France Télécom : Michel Bon coupable, mais pas seul responsable

La Cour de Discipline Budgétaire et Financière de l'Etat a finalement rendu son avis sur la gestion de France Télécom par Michel Bon. Le patron qui a fait de l'opérateur historique un géant international des mobiles et de l'Internet, mais qui a aussi failli mener l'opérateur à sa perte, devra payer 10 000 € d'amende pour sa gestion "opaque". Reste que la cour pointe du doigt l'incurie de l'Etat actionnaire et de ses représentants qui, informés de la stratégie du groupe, n'ont jamais tenté de stopper la folle course en avant de l'opérateur en pleine bulle Internet...

michelbonMichel Bon, l'ancien patron de France Télécom, a finalement été jugé coupable d'infractions aux règles d'information du conseil d'administration et de l'Etat. Le patron de France Télécom, qui avait mené à la hussarde le développement de l'opérateur à l'international (notamment dans les mobiles avec le rachat d'Orange, celui de Mobilcom et celui de l'opérateur historique polonais TPSA), devra payer 10 000 euros d'amende au lieu des 180 000 euros requis par le procureur général de la Cour de Discipline Budgétaire et Financière (CDBF), la juridiction administrative spécialisée, chargée de réprimer les irrégularités en matière de finances publiques. 

Michel Bon a quitté France Télécom en septembre 2002 pour être remplacé par Thierry Breton. A l'époque, en pleine débâcle financière, France Télécom était menacé de dépôt de bilan, plombé par près de 70 Mds € de dettes et d'engagements hors bilan suite à son expansion internationale.

Reste que l'ancien patron paye en partie des fautes qui ne sont pas les siennes. Tout en soutenant sa stratégie d'expansion, le gouvernement de l'époque n'a pas accepté pour des raisons éminemment politiques de se laisser diluer sous la barre symbolique des 50% lors de la première grosse acquisition de l'opérateur français, celle de l'Anglais Orange, devenu ironiquement la marque phare du groupe. Cette acquisition à 60 milliards d'euros (50 Md€ + 10 Md€ de reprise de dettes) a contraint l'opérateur hexagonal à s'alourdir d'une dette de 30 Md€, dette qui s'est progressivement accrue avec les rachats de TPSA, d'Equant, l'achat de la licence 3 G allemande de MobilCom… 

Circonstances atténuantes

En reconnaissant des circonstances atténuantes à Michel Bon, la Cour note ainsi les défaillances de l'Etat actionnaires et de ses représentants au conseil d'administration. Car il est difficile de reprocher à Bon l'opacité de sa gestion : les comptes de France Télécom étaient publics à l'époque et l'accroissement de la dette s'est effectué au vu et au sus de tous. Le plus étonnant en fait est que personne n'ait tiré la sonnette d'alarme plus tôt. 

Comme à l'accoutumée, Michel Bon a fait figure de coupable et son successeur de sauveteur. Mais, quels que soient les mérites de l'un ou de l'autre, c'est finalement une promesse de 9 Md$ de prêt relais par le ministre des Finances de l'époque, Francis Mer, qui a achevé de débloquer la situation de l'opérateur. La promesse (jamais consommée) a en effet rassuré les marchés sur le soutien de l'Etat actionnaire et a permis à l'opérateur de lever les fonds nécessaires à sa relance. La suite est connue : entre 2002 et 2007, la dette du groupe a été ramenée de 68 Md€ à 37 Mds€ soit environ 2 fois la marge brute opérationnelle, contre 4,5 fois aux pires heures du groupe. Alors que France Télécom affichait 20,7 milliards de pertes en 2002, il a réalisé un bénéfice de 6,3 Mds € en 2007.

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