L'entreprise 2.0 : les éditeurs acquiescent, les entreprises font la moue

Si les éditeurs concentrent une partie de leur offre collaborative sur les technologies du Web 2.0, peu de sociétés ont encore répondu à l'appel. Freinées, en France, par une culture d'entreprise toujours trop conservatrice.

Transformer son entreprise et réinventer la façon de travailler. Un slogan accrocheur qui habille la deuxième conférence Enterprise 2.0 (http://www.enterprise2conf.com/), qui s'est déroulée à Boston du 9 au 12 juin. Outre l'aspect marketing, il s'agissait de crier haut et fort que le Web 2.0 et les technologies qui y sont associées peuvent être utilisés dans un environnement professionnel. Wiki, blog, réseaux sociaux, mais surtout mashup, attirail très orienté utilisateur à la base, qui doit trouver sa place dans les SI, environnements particulièrement critiques. Une problématique qui donne des sueurs froides aux administrateurs, mais qui doit se frayer progressivement un chemin.

C'est du moins ce que prétend le cabinet d'analystes Forrester Research qui prédit un avenir radieux aux éditeurs d'outils Web 2.0. De 764 millions en 2008, les dépenses devraient atteindre 4,6 milliards de dollars en 2013. Autant dire un marché qui fait saliver... mais qui doit encore murir.

Si pour l'heure, le Web 2.0 reste l'apanage de start-up spécialisées, il commence à attirer les grands ténors de l'IT professionnel, dont l'objectif est de surfer sur la tendance et - bien sûr - sur les fonctionnalités collaboratives. Forrester ne laisse aucun doute : en 2013, les gros éditeurs se partageront le marché.

Ils ont d'ailleurs déjà posé leurs jalons. En témoigne, lors d' Entreprise 2.0 , la mise à jour de Mashup Composer par Serena, spécialiste de la SOA, qui donne la possibilité aux employés, du moins les plus expérimentés, de créer eux-mêmes des applications composites, pour coller au plus près des besoins métiers. On parle notamment de Rich Internet Mashup. L'idée est de piocher dans un répertoire de services reposant sur des API reliées aux données du SI, et de les aggréger sous forme de Mashup. A l'image de ce que peut fournir iGoogle par exemple, mais à l'intérieur du pare-feu de l'entreprise.

IBM, de son côté, propose de tester Mashup Center gratuitement à partir de son incubateur Web, IBM Lotus Greenhouse.

Enfin, Microsoft a profité de la conférence pour entourer Sharepoint, son outil de travail collaboratif, de briques Web 2.0, soit développées en interne, soit par des partenaires. C'est le cas de WorkLight, qui développe un outil permettant aux utilisateurs de Sharepoint de visualiser et de mettre à jour de façon sécurisée leurs informations depuis des applications Facebook ou des widgets Vista.

L'éditeur de Redmond a dans la foulée présenté TownSquare son outil de réseau social pour entreprise, expérimenté en interne depuis plusieurs mois.

Des entreprises encore boudeuses

N'empêche, claironne AIIM, un autre cabinet d'étude, les indicateurs en termes d'adoption du Web 2.0 en entreprise sont loin d'être au vert. Quasiment trois entreprises américaines interrogées sur quatre avouent ne pas y comprendre grand chose et ,détenir seulement quelques notions. Pire, 42% ne voient aucun intérêt particulier à l'utiliser en milieu professionnel.

Un point de vue que partage Fred Cavazza, consultant indépendant, qui explique notamment que les entreprises françaises, comme les américaines sondées par AIIM, sont frileuses aux avantages du Web 2.0, car elles sont fortement engluées dans une culture d'entreprise qui commence à dater. « En France, il existe encore de nombreuses baronnies dans les entreprises par lesquelles sont retenues l'information, et qui n'ont pas d'intérêt à pousser vers le collaboratif », explique t-t-il. Ajoutant que l' « on ne se pose pas de questions sur la créativité collective ». Un tableau plutôt sombre, qui tient notamment à une population vieillissante.

Outre cette approche sociale, Fred Cavazza constate qu'on connait encore les contre-coups de l'ère du « tout ERP », une époque de lourds investissements pour les entreprises. « Pourquoi alors casser un SI, s'il marche et que les ressources financières des entreprises se tarissent ?»

Une tradition de systèmes qui a la peau dure, mais qui devrait être bouleversée avec l'arrivée sur le marché du travail de la Génération Y (née entre 1976 et 1994 et dont les nouvelles technologies Web font partie du quotidien – 20 % de la population en France, ndlr). Une population qu'il faudra que les entreprises apprennent à séduire par des technologies innovantes et surtout en favorisant la créativité colaborative.

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