Sommet sur l’IA : les étoiles s’alignent pour Mistral AI
Bien conscient du souffle que représente le sommet international pour l’action sur l’IA, Mistral AI déploie la grand-voile et multiplie les annonces. La jeune pousse dirigée par Arthur Mensch bénéficie désormais du soutien gouvernemental et des grands comptes tout en rivalisant avec OpenAI aux yeux du grand public.
Il y a d’abord l’annonce plus visible. L’application « Le Chat » est disponible sur Android et iOS. Elle est déjà en deuxième position du classement de l’Android Store, derrière ChatGPT. Elle est première du classement des applications gratuites de l’App Store iOS… devant Google Chrome et ChatGPT d’OpenAI. En novembre, Mistral AI aiguisait les griffes de son application pour y parvenir.
Mais L’application s’est surtout fait remarquer par la rapidité de ses réponses : Le Chat peut « cracher » jusqu’à 1 000 mots par seconde. Cette fonctionnalité en préversion combine des modèles « à faible latence » et « les moteurs d’inférence les plus rapides sur Terre », dixit Mistral AI. En l’occurrence, cette rapidité s’explique par l’utilisation des puces de Cerebras, un concepteur américain d’origine suisse. Cerebras en a fait la démonstration avec DeepSeek-R1. Pour l’instant, ces puces sont déployées dans un centre de données aux États-Unis, selon les conditions d’utilisation de l’application Le Chat.
Le Chat n’a plus grand-chose à envier à ChatGPT
Plus tard, l’application aura le droit à une fonction nommée « Memories ». Celle-ci met en cache le contexte afin que les modèles sous-jacents puissent bénéficier des informations des discussions passées.
C’est la partie émergée de l’iceberg. La startup française promet déjà que Le Chat pourra être déployé sur des « infrastructures privées », dans le cloud ou sur site. Pour rappel, OpenAI vient seulement d’introduire un mode d’hébergement des données sur les serveurs des fournisseurs cloud américains installés en Europe.
Comme ChatGPT d’OpenAI, Le Chat a le droit à un abonnement Pro et Team. L’édition Enterprise est accessible en préversion privée.
La version Pro est accessible à partir de 14,99 euros HT par mois, mais est offerte aux abonnés mobiles Free pendant douze mois, puis à 17,99 euros TTC par mois, sans engagement au-delà de cette période. Le Chat Team (à partir de deux sièges) coûte 24,99 euros HT par mois par siège et à 19,99 euros HT par mois par siège avec un contrat annuel.
Tous les utilisateurs ont accès à l’ancrage des résultats par la navigation Web et au téléchargement de fichiers sources. L’application permet des extractions OCR, l’analyse de données, la génération d’images (via Black Forest Labs Flux Ultra) et l’exécution de code dans une sandbox (Code Interpreter). Les offres Pro et Team ajoutent des crédits à ces fonctionnalités. Le forfait Pro profite du partenariat avec l’AFP et les interactions des usagers ne sont pas utilisées par défaut pour entraîner les futurs grands modèles de langage de la startup. Outre le choix du déploiement, l’offre Enterprise ajoute des contrôles fins de sécurité et des rôles, ainsi que des rapports télémétriques « détaillés ».
Et à la startup d’assurer que ses LLM peuvent répondre à des questions dans tous les départements : des ventes, en passant par le marketing, la finance, les RG ou la DSI.
Les entreprises pourront intégrer Le Chat avec des outils dédiés et utiliser des « modèles personnalisés ». Plusieurs connecteurs sont prévus vers les systèmes de mails, de GED, de messagerie et de bases de données. Mistral AI développe, semble-t-il, des capacités de raisonnement, puisqu’elle promet la possibilité de créer des agents capables de gérer l’automatisation de tâches en plusieurs étapes. L’outil permettra de déployer des « micro-applications ».
France Travail, Stellantis, Cisco : Mistral AI s’installe chez les grandes organisations
La semaine dernière également, Mistral AI a annoncé un partenariat avec France Travail. Ses LLM propulsent deux applications : ChatFT et MatchFT.
ChatFT est un agent conversationnel utilisé par 23 000 employés de l’agence gouvernementale pour des tâches de rédaction, tandis que MatchFT permet de contacter les candidats par SMS afin de les interroger sur leurs intérêts et préférences par rapport à une offre d’emploi.
Stellantis a par ailleurs dévoilé le renforcement de son partenariat avec la startup française. Ensemble, les deux entités ont travaillé sur des projets autour de l’ingénierie (un chatbot consacré à l’analyse de BOM), l’analyse de données en provenance de flottes de véhicules, ainsi que l’analyse de données de ventes et de production (détection d’anomalies à l’aide de modèles déployés en Edge). Un assistant vocal sera intégré dans les véhicules du groupe, sans que Stellantis précise les marques concernées.
« Il existe de nombreux acteurs dans le domaine de l’IA, et nous sommes particulièrement heureux de nous associer à Mistral AI pour sa forte capacité à s’adapter rapidement et à obtenir des résultats significatifs dans le cadre d’une collaboration étroite », déclare Ned Curic, directeur de l’ingénierie et de la technologie de Stellantis, dans un communiqué de presse. « Ensemble, nous explorons le potentiel de l’IA dans plusieurs domaines afin d’améliorer le développement de nos produits et l’expérience de nos clients, et d’apporter des avantages réels ».
Enfin, Cisco a présenté un partenariat « stratégique » avec Mistral AI, afin de développer plusieurs agents AI. Le premier d’entre eux, Renewal Agent doit analyser une cinquantaine de sources de données en vue de proposer des offres de renouvellement personnalisées pour les clients de l’équipementier télécom. L’agent, déployé sur site, vise à réduire jusqu’à 20 % le temps consacré à la concoction de ses propositions commerciales.
Un data center dans l’Essonne pour entraîner des modèles
Si les offres SaaS (Free, Pro, Team) sont hébergées sur les serveurs de fournisseurs cloud américains (Google Cloud, Microsoft Azure principalement), Mistral AI entend déployer une puissance de calcul en propre.
Arthur Mensch, cofondateur et CEO de Mistral AI, a indiqué à TF1 que la startup fera construire un centre de données dédié à l’entraînement de ses LLM dans l’Essonne. Un investissement de « plusieurs milliards d’euros ». Mistral AI a précisé auprès de l’AFP que celui-ci occupera plusieurs milliers de mètres carrés. « Nous avons choisi la France pour son efficacité énergétique et la qualité de son mix [électrique] en matière d’émissions carbone », a-t-il déclaré sur le plateau de TF1, le 9 février au soir.
Si les dirigeants de la société ont leur idée du « patriotisme économique » vanté par le Président Macron, il faut préciser que la France entend favoriser l’installation sur son territoire des spécialistes de l’IA.
Le dossier de presse consacré au sommet pour l’action sur l’intelligence artificielle précise que 35 sites peuvent être potentiellement occupés par des data centers en France pour une surface totale de 1 200 hectares. Le gouvernement promet des facilités administratives, une réduction d’impôts aux mégawattheures si le constructeur d’un data center s’engage dans l’efficience énergétique et un prix du MWh remisé pour l’électricité fournie par EDF.