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Datacenters dans l’espace : où en est-on ?

Mettre des datacenters en orbite permettrait de réduire l’utilisation du sol terrestre et les coûts énergétiques, voire améliorerait beaucoup les vitesses de traitement des relevés satellites. Des tests sont menés par HPE et Axiom Space.

La demande croissante de stockage de données nécessite la construction de davantage de datacenters. Pour limiter la surface occupée par ces installations, il existe des environnements uniques, comme... l’espace !

Les centres de données dans l’espace peuvent sembler être une idée iconoclaste, futuriste, mais l’expérimentation en cours de technologies informatiques dans l’espace pourrait faire de cette idée une réalité en à peine quelques années. Les datacenters en orbite basse terrestre (LEO) pourraient permettre d’économiser les terrains sur Terre, de réduire les coûts de l’électricité grâce à la technologie de l’énergie solaire et même de réduire la latence des données.

Datacenters dans l’espace : des avantages

Les centres de données en orbite basse offriraient des coûts énergétiques inférieurs, ainsi que des avantages technologiques et environnementaux.

Sur Terre, l’électricité et le refroidissement comptent parmi les coûts les plus élevés associés aux opérations des centres de données. Dans l’espace, l’énergie solaire et les batteries fourniraient toute l’énergie, réduisant ainsi les coûts de fonctionnement.

Un vaisseau spatial – dans ce cas, un centre de données – en orbite basse faisant un tour complet de la Terre environ toutes les 90 minutes, il serait exposé au soleil 45 minutes par rotation. Le reste du temps, le data center fonctionnerait sur les batteries reliées à ses panneaux solaires.

La mise en orbite d’un centre de données améliorerait les performances des charges de travail liées aux satellites. On pense spontanément aux satellites utilisés pour les prévisions météorologiques qui communiqueraient plus rapidement avec un datacenter sur la même orbite qu’avec une station de réception au sol.

En orbite, les données brutes seraient traitées avant d’être envoyées sur Terre. Cela améliorerait les performances globales de la charge de travail, libérant de la bande passante au niveau de la station de réception.

C’est le but que poursuit le constructeur américain de stations spatiales Axiom Space, lequel a formé un partenariat avec la startup de télécommunications spatiales Skyloom dans le but de créer le premier centre de données orbital au monde. Axiom Space estime que les satellites pourraient communiquer avec un data center en orbite à la vitesse de 10 Gbit/s via les communications laser de Skyloom.

Concernant l’impact environnemental, un datacenter simple occupe environ 16 hectares sur Terre et peut grimper jusqu’à dix fois plus dans le cas des grands campus en colocation. C’est autant de terrain que feraient économiser les data centers en orbite. Et, encore une fois, dans l’espace, de tels centres de données utiliseraient des ressources énergétiques durables, typiquement l’énergie solaire.

Les problèmes à résoudre pour mettre des datacenters en orbite

Plusieurs facteurs différents peuvent avoir un effet négatif sur les ordinateurs dans l’espace, comme les températures extrêmes et l’environnement imprévisible.

Tout d’abord, il y a le lancement. Les fusées subissent des vibrations extrêmes et des G élevés à ce moment-là. Ces forces détruiraient les disques durs.

En orbite, les radiations peuvent corrompre la mémoire. Les particules hautement énergétiques peuvent détruire les transistors, ou raccourcir singulièrement leur durée de vie. L’électronique doit nécessairement embarquer des protections qui n’existent pas sur Terre contre tous ces dangers.

Se pose aussi la question du refroidissement. Dans l’espace, il peut y avoir plusieurs centaines de degrés de différence entre la lumière du soleil et l’ombre de la Terre. Les systèmes de refroidissement conventionnels ne sont pas aussi efficaces dans l’espace, car la convection ne fonctionne pas en microgravité. Les ordinateurs spatiaux, comme ceux de la Station spatiale internationale ISS, utilisent des radiateurs remplis d’ammoniac pour le refroidissement.

L’infrastructure d’un centre de données en orbite doit protéger le matériel interne des impacts de micrométéorites et des fluctuations de température. Les ingénieurs du centre de données fabriqueraient des composants structurels à haute contrainte principalement en acier inoxydable ou en titane, tandis que la majeure partie de la construction serait en alliage d’aluminium.

Un datacenter en orbite nécessiterait également une couche de feuille d’or ou d’argent pour le protéger contre certains types de rayonnement et aider au contrôle de la température. Une couche de Kevlar et de Nextel pourrait assurer une protection contre les impacts, tandis qu’une couverture thermique externe fournirait une isolation supplémentaire contre les températures extrêmes.

Faut-il réinventer la conception des serveurs ?

L’environnement spatial étant si hostile que l’on se demande même si les cartes mères des datacenters actuels fonctionneraient. Des expériences récentes menées par HPE ont cherché à le savoir.

En 2017, HPE a lancé un supercalculateur vers l’ISS pour déterminer si le matériel informatique standard pouvait fonctionner dans l’espace sans modifications. Les deux serveurs ont passé plus d’un an et demi en orbite. Bien que le système ait réussi à rester en ligne et n’ait subi aucune perte de données, neuf des 20 SSD sont tombés en panne pendant la mission.

En fin de compte, l’expérience a démontré que le matériel standard pouvait fonctionner de manière fiable dans l’espace. Cependant, HPE a utilisé un logiciel spécial dans son ordinateur spatial afin de détecter et corriger toutes les erreurs introduites par les radiations ou les rayons cosmiques. Déterminer si ce logiciel fait perdre beaucoup de puissance de calcul est l’objet des missions supplémentaires que HPE a lancées vers l’ISS en 2021 et 2024.

Déployer plus de moyens que nécessaires sur Terre était aussi l’approche de l’informatique embarquée dans les navettes spatiales Challenger, Discovery et Endeavour. Elles contenaient cinq ordinateurs à usage général (GPC) qui fonctionnaient en mode haute disponibilité, avec des basculements en cas d’erreur.

Pendant les opérations normales, quatre ordinateurs étaient en ligne en même temps. Chacun d’eux disposait d’un vote. Si l’un des ordinateurs faisait une erreur, les autres GPC la corrigeaient. Le cinquième GPC servait de système de vol de secours qui ne fonctionnait qu’en cas de panne de l’un des ordinateurs principaux.

À ce jour, la bonne pratique concernant le fonctionnement des serveurs dans l’espace reste à écrire. Pour autant, les spécialistes estiment qu’envoyer un datacenter en orbite n’est plus qu’une question de quelques années.

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