La sauvegarde hybride : entretien avec Forrester sur le backup disque à disque à nuage

SearchStorage s'est entretenu avec Rachel Dines, une analyste de Forrester Research, pour discuter de l'état du marché de la sauvegarde de disque à disque à nuage. Dans cette interview, Rachel Dines fait le point sur l'adoption de ce modèle, en explique les avantages et les inconvénients et fait le tour des principaux acteurs du marché.

Rachel A.Dines,
Analyste stockage,
Forrester Research

Les mécanismes de sauvegarde de type Disk-to-disk-to-cloud  (backup sur disque puis vers le nuage) gagnent en popularité dans les entreprises et ce, quelle que soit leur taille. Le concept est une évolution de l’actuel Disk-to-disk-to-tape (sauvegarde sur disque puis externalisation sur bande) qui permet aux entreprises de sauvegarder leurs données sur une baie de disques, puis de les transférer vers un espace de stockage en nuage.

Pour faire le point sur cette technologie, Searchstorage s’est entretenu avec Rachel Dines, analyste chez Forrester Research. Voici son avis sur  la sauvegarde disque-à-disque-à-nuage et sur les systèmes de sauvegarde hybride en nuage.

SearchStorage.com : pouvez-vous expliquer ce qu'est un scénario typique de sauvegarde de type disque-à-disque-à-nuage ?

Rachel Dines : il y a à mon avis deux façons de déployer des mécanismes de sauvegarde de type disque à disque à cloud. La première consiste à déployer sur site une solution de sauvegarde traditionnelle telle que celle proposée par CA, CommVault, IBM Tivoli ou Symantec Corp,  puis de sauvegarder vos données localement. Vous prenez ensuite cette sauvegarde et la répliquez dans le nuage, comme vous le feriez avec un second niveau de sauvegarde tel que la bande. L’avantage d’une telle approche est qu’elle s’intègre bien avec les processus de sauvegarde en place aujourd’hui. Il n’y a pas de rupture radicale par rapport aux scénarios actuels de type disk-to-disk-to-tape, qui sont très courants.

Une autre façon de mettre en place un modèle de type disque à disque à nuage est d’installer localement une appliance fournie par le fournisseur de cloud. L’appliance sert de cible locale pour le backup mais aussi de passerelle vers le stockage en cloud et prend en charge automatiquement les opérations de réplication. La grande différence est que vous n’avez rien à administrer. La gestion de l’appliance est réalisée par le fournisseur.

SearchStorage.com : Ce modèle disk-to-disk-to-cloud est-il largement adopté  ?

Rachel Dines : on voit une vraie adoption. Les clients sont beaucoup plus à l'aise avec une approche de ce type qu’avec une approche consistant à sauvegarder directement les données vers le cloud. Nos données les plus récentes, compilées à l’été 2010, montrent que 23% des entreprises déclarent utiliser une forme de sauvegarde de type disque à disque à nuage. Et c'est effectivement pas mal. Nombre de personnes interrogées explique être intéressées par la technologie et l’étudie de près. Le niveau d’adoption est donc bien plus avancé que celui de la sauvegarde sur le cloud ou de la sauvegarde « as a service ».

Le type de solution de sauvegarde de disque à disque à nuage déployée par les entreprises dépend de leur taille. Les grandes entreprises semblent favoriser le premier modèle que j'ai décrit. Les petites entreprises ont tendance à utiliser les appliances fournies par un fournisseur de cloud.

SearchStorage.com : beaucoup de gens sont familiers avec le modèle disque à disque à bande. Pourquoi rompre avec ce modèle éprouvé pour une approche hybride ? Quels sont les bénéfices ?

Rachel Dines : Il y a plusieurs raisons de privilégier le cloud à la bande. Le principal avantage est que l’usage du nuage assure une externalisation automatique de vos données. C'est très intéressant en matière de résilience et de reprise après sinistre de disposer immédiatement d’une copie de ses données hors site. Par comparaison, dans une approche disque à disque à bande, il faudrait idéalement chiffrer les bandes, puis les externaliser avec tous les aspects logistiques que cela implique.

Une des raisons principales qui fait que les gens adhèrent à la sauvegarde de type disque à disque à nuage est l’externalisation simple et rapide des données numériques. Il y a aussi le fait que cela élimine la gestion physique des cartouches. Externaliser des cartouches depuis une librairie de bandes prend du temps et nécessite des interventions humaines. C'est l’une des raisons qui rend séduisante le modèle cloud.

Une appliance IDSBox du
Français Disques et Silice

SearchStorage.com : quels sont les inconvénients de l’approche disque à disque à nuages?

Rachel Dines : Le premier inconvénient est le prix. Il est vraiment difficile de battre les prix de la bande. Il n'y a pas moyen de stockage moins cher que la bande. On voit baisser les prix du stockage en cloud, mais la bande est toujours moins coûteuse.

Il y a aussi tous les risques que vous avez à traiter avec un fournisseur de service tiers. Cela ne veut pas dire que le modèle est extrêmement risqué, mais je constate que beaucoup de gens deviennent nerveux lorsqu’il s’agit de mettre des données dans le nuage, et il y a de justes raisons à cela. Il y a l’aspect mutualisé (« multitenant ») et le fait qu’il faut gérer un contrat avec une tierce partie, ce qui implique d’effectuer les travaux de due diligence adapté. Il faut poser de nouvelles questions telles que : quelle est le modèle de sécurité [du fournisseur] ? Comment assure-t-il la protection de vos données ? Comment stocke-t-il vos données ? Et surtout, a-t-il la possibilité d’utiliser vos données pour quelque chose qu'ils ne devraient pas ? Donc il y a certainement un  risque nouveau à adopter un modèle en nuage. Mais d’un autre côté, on peut également dire qu'il est possible de perdre des cartouches, qu’il est complexe de gérer le chiffrement des bandes. Je pense qu'il y a une différence entre le risque perçu du nuage et le risque réel.

Une appliance de sauvegarde eVault
plug-n-protect d'i365

SearchStorage.com : quels sont les fournisseurs qui offrent actuellement des solutions de type disque à disque à nuage ?

Rachel Dines : Dans l'univers des fournisseurs traditionnels, CommVault, EMC NetWorker, IBM Tivoli TSM et Symantec NetBackup savent gérer ce genre de processus. Ce sont vraiment les principaux fournisseurs, et beaucoup d'entre eux supportent un fournisseur en nuage comme cible éventuelle pour les données sauvegardées. Dans le monde des PME, des acteurs tels qu’Acronis, Asigra, BakBone Software (récemment acquis par Quest Software), i365 (filiale de Seagate), et Backup Exec (Symantec) peuvent également sauvegarder vers le nuage. En fait, la possibilité d’utiliser un fournisseur de cloud comme cible pour le backup est une caractéristique de plus en plus commune des logiciels de sauvegarde. Dans bien des cas, il ne s’agit pas de sauvegarder vers tous les clouds. Les éditeurs nouent en général des partenariats ciblés avec quelques fournisseurs en nuage ou parfois ne permettent de sauvegarder que vers leur propre cloud [on pense ainsi à la solution evault de i365, NDLR].

Il existe aussi des centaines de sociétés qui proposent des appliances de sauvegarde intégrant un étage de sauvegarde vers le nuage, mais les acteurs principaux que je vois dans ce domaine sont i365 et Barracuda Networks (ils ont acquis cette technologie grâce au rachat de BitLeap il y a quelques années). Iron Mountain, enfin, peut faire du backup de type disk-to-disk-to-cloud, même si traditionnellement, ils oeuvrent plutôt dans la sauvegarde « as a service ». Ce sont à mon sens les principaux acteurs, mais il y en a des centaines, et nombre de revendeurs et d’intégrateurs ont aussi des offres en la matière.

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