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Les Power d’IBM deux fois moins chers pour faire du Big Data standard

Ouvrir la plateforme propriétaire au travers du consortium OpenPOWER a porté ses fruits : désormais, IBM propose des serveurs Linux bien plus efficaces que ceux de la concurrence pour construire des clusters Big Data avec Spark.

Les machines Power d’IBM sont décidément indéboulonnables. En plus de continuer leur bonhomme de chemin dans le monde Unix, les Power Systems seraient désormais aussi, dixit IBM, « des serveurs comme les autres pour faire du Big Data ». Mais ils coûteraient deux fois moins cher que les classiques configurations x86 et, ce, tout en ayant les mêmes performances. « Nos nouveaux serveurs Power S812LC et S822LC sont des briques Linux qui exécutent les plateformes Big Data Hadoop ou Spark en cluster. Ils coûtent quasiment le même prix que le tout venant des briques x86 généralement utilisées dans ce cas, mais ils exécutent de 80 à 160 traitements en parallèle à 3GHz alors que les serveurs x86 n’en font que 48 à 72 simultanément en 2 ou 2,5 GHz », avance Laurent Vanel, spécialiste du Cloud et des infrastructures chez IBM

Deux fois meilleur sur Spark, mais juste concurrentiel sur Hadoop

Et, après vérification, en effet. Dans le cas d’un cluster Spark (l’évolution d’Hadoop vers le temps réel, qui travaille exclusivement en mémoire et non plus avec des données stockées sur disque), IBM propose le Power S822LC à 36 998 $. Ce serveur 2U contient deux processeurs Power8 de dix cœurs et 80 threads chacun, totalisant 160 threads à 2,92 GHz, 1 To de RAM, deux disques SATA de 1 To chacun, une carte Ethernet 10 Gbits/s et un HBA Fiber Channel.

En face, pour quasiment le même prix (36 979 $), avec la même carte réseau, la même carte FC et les mêmes deux disques, Dell ne dispose au mieux que d’un PowerEdge R730 2U avec deux Xeon E5v3 à 2,3 GHz, totalisant seulement 72 threads, et 768 Go de RAM grand maximum. « Ajoutons à cela que le débit du bus processeur est de 230 Go/s sur ce serveur Power, contre 100 Go/s sur le x86 », assène Laurent Vanel. En clair, un cluster Big Data Spark reposant sur des S822LC d’IBM aura donc deux fois moins de nœuds à alimenter ainsi qu’à refroidir et il coûtera deux fois moins cher à l’achat qu’un cluster basé sur de classiques serveurs x86. Et, ce, pour les mêmes performances, voire pour des performances un peu meilleures.

En revanche, dans le cadre d’un cluster Hadoop, où le stockage local est plus important que la capacité mémoire et que l’accès à une baie externe, on ne comprend pas bien pourquoi l’IBM Power S812LC, qui a deux fois moins de mémoire (512 Go) que le modèle précédent, un seul processeur Power8 (80 threads), pas de carte FC, mais dispose juste en plus de douze disques SATA de 6 To chacun et de deux SSD de 960 Go,  coûte encore 35 300 $. Là, la solution équivalente chez Dell  (72 threads à 2,3 GHz, 512 Go de RAM, juste 8 disques SATA de 8 To chacun, pas de SSD) est bien plus compétitive à 28 898 $.

Une architecture Linux standard, au même prix que les x86

Il n’empêche. Que les si particuliers serveurs Power rivalisent aujourd’hui avec les prix des architectures x86 banalisées a de quoi surprendre. « Nos machines étaient plus chères lorsqu’elles étaient propriétaires. Depuis que nous avons ouvert leurs technologies au travers du consortium OpenPOWER (lancé fin 2013), ce n’est plus forcément le cas. Sur le plan matériel, les S812LC et S822LC ont désormais une RAM standard, des cartes d’extension PCIe standard et même un BIOS standard à la place de notre contrôleur historique. Le système est un Linux Ubuntu classique et tous les logiciels sont exactement ceux que l’on trouve sur des serveurs x86 Linux », lance Laurent Vanel. Et de préciser que, si les binaires ne sont pas les mêmes, les utilisateurs n’ont pas à recompiler eux-mêmes les programmes pour qu’ils s’exécutent sur Power : il suffit juste de télécharger les applications depuis les repositories que les distributions Linux Ubuntu, Suse et Red Hat ont désormais  mis en place pour OpenPOWER.

Depuis 25 ans, les serveurs Power d’IBM, basés sur le processeur RISC éponyme, sont voués à exécuter les applications Unix et IBM i (ex-AS/400) que le fournisseur a vendues à quelques grands comptes trop frileux pour s’en séparer. On les trouve aussi dans quelques grands supercalculateurs. Mais malgré tous les efforts du constructeur, la technologie Power n’avait jamais détrôné le x86 d’Intel sur le tout venant des serveurs et AIX, son Unix, n’a jamais rattrapé son retard commercial sur Linux.

Si, jusqu’ici, les machines Power avaient bien du mal à sortir de leur niche, c’est pourtant bien sur elles et sur les mainframes Z qu’IBM a recentré toute son activité serveurs depuis janvier 2014, après avoir revendu son activité x86 à Lenovo. Et le 15 septembre dernier, à New York, Tom Rosamilia, le vice-président en charge des Systèmes chez IBM, déclarait à la surprise générale : « nous avons pour objectif de prendre 10 à 20% de parts de marché aux serveurs x86. »

A date, OpenPOWER compte environ 140 partenaires dans le monde, lesquels planchent sur des designs matériels (réseau, stockage, cartes accélératrices) qui tirent partie de la puissance des processeurs Power selon une norme propre, CAPI (Coherent Accelerator Processor Interface). Parmi les partenaires, citons Nvidia (GPU), Mellanox (réseau), Tyan (cartes mères) ou encore Google, bien qu’on ne sache pas encore comment ce dernier s’est impliqué dans la plateforme.

C’est surtout en Chine où la technologie décolle, en particulier avec les fabricants de serveurs Zoom Netcom, qui produit des serveurs RedPower sous Linux pour exécuter les applications de l’administration, et ChuangHE qui fait de même pour équiper les hébergeurs locaux d’offres Cloud. En France, l’hébergeur OVH a commencé à s’équiper de serveurs Power d’IBM, pour exécuter les applications Unix et IBM i de ses clients, pas encore pour faire du Big Data.

Une supériorité technique qui doit se populariser dans le Big Data

Le processeur Power8 en lui-même est gravé en 22 nm, comme les x86 d’Intel, grimpe à la fréquence record de 4,3 GHz (contre un maximum de 4 GHz chez Intel ; et encore, uniquement sur un Core i7v3 pour PC, tandis que le Xeon E5v3 pour serveurs culmine à 3,70 GHz), contient huit à dix cœurs (jusqu’à dix-huit sur Xeon E5v3) et chacun d’eux peut exécuter huit threads, contre uniquement deux chez Intel.  Une version Power9 devrait voir le jour l’année prochaine.

Selon Gartner, la quantité de serveurs Power vendus a décliné de 3,1% entre 2014 et 2015 et IBM ne fait plus partie du quintet de tête des plus gros vendeurs de serveurs. Parmi eux, HP (20% des ventes), Dell (19%), Lenovo (8,3%), Huawei (4%) et Inspur Electronics (3,4%) ne proposent que des machines x86. Cela dit, les serveurs Power concernés par cette étude publiée mi-2015 ne servaient encore qu’à exécuter des applications Unix.

« Nous n’avions pas de raison de décliner nos machines Power pour exécuter du SAP ou du CRM standards qui ne sont pas des applications multithreadées. La force de notre architecture est d’exécuter un maximum de threads en même temps pour un coût minimum. En revanche, les serveurs Power prennent tout leur intérêt dans le Big Data où il est question d’effectuer un maximum de traitements analytiques en parallèle », conclut Laurent Vanel.

 

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