Filtrage internet : Albanel veut limiter les accès wifi ouverts à une liste de sites autorisés

La loi Hadopi est toujours en discussion. L’occasion de quelques précisions par la ministre de la culture ayant pour charge de défendre le texte. Sous couvert de protection des droits d'auteurs, elle propose une approche incroyablement restrictive et dépassée des accès Internet via les points d'accès Wi-Fi ouverts.

Christine Albanel, ministre de la Culture, a très sérieusement proposé, à l’occasion du débat sur la loi Hadopi, de restreindre la liste des sites accessibles au travers de point d'accès Wi-Fi ouverts par une liste blanche. Ramené à la littérature, c'est comme si en librairies l'Etat décidait des ouvrages qui ont droit de cité et que seuls ces ouvrages pouvaient être mis en circulation.
Une maladresse risible? En fait pas vraiment. La proposition de Christine Albanel est on ne peut plus sérieuse. Le gouvernement entend concevoir une liste des sites qui lui paraissent pertinents (sans que l'on sache vraiment quels seront les critères de sélection en matière de typologie de contenus, de morale, de langue ...) à laquelle devront se limiter les fournisseurs de points d'accès ouverts. On notera au passage que  les points d'accès des opérateurs sont exclus de la mesure car ils nécessitent une authentification préalable et permettent donc d'identifier les clients si une telle demande venait à être faite.
Le pire est que l'idée géniale de la liste blanche n'est semble-t-il pas dans l'esprit de la ministre, mais dans le cadre des travaux sur la loi Hadopi du Conseil Général des Technologies de l’Information (CGTI),  selon des informations obtenues par PC Inpact. Le CGTI  aurait ainsi proposé la constitution d'une liste blanche "où se retrouveraient les sites utiles à la vie économique, culturelle et sociale du pays" comme seul moyen fiable de limiter les dérives liés à l'usage des points d'accès ouverts. Ou comment sous couvert de protection des droits d'auteurs, on transforme l'internet public français en zone de contrôle digne du meilleur des états policiers. Comme quoi, on peut s'attendre à tout lorsque l'on laisse mouliner en cercle fermé des ingénieurs généraux des télécommunications désœuvrés (ah, la nostalgie du bon vieux kiosque minitel).

Le problème est qu'une telle approche est démocratiquement inacceptable. Le principe de la liste blanche consiste en effet à considérer comme coupable ou déviant tout site qui n'y figure pas. Cela veut dire priver d'accès à ces sites, les 16 millions de français susceptibles à un moment ou à un autre d'accéder à Internet au travers d'un point d'accès ouvert. Le principe semble contraire à l'un des fondamentaux de la république (Liberté) et il est sans doute en conflit, tout au moins dans sa définition actuelle avec les règles de l'Union. On voit en effet mal comment le principe d'utilité à la vie économique et culturelle du pays défini pour la liste blanche pourra être compatible avec la nécessaire égalité d'accès à assurer pour les sites anglais, allemands, polonais danois ou tchèques . Bref, difficile de déterminer si l'idée relève d'Ubu ou de Big Brother. En tout cas, si elle voit le jour dans la loi, elle devrait placer la France loin devant la Chine pour ce qui est du filtrage d'Internet. Que l'on se rassure, c'est sans doute la transcription moderne de l'exception culturelle française...

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