
Kiattisak - stock.adobe.com
Agents IA : ServiceNow veut tous les gouverner
Alors que les entreprises peinent encore à identifier des bénéfices clairs de l’IA générative, ServiceNow complète sa suite d’outils afin de gouverner les agents IA, suivre leur performance métier et orchestrer leurs échanges avec des systèmes tiers.
Lors de la conférence Knowledge 2025 cette semaine, ServiceNow a insisté de nouveau sur ses capacités agentiques. À commencer par l’AI Control Tower, en disponibilité générale.
Sur le papier, AI Control Tower doit permettre de gérer tous les éléments d’IA liée à l’entreprise depuis un seul endroit accessible potentiellement par les cadres dirigeants de l’entreprise et les responsables de la gouvernance.
« L’AI Control Tower peut renseigner combien de systèmes d’IA sont actuellement déployés, si c’est un agent IA ou un algorithme de machine traditionnel, évaluer les risques, etc. », affirme Dorit Zilbershot, vice-présidente des expériences IA et de l’innovation chez ServiceNow, lors d’un point presse.
Un cadre de gouvernance pour les agents IA
« Il ne s’agit pas nécessairement de systèmes d’IA lié à ServiceNow. Il pourrait s’agir de différents systèmes que je pourrais gérer en un seul endroit, en m’assurant que je dispose d’une gouvernance et d’une compréhension complètes de ce qui se passe dans mon entreprise », poursuit-elle. « Nous voulons également nous assurer que toutes les réglementations émergentes sont pleinement respectées ».
Sur son site Web, ServiceNow présente AI Control Tower comme un package pouvant contenir un Workspace dédié à la gouvernance des produits d’IA ServiceNow, un modèle de données pour l’inventaire des IA, un outil de suivi de cycle de vie des actifs, un tableau de bord de gestion des risques et de la conformité, un outil de gestion de cas traités avec l’IA, et des éléments pour respecter des législations comme l’IA Act.
La documentation de l’éditeur semble indiquer que, pour le moment, l’AI Control Tower est fonctionnelle pour les agents et les assistants ServiceNow. Pas pour les services tiers, hormis les LLM qui propulsent les services d’IA créés dans l’AI Studio et Now Assist.
Néanmoins, cette tour de contrôle de l’IA absorbe certaines fonctionnalités présentées lors de la présentation d’AI Agent Orchestrator au mois de mars. C’est notamment le cas pour la capacité de calcul de ROI, et la corrélation entre l’usage de l’IA et les métriques de performances des activités ou des métiers.
La sacro-sainte quête du ROI (avant même de passer en production)
« C’est la priorité de tous nos clients lorsqu’ils commencent à adopter l’IA générative et l’IA agentique », déclare Dorit Zilbershot. « Ils veulent comprendre si l’IA fonctionne vraiment pour leur activité et si elle aide leurs métiers ».
De fait, les analystes observent que les entreprises peinent à concilier l’engouement pour l’IA générative avec leurs environnements spécifiques.
« Cela provoque une peur réelle de passer en production, parce que tout le monde veut avoir des résultats garantis », affirme Keith Kirkpatrick, analyste chez Futurum Group.
Or, il est peu probable que les premiers déploiements entraînent de gros gains d’efficience, poursuit-il.
« Vous ne constaterez pas de multiplication des gains d’efficience que lorsque plusieurs flux de travail argentiques sont déployés. Mais la plupart des agents ne peuvent pas encore traiter des problèmes à résoudre en parallèle », souligne Keith Kirkpatrick. « Nous sommes encore loin d’une expérience de service totalement autonome ».
Certains primoadoptants des agents IA de ServiceNow ont commencé à mesurer la valeur de l’IA, tout en rappelant que les fonctions proposées par ServiceNow sont encore très fraîches. AI Agent Orchestrator, qui permet actuellement d’effectuer ces mesures d’efficacité n’est disponible que depuis le 12 mars, rappelle Dave Kanter, directeur senior ServiceNow Business Group chez Accenture.
Accenture teste des agents pour la réponse à incident.
« Nous nous attaquons à des types d’incidents qui se produisent 5 à 7 % du temps, soit des centaines ou des milliers de fois par mois, et nous mesurons les résultats en fonction d’une ou deux étapes de décision », indique Dave Kanter.
S’il n’y a rien de concluant encore concernant les agents IA, l’IA générative donne déjà des résultats encourageants, selon Dave Kanter. Accenture a déployé la plateforme Now pour ses 801 000 employés. Depuis qu’elle a ajouté la synthèse des incidents pour les pros du service d’assistance qui répondent aux nouveaux incidents et pour les examens post-incidents, elle aurait constaté une diminution de 10 % du temps moyen de réparation des problèmes.
Toutefois, les professionnels de l’IT auront besoin de voir plus d’exemples de ce type dans des secteurs similaires au leur avant d’élargir l’adoption des agents d’IA, considère Neil Ward-Dutton, analyste chez IDC.
« Ce que tous nos clients réclament à cor et à cri, c’est qu’on leur montre des exemples d’entreprises qui ont réellement réussi avec ce type d’agents, où l’on peut voir non seulement ce qu’elles ont accompli — ont-elles réduit leurs risques ? Ont-elles amélioré la qualité de leurs services ? Ont-elles gagné plus d’argent ? -- mais aussi ce qu’elles ont fait pour y parvenir. Car le parcours n’est pas simple », signale-t-il.
AI Agent Fabric : faire parler les agents entre eux, peu importe le protocole
Cela prendra du temps. Pour l’instant, les éditeurs et les fournisseurs terminent de rassembler les fonctions de conception, de déploiement et de gouvernance des agents IA. ServiceNow aussi.
À l’occasion de Knowledge 2025, il a présenté AI Agent Fabric, un « moyen de connecter n’importe quel agent interne ou externe à une entreprise » avec sa plateforme Now. Il s’agit de prendre en charge les communications d’agent à agent, d’agent à outil ou encore de système d’agents à système d’agents, selon l’éditeur. ServiceNow s’apprête à prendre en charge un ensemble de protocoles, dont MCP (Model Context Protocol) et Agent2Agent de Google.
« AI Agent Fabric est moins un protocole qu’une capacité », confirme Dorit Zilbershot. « Nous travaillons en étroite collaboration avec Google au sujet de A2A, nous allons évidemment prendre en charge MCP, nous travaillons avec IBM sur ACP (Agent Communication Protocol), et d’autres ». « Nous considérons que nous proposons une plateforme ouverte et que nous serons capables de prendre en charge l’ensemble des protocoles communs disponibles pour que ce ne soit pas bloquant pour nos clients », ajoute-t-elle.
Les agents pourront aussi se connecter au système Workflow Data Fabric, une couche de données unifiée qui permet comme avec Data Cloud de Salesforce et Appian Data Fabric, de gérer l’extraction de données de systèmes tiers, de les mapper pour les faire correspondre à des champs de la CMDB RaptorDB de ServiceNow. Suivant le cas d’usage, les données peuvent être copiées ou si le système source le permet, être jointes dans des vues matérialisées.
« L’avantage de cette architecture est qu’elle est transitoire par nature, car les données peuvent disparaître une fois le flux de travail terminé. Mais le deuxième avantage est que tout le prétraitement et le précalcul se font du côté du partenaire, par exemple dans Databricks ou Snowflake », explique Amit Saxema, vice-président et directeur général Workflow Data Fabric chez ServiceNow. « Nous nous attendons donc à des performances élevées lorsque nous interagissons avec ces données. Et ces données sont mises à disposition comme n’importe quel autre service accessible par les agents IA »
AI Agent Fabric ne sera pas disponible avant le troisième trimestre 2025. Selon Neil Ward-Dutton, il faudra patienter au moins un avant qu’un protocole comme MCP soit suffisamment robuste pour des besoins des entreprises.
ServiceNow se voit en chef d’orchestre des agents IA
Comme évoqué plus haut, ServiceNow est loin d’être le seul à fournir des capacités similaires. Microsoft, Google, AWS, Snowflake, Databricks, Salesforce, Atlassian, Uipath, Oracle, SAP sont quelques-uns d’entre eux.
Certains se concentrent sur leur pré carré, comme Atlassian, qui considère que l’avenir se jouera dans la communication entre des agents développés, déployés et gérés depuis différentes plateformes. ServiceNow, lui, voudrait bien être le chef d’orchestre de tous les agents IA.
Pourquoi les entreprises devraient plutôt miser sur ServiceNow que sur Google Vertex AI, Amazon Bedrock ou autres pour développer leurs agents ? « Tout est question de fournir une expérience full stack », répond Dave Wright, Chief Innovation Officer chez ServiceNow.
« Si vous choisissez de bâtir [des agents] sur un système autonome, vous devrez quand même intégrer vos systèmes pour qu’il fasse quoi que ce soit en back-end. Beaucoup de nos clients sont habitués à gérer ces éléments dans ServiceNow », poursuit-il.
« L’identification de ces services et la capacité à chercher des moyens d’automatiser, d’optimiser et d’accélérer ceux-ci, c’est une prolongation très naturelle de notre plateforme. Nous traitons ces agents comme des actifs. Ce faisant, nous pouvons comprendre leurs performances, les optimiser, les réparer quand ils échouent, les retirer. Nous pouvons gérer le cycle de vie complet d’un agent de la même manière que nous gérerions le cycle de vie d’un actif. C’est notre particularité ».