Viviane Ribeiro, Lefebvre : "avoir un actionnaire sur du long terme, c'est irremplaçable"

La crise a freiné, sans réellement ébranler l'éditeur de solutions financières Lefebvre, qui a profité de 2009 pour digérer le spécialiste des consolidations financières ASGroupe. Et entend maintenant développer ses offres à la demande - en mode Saas - et se renforcer dans d'autres pays européens.

Editeur de taille moyenne spécialisé sur les applicatifs de finance et de RH pour les PME, Lefebvre Software termine 2009 sur un chiffre d'affaires de 31,2 M€, contre 23,4 M€ un an plus tôt. Mais ce bond est entièrement du à l'intégration d'ASGroupe, un spécialiste de la consolidation financière acquis fin 2008. A périmètre constant, le chiffre d'affaires est quasi-stable sur un an.

Dans cet ensemble, les ventes de licences (à 7,2 M€) ont progressé de 6,4 %, tandis que la maintenance gagnait 3 % (à 9,8 M€). En revanche, les services accusent le coup, abandonnant 7 % (à 13,1 M€). Le résultat net avoisine 100 000 euros, en nette chute (il atteignait 2,8 M€ en 2008).

A la tête de l'éditeur de progiciels depuis 2007 - en provenance de Geac -, Viviane Ribeiro dresse le bilan de cette année 2009. Et évoque la transition d'un éditeur de taille moyenne vers les paradigmes du Saas. Une mutation gourmande en investissements, Viviane Ribeiro se félicitant de faire partie d'un groupe familial capable de construire sur le long terme.

vribeiroLeMagIT : Quels enseignements tirez-vous de cet exercice 2009 ?

Viviane Ribeiro : Je retiens que, dans une année difficile, nos ventes de licences ont progressé de 6,4 %. Le rapprochement entre les équipes de Lefebvre et celles de ASGroupe sont un autre motif de satisfaction : le cross-selling (consistant à vendre des solutions complémentaires aux deux bases installées, NDLR) a très bien fonctionné. Le positionnement de Lefebvre a permis d'augmenter le prix des licences de consolidation-reporting (les offres d'ASGroupe donc, NDLR) et de nous positionner sur des besoins plus évolués.

Au dernier trimestre, nous avons aussi vu le réveil des nouvelles affaires. Et le phénomène se prolonge début 2010. Au total, nous avons signé avec 60 nouveaux clients en 2009. Ce qui signifie que nous gagnons des parts de marché.

LeMagIT : Comment expliquez-vous la contraction de votre bénéfice ?

V.R. : Cet exercice a été impacté par de nombreux coûts exceptionnels comme des frais de locaux, ceux de l'acquisition d'ASGroupe ou encore ceux nés de la présence des anciens dirigeants de cette société dans le groupe pendant quelques mois. La société est désormais repartie sur une base de coûts plus normale : au premier trimestre 2010, nous avons ainsi économisé 800 000 euros par rapport à l'année dernière.

LeMagIT : Pourquoi les services ont-ils marqué le pas en 2009 ?

V.R. : Du fait de la crise, les entreprises ont porté une grande attention à toutes les petites prestations qu'elles nous commandent habituellement. Notre vocation n'est de toute façon pas de vendre des prestations à l'année autour de nos solutions. A l'intérieur de cette ligne services, je note tout de même que nos services récurrents, où sont logées les solutions en mode hébergé ou en Saas, progressent, eux, de 5 %. Ils pèsent 2 M€.

LeMagIT : Comment un acteur de la taille de Lefebvre peut-il lutter dans cette course à la puissance qu'est la migration de l'applicatif vers le Saas ?

V.R. : D'abord, nous offrons de la souplesse aux clients, avec une grille tarifaire qui permet au donneur d'ordre de choisir précisément le niveau d'externalisation qu'il souhaite. Aujourd'hui, nous proposons des offres en Saas pour la paie et la RH. Nous sommes également en train de préparer des offres pour des utilisations ponctuelles, payées à l'usage réel. Début 2011, ce sera le cas pour nos produits de consolidation financière et de gestion des immobilisations, qui seront tous deux exploités en architecture multitenancy.

Cette mutation des architectures constitue un gros effort pour un éditeur de la taille de Lefebvre. Heureusement, une bonne partie des contraintes sont aujourd'hui levées, car OpenIris (produit spécialisé sur la gestion des immobilisations, ndlr) a été redéveloppé en mode Web et en Java, grâce à des travaux entamés il y a quatre ou cinq ans. Idem pour les produits de ASGroupe. Aujourd'hui, nous avons parcouru 80 % du chemin en termes d'architecture produit. Nous avons la chance de nous appuyer sur un actionnaire (l'éditeur est une filiale du groupe des Editions Lefebvre Sarrut, ndlr) qui construit sur le long terme. C'est irremplaçable. Tant en interne, que pour les clients.

LeMagIT : Dans ce qui reste le cœur de votre activité - la finance -, les clients ont-ils entamé leur migration vers le monde du Saas ?

V.R. : Non, ce marché n'a pas encore basculé vers le mode Saas. Cette question du rythme de la transition est cruciale, car une bonne partie de l'avenir des éditeurs dépend du pourcentage du chiffre d'affaires qui va être transféré chaque année vers ce mode de consommation du logiciel (où le client règle un abonnement et non plus des licences au moment du projet, NDLR). Les conséquences sont lourdes pour le modèle économique des éditeurs, pour lesquels ce modèle n'est rentable qu'après 4 ou 5 ans. Personnellement, je ne voudrais pas que ce transfert dépasse 10 ou 15 %. Aujourd'hui, la demande est inférieure à ces niveaux.

LeMagIT : Vous évoquez de nouvelles acquisitions. Quelles sont vos priorités ?

V.R. : Je souhaiterais d'abord passer la barre des 40 M€ de chiffre d'affaires en France, ce qui passe par une acquisition. L'objectif est de disposer d'une structure de support solide capable de supporter, dans un second temps, des acquisitions dans d'autres pays, en 2011. Nous ciblons dans un premier temps l'Espagne, l'Italie, les pays nordiques et des spécialistes de nos secteurs d'activité - la finance, la paie, les RH.

En complément :

- Viviane Ribeiro, Lefebvre Software : "les ventes de licences ont été redynamisées" (mars 2009)

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