faut pas confondre le Chief Digital Officer et le Chief Data Officer.

Chief Digital Officer vs Chief Data Officer

Le Chief Digital Officer chapeaute la transformation d’une entreprise dans son ensemble. Il est par définition une fonction transverse qui casse les silos. Et donc « qui ne peut être cantonnée à un département », pour Samuel Bonamigo, Directeur Général Adjoint de Salesforce France. L’inverse (un CDO également CMO ou CIO) peut limiter, voire annihiler, les bénéfices de la fonction.

Le Chief Data Officer, lui, est en charge de la gouvernance des données (qui possède quelle donnée dans l’entreprise), de leurs sécurités et des processus qui permettent de les utiliser concrètement (Data Lake, Qualité de la donnée, etc.). Le poste est par nature plus lié à la DSI. Et il est souvent sous l’égide du CDO (le Digital).

« Le Chief Data Officer est la garant du patrimoine informationnelle de l’entreprise », résume Christoffe Escoffier de Novametrie, co-auteur du « Baromètre BCD2O » avec Digital Jobs, Viseo et Novametrie. Sa mission est de « collecter, d’inventer, de créer » de nouveaux usages de la donnée pour imaginer de nouveaux services. Son profil est souvent IT mais avec une connaissance orientée métier et clients.

La première fonction (Chief Digital Officer) a émergé avec l’essor du Big Data il y a environ trois ans. La fonction en serait déjà – d’après le baromètre parrainé par Criteo et Salesforce – à sa deuxième vague.

« La première vague des CDOs, c’était l’évangélisation de la culture numérique. Il y a eu les Digital Factories (sic) puis les groupes de travail transverses et enfin une entité chargée de la transformation digitale », explique Christoffe Escoffier. « La première rôle a été de mettre l’entreprise dans le sens de la marche, le deuxième – plus complexe – c’est la numérisation des métiers (NDR : comme les RH) ». Il devient en quelque sorte un « coach des métiers ». Quant à son profil idéal, il est éminemment hybride IT et métier, mais pas nécessairement IT d’origine.

« Mon équipe est en contact avec la DSI. Elle est à la fois en support des métiers et le poil à gratter des opérationnels », confirme Valerie Mazzoni-Colin, Chief Digital Officer du transporteur et logisticien Heppner, lors de la présentation de l’étude.

Aujourd’hui, 27% des entreprises françaises auraient un CDO (le Digital) contre 22% il y a un an. Elles sont 18% à avoir un Chief Data Officer.

Quasiment inexistant il y a 18 mois, ce deuxième CDO (Chief Data Officer) est d’ores et déjà devenu une « fonction pérenne » pour Marie Canzano, du cabinet de chasseur de têtes IT Digital Jobs. « Elle est amenée à se développer avec la réglementation sur la protection des données privées, le silotage des données et le potentiel quotidien des datas ». Résultat, la chasseuse de talents prévoit que ce sont 23% des entreprises (+5%) qui auront ce profil dans leurs rangs en 2017.

Des missions concordantes aux ROI (très) variés

Les deux fonctions, bien que différentes, ont néanmoins un but commun : « ramener la data dans des processus métiers », dixit Samuel Bonamigo, et amener de l’agilité (nouveau nom universel de « flexibilité »).

Les objectifs des deux CDOs, fixés par les directions générales, sont donc concordants. Mais ils différent en fonction des typologies d’entreprises. Les frères CDO ont pour feuille de mission de « créer de la valeur » dans les grands groupes (avec une action omni-canale et une vision 360 effectives), « le ré-enchantement de l’expérience client » dans les ETI (c’est à dire un parcours client optimisé) et une meilleure efficience interne pour les PME (avec des processus rationnalisés et une collaboration entre business units).

Cette diversité de missions explique que les indicateurs qui évaluent l’action de ces nouveaux postes - à la frontière entre l’IT et les métiers - ne sont pas universels. Augmentation du chiffre d’affaires, taux de satisfaction, degré d’adoption d’un outil (interne) ou d’un service (externe), réduction des coûts ou diminution des délais sont autant de KPI possibles.

Ces KPI ne sont d’ailleurs pas statiques, prévient Geoffrey Zbinden, Data & Digital Leader d’Orange. Il y a donc intérêt à avoir une attitude « agile » - là aussi – dans l’évaluation et ne pas multiplier les indicateurs. « Suivre des KPIs demande de la ressource », explique-t-il (sous-entendu, pour pas grand-chose), « la valeur des KPIs évolue avec le temps. A partir d’un certain taux d’adoption par exemple, cela ne sert plus à rien de suivre ce critère ».

Des CDOs sans le savoir

Geoffrey Zbinden invite également à voir plus loin que le seul facteur financier, indicateur classique de ROI, même s’il ne le sous-estime pas. Pour lui, « mesurer de la satisfaction client a de la valeur [à long terme] même si on ne peut pas forcément mettre des euros en face [à court terme] ».

La présence du Data & Digital Leader à la présentation du Baromètre est d’autant plus intéressante qu’Orange n’a ni CDO ni CDO. Mais l’opérateur possède aujourd’hui des équipes intégrées qui suivent un projet BI de bout en bout – du Data Warehouse à l’opérationnel - « sans se refiler la patate chaude » étape après étape.

« Quand je demandais à un Data Miner si ce qu’il faisait était utilisé, on me répondait : je ne sais pas, c’est pas mon job. [Aujourd’hui], je sais qu’un projet fait augmenter le CA de 3% dans les pays où il est déployé ».

Autrement dit, si le Big Data crée des métiers, ces fonctions de décloisonnement et de démocratisation de l’analytique et du « Data Driven » peuvent parfaitement exister sans être nommées comme telles.

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