Gemalto donne son feu vert à la contre-offre de Thales et éconduit Atos

Gemalto a trouvé ce dimanche son chevalier blanc en la personne de Thalès qui a présenté une offre alternative à celle d'Atos de 11% supérieur à celle l'ESN dirigée par Thierry Breton. Atos abandonne l'opération.

Le feuilleton Gemalto a rebondi de façon étonnante ce dimanche matin avec l’entrée dans la danse d'un chevalier blanc inattendu, le géant français de l’électronique militaire, de l’aérospatial et de la défense, Thales. Ce dernier a proposé de racheter Gemalto pour 51€ par action, un prix 11 % supérieur à l’offre lancée par Atos mercredi dernier.

La proposition a été effectuée avec l'aval des conseils d’administration de Thales et de Gemalto.

Dans un communiqué publié dimanche en fin de soirée, Atos a officiellement jeté l’éponge, invoquant « sa discipline financière ». Sauf très grosse surprise, Thales devrait donc mettre la main sur Gemalto au début du second semestre 2018.

L’entrée de Thales dans le jeu est surprenante car la firme est pour l’essentiel contrôlée par l’État qui possède 25,8 % du capital (et Dassault Aviation 24,8 %). Tous deux sont liés par un pacte d’actionnaires et détiennent une large majorité des droits de vote au sein de la société. Via BPIFrance (filiale de la Caisse des Dépôts), l'État avait pourtant semblé donner son aval à l’offre d’Atos.

BPIFrance avait en effet soutenu l’offre de l'ESN dirigée par Thierry Breton en décidant d’apporter les 9 % du capital qu’il détient dans Gemalto. Vraisemblablement, les équipes de Nicolas Dufourcq chez BPIFrance et celles de l’agence des participations de l’État (rattachée au ministère de l’Économie) n'étaient pas sur la même longueur d'onde. Il sera intéressant de voir, a posteriori, comment l’État justifiera ce mini-cafouillage.

Thales : un géant de l'aérospatial et de la défense...

Héritier de Thomson CSF, la branche électronique embarquée de Thomson, le groupe Thales s’est considérablement développé par acquisitions au cours des 15 dernières années. La firme a par exemple pris le contrôle de la participation d’Alcatel dans Alcatel Alenia Space et dans sa filiale de signalétique ferroviaire.

Thales contrôle également 35 % de Naval Group (l’ex-DCNS) et est donc à ce titre l’un des champions mondiaux de la construction de navires militaires complexes .

La firme a aussi développé ses activités dans la sécurité avec un fort accent dans la protection des infrastructures critiques et dans la sécurité régalienne (sécurité urbaine, surveillance vidéo, réseaux de communication sécurisés, chiffrement de données, etc.).

À l’heure actuelle, la firme est organisée en six grandes divisions, Aéronautique, Espace, Transport, solutions pour marchés spécifiques (contrôle aérien, cockpit, avionique, systèmes électriques et solutions de positionnement et de navigation), Défense et Sécurité.

... avec des ambitions dans le numérique et la sécurité

La division Défense et Sécurité inclut les activités de systèmes d’information et de communication sécurisés et de protection des infrastructures numériques critiques. Mais ces activités restent aujourd'hui marginales au sein du groupe. Elles ont même reculé entre 2015 et 2016. Thales ne cachait donc pas sa volonté de se développer dans le numérique et a récemment multiplié les rachats comme celui de Sysgo (hyperviseur embarqué), Vormetric (chiffrement de bases de données) ou Guavus (analytique Big Data en temps réel).

Avec le rachat de Gemalto, Thales va changer de dimension dans le numérique. La société va pouvoir accélérer très fortement son développement sur plusieurs marchés clés comme celui de la sécurité informatique, celui des titres sécurisés et des programmes régaliens — passeports biométriques, titres d’identité, systèmes de contrôles aux frontières, etc. –  sans oublier celui des communications embarquées et celui de l’IoT.

Thales va aussi pouvoir renforcer son implantation auprès de cibles clés comme les banques et les opérateurs télécoms - des clients historiques des cartes SIM et des cartes EMV de Gemalto auxquels il pourra proposer ses services avancés de sécurité.  

Le projet de Thales est d’apporter ses activités numériques à Gemalto et de laisser ce dernier les opérer comme une ligne de métier autonome. Gemalto deviendra ainsi l’activité mondiale du groupe dans la sécurité digitale et continuera à être dirigé par Philippe Vallée, l’actuel patron de Gemalto.

Rassurer les salariés de Gemalto

Thales emploie actuellement 64 000 personnes (dont 34 000 en France) et réalise un chiffre d’affaires légèrement inférieur à 15 Md€. Le rachat devrait lui permettre de doper son chiffre d’affaires de 20% et d’accélérer son internationalisation. Gemalto emploie en effet environ 15.000 salariés (dont 2700 en France).

Pour les salariés de Gemalto, l’acquisition ne signifie pas la fin du plan social en cours, mais Thales a affirmé que « les employés concernés par le plan social lancé récemment par Gemalto bénéficieront d’un accès aux bourses de l’emploi et au programme de mobilité interne de Thales, et ceci aux mêmes conditions que les employés de Thales ».

Le groupe français s’est aussi engagé « à préserver l’emploi dans les activités françaises de Gemalto au moins jusqu’à fin 2019 ». Cela ne veut pas dire qu’il n’y aura pas de casse à terme, mais elle sera sans doute moindre que si Atos avait mis la main sur Gemalto.

Thales indique miser sur des synergies annuelles comprises entre 100 et 150 millions d'euros à compter de 2021. 

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