
Informatique quantique : déception à court terme, espoirs à long terme
Les investissements restent importants dans le quantique, mais les espoirs d’applications à court terme s’éloignent. Dans une étude, le BCG prédit néanmoins des bénéfices importants d’ici 2040. À condition de prendre en compte certains facteurs dès aujourd’hui.
Alors que la start-up française Alice & Bob a levé 100 millions d’euros pour développer un ordinateur quantique qui résiste aux erreurs, le secteur continue de susciter des avis contrastés. Dernier exemple en date, une étude du Boston Consulting Group apporte un éclairage plutôt nuancé sur l’avenir de cette technologie, présentée par beaucoup comme étant « révolutionnaire ». Elle le sera peut-être, mais pas tout de suite, prévient le BCG.
Un secteur quantique résilient
Selon son rapport – intitulé « The Long-Term Forecast for Quantum Computing Still Looks Bright » – le marché du quantique serait résilient.
En 2023, malgré un contexte global marqué par une chute de 50 % des investissements (capital-risque) dans les technologies IT, le secteur du quantique aurait tout de même attiré 1,2 milliard de dollars.
Toujours selon l’étude, les perspectives resteraient prometteuses : d’ici 2040, l’informatique quantique pourrait générer entre 450 et 850 milliards de dollars de valeur économique.
Des espérances trop élevées à court terme
Cependant, les analystes du BCG ont revu à la baisse leurs prévisions à court terme.
Deux obstacles majeurs – qui freinent actuellement le développement du secteur – expliquent cette révision. Le premier est que des défis techniques persistent. Le second est que la concurrence de l’informatique classique s’est remusclée avec les progrès de l’intelligence artificielle.
Le coût reste également prohibitif : selon les chiffres du BCG, une heure de calcul quantique serait 100 000 fois plus onéreuse qu’une heure de calcul classique.
Optimisme sur le long terme
Cette réalité fait écho aux propos du PDG de Nvidia, Jensen Huang, qui a estimé qu’il faudrait attendre encore une vingtaine d’années avant que les ordinateurs quantiques ne deviennent utilisables. Cette « annonce », qui ne fait que reprendre ce que disent les experts depuis plusieurs mois – avait fait chuter le cours des actions des acteurs du secteur.
Le BCG tempère ce retour de bâton. Ses experts restent en effet optimistes sur le long terme. Ils estiment par exemple que la puissance de calcul quantique, qui double tous les un à deux ans depuis 2018, devrait maintenir cette progression durant les prochaines années.
Quant aux bénéfices, ils devraient être particulièrement significatifs, mais surtout dans certains secteurs clés (technologie, chimie, pharmacie, défense, aérospatiale et finance). Les simulations de matériaux et produits chimiques pourraient notamment générer une valeur annuelle de 100 à 500 millions de dollars dès les prochaines années – évalue le BCG.
Préparer les employés au quantique dès aujourd’hui
Face à ces perspectives, les gouvernements n’abandonnent pas leur soutien au secteur. Les organisations publiques prévoient d’allouer plus de 10 milliards de dollars au quantique dans les trois à cinq prochaines années, principalement aux États-Unis et en Chine.
Le rapport note au passage que les institutions jouent un rôle majeur, puisque la moitié du marché serait liée au secteur public.
Du côté du privé, le BCG recommande aux entreprises de se concentrer sur le développement de nouveaux algorithmes quantiques, de préparer leurs salariés dès aujourd’hui, et de cibler les cas d’usage qui pourraient bénéficier d’un retour sur investissement rapide.