Jenkins : une communauté renforcée par l’adoption de DevOps par les entreprises

Le projet Open Source Jenkins s’installe au rang des socles de référence pour gérer les cycles d’intégration et de déploiements continus dans les entreprises, de plus en plus nombreuses à adopter la technologie. La communauté suit le mouvement et se structure. L’idée d’une fondation émerge.

DevOps se fraye de plus en plus un chemin dans les entreprises, et Jenkins en profite. C’est la première conclusion que l’on pourrait tirer lors de cette édition 2017 de Jenkins World qui se tient actuellement à San Francisco. Cet événement, qui réunit la communauté du projet Open Source d’intégration et de livraison continues des logiciels (CI/CD – Continuous Integration/Continuous Delivery) fait salle comble, porté par l’arrivée de nouveaux utilisateurs, d’entreprises, et par effet de levier, de nouveaux contributeurs à la communauté.

Chiffres à l’appui : la communauté de Jenkins compte à ce jour plus d’un million d’utilisateurs dans le monde, avec 150 000 installations actives en production, soit une progression de 50% par rapport à janvier 2016, révèle une étude interne menée auprès de la communauté (2016 State of Jenkins Survey). Dans leur grande majorité, 85%, la communauté affirme avoir fait évoluer les usages internes de Jenkins.

A 96%, ces usages concernent le Build, 89% le test, 65% l’analyse de la qualité du code, 62% les déploiements, 59% la gestion des releases, 41% des tâches en mode batch et 36% la gestion opérationnelle. Un point clé de cette étude est que 90% des 1 200 répondants considèrent Jenkins comme un élément critique de leur processus.

 « La progression des nouveaux utilisateurs montrent à quel point Jenkins est aujourd’hui devenu un élément critique pour l’automatisation de leur processus d’intégration et de déploiement », explique Kohsuke Kawagushi, créateur de Jenkins - et actuel CTO de Cloudbees -, cadre emblématique de la communauté, lors d’un entretien avec la rédaction. Selon lui, Jenkins a d’ailleurs débuté une nouvelle ère, entamée depuis 2016 avec l’arrivée des Pipelines (qui permettent de décrire les étapes des processus d’intégration et de déploiement et d’en automatiser l’exécution) et bien sûr de Blue Ocean.

Blue Ocean représente un projet pivot de la communauté qui tend à simplifier la manipulation de la solution et propose une nouvelle expérience d’utilisation. Elle dote certes Jenkins d’une interface utilisateur moderne et intuitive qui lui faisait jusqu’alors défaut, mais facilite également la création de Pipelines déclaratifs (qui tend à standardiser la création de Pipelines), et au final l’usage même de Jenkins. L’idée est d’en accroitre la portée et la prise auprès de population peu aguerrie à Jenkins – vous avez dit Ops ?

DevOps, tiré par des entreprises de plus en plus intéressées

Si cela correspond certes à donner une explication par l’évolution de la technologie, Rob Stroud, analyste chez Forrester Research, apporte un autre éclairage : la progression de DevOps dans les entreprises. Celles-ci sont alors sous pression, à la recherche d’automatisation pour accélérer leur processus et leurs cycles de déploiements.

Surtout, sur les 12 derniers mois, une mutation a commencé s’opérer : l’adoption de DevOps est certes motivé par les développeurs, mais commence, pour la 1ere fois, à être aussi tiré par les « Ops », note l'analyste. Une nouvelle population qui vient donc alimenter une communauté Jenkins.

Pour l’analyste, cette progression de DevOps tient aussi au fait que « les industries fortement réglementées commencent elles-aussi à se mettre à DevOps et à l'automatisation ». Jenkins World 2017 en est d’ailleurs l’illustration. Nous avons pu croiser des responsables de la banque néerlandaise ABN AMRO, ceux d’une banque du Costa Rica (à la recherche d’informations sur l’automatisation de processus) ou encore ceux de la compagnie d’assurance colombienne Suramericana.

« La plupart des entreprises adoptent l'automatisation, mais en silo ; ce qui a pour objectif de freiner la vélocité très recherchée. DevOps est une réponse à cette question », poursuit encore Rob Stroud.

Un impact sur la communauté ?

Croissance des usages, des membres et des entreprises aux profils de plus en plus variés… des questions se posent alors. Cela-a-t-il un impact sur la communauté Jenkins ? Les profils des contributeurs ont-ils évolué ? Le modèle de la communauté Jenkins n’est-il ou ne va-t-il pas devenir trop étriqué ?

« Les contributeurs n’ont pas vraiment changé. On retrouve ceux qui utilisent Jenkins dans leurs tâches au quotidien et ils contribuent ici et là, et d’autres qui le font parce qu’ils sont vraiment passionnés et ils hackent le code. En revanche, ce qui s’est peut-être passé : ce que nous sommes capables de faire est plus structurés et consolidés et cela a apporté plus de poids à notre façon de fonctionner, répond Kohsuke Kawagushi.

« Traditionnellement dans les petites communautés Open Source, les choses ont tendance à se faire de façon organique. » Mais Jenkins a atteint une certaine masse critique – la « bonne taille » selon lui -  qui lui a donné de la visibilité et favorisé l’intégration de nouveaux membres. « Un avantage en terme de dimensionnement pour un impact optimisé », ajoute-t-il encore.

Vers une fondation ?

Pour autant, la montée en puissance de plusieurs secteurs industriels au sein de la communauté ne pousse pas à la création de groupes thématiques, comme l’a déjà fait la fondation Eclipse par exemple.

En revanche, le projet d’encadrer Jenkins d’une fondation apparait dans la communauté, a confirmé Kohsuke Kawagushi et notamment auprès de contributeurs cadres. Aujourd’hui, le projet Jenkins est affilié à l’organisation SPI (Software in the Public Interest) qui lui fournit un cadre légal – cela lui fournit une entité juridique en somme. Mais sur la question de la fondation, la communauté est aujourd’hui partagée et « on ne sait pas pour l’heure si cela se fera », nuance-t-il.  

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