Huawei s’efforce de maintenir une longueur d’avance dans tous les réseaux
Qu’il s’agisse de Wifi, d’équipements pour campus ou de switches pour datacenters, le constructeur chinois déploie des techniques d’avant-garde pour enrichir les usages et maximiser les bandes passantes.
Des fonctions de pointe pour se différencier dans les équipements réseau. Le Chinois Huwaei n’a pas encore de Wifi 8 à proposer – il avait été le premier à mettre le Wifi 7 à son catalogue –, mais ses bornes intègrent désormais un sonar qui détecte la présence des individus et des caméras cachées. Sur les campus (bureaux, hôpitaux…), ses switches Ethernet héritent d’une technologie issue des datacenters et permettant d’assembler un seul équipement virtuel à partir de plusieurs physiques, ce qui simplifie radicalement l’administration des règles de sécurité et le routage dynamique.
« Concernant les bornes sans fil, nous parlons à présent de Wifi 7 Advanced, parce que nous y mettons déjà des technologies de convergence entre les aspects réseau et les aspects physiques que nous développons pour les futurs équipements Wifi 8 », argumente Christophe Batiard, le directeur pour l’Europe des produits réseau chez Huawei (en photo en haut de cet article). LeMagIT l’a rencontré à l’occasion de l’événement Huawei Connect, que le constructeur vient d’organiser à Madrid pour réunir ses clients et partenaires européens.
En l’occurrence, les bornes Wifi de Huawei sont capables de détecter très finement l’écho des ondes qu’elles émettent et d’évaluer de quelle manière cet écho diffère dans le temps. « L’idée est de faire de la sécurité périmétrique. Nous savions déjà identifier la signature d’une présence humaine en temps réel, exactement comme les détecteurs de présence dans les systèmes d’alarme. Au-delà des intrusions, ce système nous a été demandé dans les bureaux pour n’allumer l’éclairage et le chauffage que s’ils sont occupés. »
« L’antenne peut percevoir [les ondes réfléchies] et détecter des caméras cachées dans les pièces. »
Christophe BatiardDirecteur pour l’Europe des produits réseau, Huawei
« Nous venons tout juste d’améliorer notre base de reconnaissance des ondes réfléchies avec la signature électromagnétique de plus de 120 caméras. L’antenne peut les percevoir et détecter des caméras cachées dans les pièces. Le cas d’utilisation, c’est d’éviter l’espionnage dans les chambres d’hôtel, les cabines d’essayage ou autres. Si une caméra est installée dans le champ de couverture de la borne, une alerte est automatiquement envoyée à sa console d’administration », explique Christophe Batiard.
Il précise qu’il s’agit bien de détecter des caméras qui ne transmettent même pas forcément leurs prises de vue en Wifi. Leur signature électromagnétique correspond juste à leur manière de réfléchir les ondes, sur un principe similaire au RFID.
Maintenir la qualité de service de bout en bout
Toujours à propos de détection physique, Huawei a mis en valeur lors de sa conférence la capacité de ses équipements réseau à adapter le trafic pour prioriser celui de certains utilisateurs selon certaines conditions d’usage.
Sous le terme générique VIP Lane, cette technologie ne se contente pas de réserver de la bande passante sur les switches Ethernet pour certaines connexions. Elle adapte aussi dynamiquement le faisceau d’ondes des bornes Wifi pour que l’utilisateur ait une connexion optimale même lorsqu’il se déplace (fonction VIP Per-Packet Power Control) et décode en priorité ses paquets dans les bornes et les switches (fonction VIP Fast Pass).
« L’idée est d’apporter de la qualité de service de bout en bout. Bien sûr, nous savons aussi prioriser les flux de données de tels utilisateurs vers tel serveur applicatif sur le réseau, comme tout le monde, mais nos concurrents ne prennent pas en compte l’aspect physique de la connexion de l’utilisateur. Par exemple, nos équipements réseau savent qu’un iPhone fonctionne mieux sur une certaine fréquence et, lorsqu’ils en détectent un, ils indiquent aux bornes Wifi de privilégier cette fréquence pour cet appareil », dit Christophe Batiard.
« Nos concurrents ne savent donner la priorité à un trafic qu’à l’échelle d’un switch. En ce qui nous concerne, une seule règle s’applique à l’ensemble des switches. »
Christophe BatiardDirecteur pour l’Europe des produits réseau, Huawei
Et d’argumenter que les mêmes règles de priorité s’appliquent sur l’ensemble du réseau d’une entreprise : que l’utilisateur se déplace sur un autre site de cette entreprise et qu’il se connecte à un datacenter distant via une passerelle SD-WAN, il est certain de conserver sa priorité de trafic.
« Et même au sein d’un datacenter, nous savons prioriser les trafics. Alors, pas nécessairement pour des applications, car cela n’aurait plus un grand intérêt, mais par exemple pour les fermes de GPU. Nos concurrents ne savent donner la priorité à un trafic qu’à l’échelle d’un switch. En ce qui nous concerne, une seule règle s’applique à l’ensemble des switches. C’est-à-dire que si des serveurs ou des switches plantent, il devient possible de ménager des unités de secours qui vont automatiquement prendre la relève pour router les données au bon endroit », argumente le directeur des produits réseau, en évoquant une fonction baptisée NSLB (Neetwork Schedule Load Balancing).
Premier arrivé sur le routage très haute vitesse
Lors de ce salon, Huawei s’est aussi efforcé de démontrer qu’il maîtrisait aussi bien que ses concurrents, si ce n’est mieux, les techniques de pointe visant à maximiser les bandes passantes en datacenter, sans devoir investir dans des équipements en plus. Il en va ainsi des réseaux pour calculs intensifs.
Huawei n’implémente dans ses équipements ni la technologie propriétaire Spectrum-X de Nvidia, ni son équivalent en cours de standardisation Ultra Ethernet. Mais il dispose d’une solution similaire qu’il appelle DIP (Deterministic IP). Comme dans les deux autres cas, les switches deviennent capables d’envoyer des paquets dont la seule fonction est de sonder le réseau pour identifier les liens engorgés. Cette information leur sert à établir dynamiquement la meilleure route à prendre pour conserver au maximum la fluidité du trafic.
« Il n’y a pas de mystère : Deterministic IP dans le datacenter repose sur les mêmes algorithmes qui servent à optimiser le trafic dans nos switches et nos bornes Wifi sur les campus », se plaît à préciser Christophe Batiard.
Huawei a aussi été le premier à proposer des switches équipés de connecteurs Ethernet 800 Gbit/s pour les datacenters. Cette gamme se complétera bientôt en Europe d’un switch 16800H capable d’offrir 640 connecteurs à cette vitesse. Celui-ci devrait tenir dans environ la moitié d’une baie rack. Cette taille est plus importante que ce que les concurrents promettent d’atteindre en 2026.
Avec des ports 800 Gbit/s, les futurs switches de Nvidia ou ceux basés sur des puces Tomahawk 6 de Broadcom se voudront extrêmement compacts ; on parle d’atteindre 128 connecteurs dans un boîtier de seulement 2U (soit un quart de baie de rack pour cumuler 640 ports). La raison est une nouvelle conception à base de puce contrôleur entourée d’un bus photonique permettant de remplacer les gros connecteurs SFP électriques d’un switch conventionnel par de minces connecteurs LC de fibre optique. Revers de la médaille, ces switches devraient coûter bien plus cher que des switches conventionnels. Mais ils resteront moins chers que le prix qu’il faudrait payer pour doter chacun de leurs connecteurs d’un embout photonique ordinaire.
« L’avantage de cette approche est que nous continuons à pouvoir gérer les communications sur chaque port. »
Christophe BatiardDirecteur pour l’Europe des produits réseau, Huawei
« De notre côté, nous avons préféré conserver les embouts optiques », lance Christophe Batiard, en précisant que ceux de Huawei ne sont pas ordinaires. Ils intègrent une puce photonique de nouvelle génération, non seulement très économique, mais qui consomme aussi très peu de courant. « L’avantage de cette approche est que nous continuons à pouvoir gérer les communications sur chaque port, alors que nos concurrents gèrent une communication globale au niveau de leur contrôleur, dont le signal optique se décompose de manière passive en plusieurs signaux optiques de longueurs d’onde différentes pour alimenter chaque connecteur », dit-il.
L’autre avantage est que certains ports peuvent aussi ne pas être utilisés avec une fibre optique, car des liens cuivre peuvent être suffisants pour des connexions très courtes entre un switch et les serveurs se trouvant juste en dessous dans la même baie rack. Dans cette configuration, la solution de Huawei battrait tous les records de prix.
Il est à noter que Huawei propose aussi déjà des switches pour campus comportant des connecteurs 400 Gbit/s, alors que la concurrence se limite sur cette gamme à des connecteurs 100 Gbit/s. Il s’agit notamment du 6780H en boîtier 2U qui dispose de 8 connecteurs 25 Gbit/s (bientôt remplacés par 16 connecteurs 100 Gbit/s dans une nouvelle version) et 4 connecteurs 400 Gbit/s.
« La raison d’être de ces switches sur un campus est de pouvoir soutenir les hauts débits de l’inférence dans les applications d’IA. Je note d’ailleurs que les clients européens sont plus friands d’utiliser des IA préentraînées sur site, que d’entraîner eux-mêmes des IA avec des serveurs hors de prix qui nécessitent des ports 800 Gbit/s pour être suffisamment alimentés en données », conclut Christophe Batiard.