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Open Source : en 2017, le modèle trouve sa place, les communautés s’ajustent

Rares sont les technologies émergentes apparues ou arrivées à maturité en 2017 qui n’ont été Open Source. Cette année, le logiciel à code ouvert a concrétisé son statut dans l’innovation, trouvant sa place dans les entreprises. Cette montée en puissance met la pression sur les communautés et les fondations.

Il aura presque fallu attendre 20 ans. 20 ans, ce sera l’âge de l’Open Source Initiative (OSI), organisme emblématique de la communauté Open Source mondiale en charge de valider le caractère Open Source des licences, en février 2018. Mais, 20 ans, c’est aussi l’âge d’un jeune adulte qui débute. Pourtant en 2017, l’Open Source aura plutôt concrétisé son statut de modèle à suivre tant le code ouvert a trusté les technologies émergentes où réside aujourd’hui l’innovation.

Si l’on savait que le monde de l’infrastructure Cloud usait abondamment des logiciels Open Source, le modèle s’est porté aujourd’hui à des couches plus élevées. En matière de gestion des données, par exemple, la majorité des bases de données NoSQL demeure encadrée par une licence Open Source, Hadoop (arrivé dans sa version 3.0) et son écosystème ne peuvent exister sans leurs communautés respectives, les technologies algorithmiques qui motorisent l’Intelligence artificielle (Machine Learning ou Deep Learning) sont toutes bercées par l’Open Source. Que dire du secteur de l’Internet des objets et des objets connectés, des applications natives pour le Cloud, etc…

Il existe plusieurs explications à cela. 2017 recueille d’abord les fruits des travaux menés plus tôt, tantôt par les Gafa (Google, Facebook et consorts), tantôt par les entreprises dites technologiques (comme Netflix ou Uber) qui, certes, ont recours à l’Open Source dans leurs développements, mais n’hésitent pas à reverser leurs outils auprès de communautés. C’est ainsi devenu un exemple de développement et d’innovation. Des méthodes et des processus repris aujourd’hui par l’industrie.

Une autre explication consiste à dire que la répartition des coûts de l’Open Source et son modèle de développement collaboratif bâti sur des communautés en font un pilier des stratégies dites de transformation numérique. Et il faut dire qu’en 2017, cette transition vers le numérique était bien sur toutes les lèvres des grands comptes en France. Banques et services financiers, assureurs, transports et grande distribution ont tous accroché le numérique à leur feuille de route - et indirectement l’Open Source, perçue dès lors comme un accélérateur pour le déploiement du numérique.

Toutefois, si cela n’est pas une nouveauté – Linux habite depuis longtemps les SI des entreprises - , les entreprises commencent pourtant à absorber la culture de l’Open Source dans leur modèle organisationnel. Utilisatrices de logiciels ouverts, elles deviennent actrices en contribuant, en mutualisant leurs ressources (financière et humaine) autour d’une souche logicielle. En 2017, et en France, le groupe de travail inter-entreprises de la communauté PostgreSQL a par exemple livré les premiers fruits de ses travaux auxquels ont participé la SNCF, Société Générale, Météo France, Carrefour ou encore Air France et la Maif. Une prise de position affirmée de ces grands comptes envers l’Open Source qui y voient aussi une façon d’attirer les jeunes talents pour qui le code ouvert a de quoi séduire – un effet Facebook ?

Dans ce contexte, difficile de faire l’impasse sur l’Open Source si l’on est un éditeur de logiciels, y compris les plus récalcitrants – du moins historiquement. Microsoft par exemple supporte ces technologies sur son Cloud Azure, contribue dans les communautés et s’allie avec des acteurs spécifiques. Red Hat évidemment, mais aussi Databricks pour une offre de Spark-as-a-Service. Sans parler de la mise à disposition sur Linux de SQL Server, la base de données de Redmond.

Les communautés adaptent leur stratégie

Cependant,  cette montée en puissance de l’Open Source a un effet sur la base : les communautés. Et à commencer par les fondations, gardes des précieux modèles de gouvernance qui cimentent les très nombreux projets. Originalement conçues pour encadrer des projets spécifiques, ces institutions sont aujourd’hui confrontées à deux enjeux : des projets de plus en plus nombreux, associé à une montée de l’Open Source et du modèle de développement communautaire ; et la nécessité de collaborer entre elles pour éviter que les projets n’évoluent en silo.

Ainsi, en 2017, poussé par une mécanique grippée, Oracle a vu dans la Fondation Eclipse un moyen d’encadrer Java par des processus plus ouverts et plus collaboratifs. Il lui a donc confié la garde de Java Enterprise Edition (J2EE), rebaptisé pour le coup EE4J (Eclipse Enterprise for Java). Le processus d’intégration sera certes finalisé courant 2018, mais la fondation envisage de modifier son modèle pour mieux supporter l’écosystème de J2EE.

En 2017, nous avons aussi rencontré la cross-fertilisation des communautés. D’ abord au sein de la Cloud Foundry Foundation dont les travaux autour de Kubernetes l’ont rapprochée de la Cloud Native Computing Foundation – hébergée par la Linux Foundation. Puis à l’OpenStack Foundation dont le socle (OpenStack donc) a une empreinte telle dans l’IT qu’il convient aujourd’hui d’en faciliter l’intégration aux autres projets communautaires et ainsi la collaboration inter-communautaire. Premier exemple : le projet Kata Container.

Il s’agit là de coller au plus près des desideratas de la communauté, des entreprises et aussi d’en faciliter l’accès et l’adoption.

Restera donc à aborder 2018. Si les prévisions du cabinet Pierre Audoin Consultants (PAC) se confirment, la France devrait conserver sa place de n°1 de l’Open Source en Europe, avec un taux de pénétration de l’Open Source dans le marché des services IT bien plus élevé que chez nos voisins européens. Il est de 9,9% dans l’Hexagone, mais 6,4% en Allemagne et 6,5% au Royaume-Uni.

En 2017, en France, l’Open Source représente 4,46 milliards d’euros pour une croissance de 8%. Cette croissance devrait passer à 8,3% entre 2017 et 2018 pour atteindre 4,83 milliards d’euros. En moyenne, il devrait atteindre 8,1% jusqu’en 2021.

 

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