MWC : la fibre sur le point de remplacer le RJ45 dans les réseaux locaux

Zeop et Huawei ont fait la démonstration de réseaux fibre POL – alias FTTR dans le grand public – qui permettent de relier en filaire très haut débit des équipements sans aucune contrainte physique.

C’est l’une des découvertes du salon MWC dédié aux télécoms qui se tient cette semaine à Barcelone : le compte à rebours est lancé pour remplacer les câbles Ethernet en cuivre des réseaux locaux par des fibres optiques Ethernet. La technologie est baptisée POL, ou LAN Optique Passif, et les opérateurs l’appellent FTTR, ou Fiber-To-The-Room, dans la perspective de la décliner sur leurs offres de box Internet.

LeMagIT a pu rencontrer l’un des tout premiers opérateurs à implémenter un POL au sein d’une offre FTTR, le Réunionnais Zeop. Celui-ci s’appuie sur l’une des rares solutions clés en main déjà disponible, conçue par Huawei. Il s’en sert pour proposer une box Internet qui distribue ses flux à plusieurs bornes Wifi murales, de sorte à étendre au maximum la couverture en haut débit sur une habitation ou des locaux professionnels.

« Notre enjeu au départ était surtout d’étendre la couverture du Wifi en haut débit. Comme d’autres, nous avons tenté de proposer des bornes qui se relaient entre elles par ondes radio. Mais le résultat est décevant. Il y a rapidement des pertes, du fait des interférences, de la composition des murs. En théorie, la solution idéale est de connecter chaque borne en filaire. Mais il est très compliqué, en pratique, dans une installation grand public, de tirer des câbles Ethernet en cuivre. En fibre optique, en revanche, c’est totalement indolore », explique Emmanuel André, le directeur général de Zeop (à droite sur la photo).

Une nouvelle génération de fibres

En l’occurrence, Huawei a mis au point des fibres plates, qui supportent de se plier à 90° et qu’il livre en rouleau avec une bande adhésive. Il suffit de faire glisser le rouleur le long des murs pour y coller une fibre pratiquement invisible. Comparativement, pour relier des bornes Wifi murales à une box avec du câble réseau en cuivre, il faut percer des tranchées dans tous les murs, ou assumer vivre avec des câbles blindés de 7 mm de diamètre qui pendent le long des bornes et serpentent dans l’espace de vie.

L’une de raisons de la discrétion des fibres optiques est qu’elles sont, contrairement au cuivre, totalement insensibles aux perturbations électromagnétiques et n’ont donc aucunement besoin d’être lourdement blindées.

D’ordinaire, les bornes Wifi et le routeur nécessitent soit de coûteux connecteurs SFP ou de coûteux adaptateurs RJ45 pour qu’on puisse y brancher une fibre. Huawei a mis au point des équipements qui disposent directement de connecteurs SC/APC, de sorte que les embouts à chaque extrémité de la fibre sont de simples jarretières en plastique. Zeop explique que l’installation d’un tel réseau de fibres n’implique de fait aucun surcoût.

La box fournie par Huawei à Zeop supporte d’être raccordée à un maximum de 16 bornes Wifi. Elle dispose d’un seul connecteur fibre, cependant. D’ordinaire, sur un réseau cuivre, il faudrait intercaler des switches entre la box et les bornes Wifi pour répartir les flux. Ces switches consomment de l’énergie. Sur un réseau POL, les switches sont remplacés par des « splitters », à savoir un module qui repose uniquement sur des miroirs pour envoyer les signaux à toutes les bornes. L’avantage du splitter est qu’il ne consomme aucune énergie.

« Aucun de nos concurrents ne propose d’installer des bornes Wifi sur un réseau filaire, car l’intervention serait trop lourde. Nous, avec cette solution, nous pouvons nous le permettre ! » se réjouit Emmanuel André, en précisant que l’installation d’une borne Wifi reliée par fibre à la box n’augmente que de 4 € par mois le prix de l’abonnement.

La réunion, un marché pilote pour le FTTR

Emmanuel André prédit que cette solution FTTR fera rapidement augmenter les parts de marché de Zeop : « nous estimons que 10 % des utilisateurs de bornes Wifi relayées par ondes radio voudront les interconnecter par fibre la première année. Ensuite, l’interconnexion par fibre se généralisera. »

Au moment où nous écrivons ces lignes, l’offre FTTR de Zeop est commercialisée depuis une semaine. À ce stade, Zeop a 32 % de parts de marché à la Réunion, soit 104 000 abonnés sur les 330 000 foyers et locaux professionnels raccordables à un réseau public FTTH. Selon un rapport de NPerf publié il y a un an, le débit moyen des connexions Internet terrestres à la Réunion est de 320 Mbit/s par abonnement, contre 237 Mbit/s en métropole.

« La Réunion a été le premier département français à être massivement fibré. Il y a une véritable culture de la fibre sur l’île. C’est l’endroit en France où devait naître le FTTR. Nous pouvons le faire, car nous sommes un acteur local. Nos concurrents [Orange, SFR, Canal+ Telecom, N.D.R.] qui ont une envergure nationale doivent traiter une problématique nationale – raccorder des foyers à la fibre – avant de s’occuper de la couverture du Wifi à l’intérieur des murs », argumente Emmanuel André.

Demain, du POL dans les entreprises

Selon Huawei, les fibres qu’il fabrique pour le FTTR prennent en charge des débits d’au moins 10 Gbit/s. Néanmoins, Zeop ne propose qu’un débit de 2,5 Gbit/s sur les déploiements chez les particulier comme dans les locaux professionnels. Soit les mêmes débits que le câble Ethernet en cuivre, même si le tout venant des switches RJ45 pour particuliers et TPE véhicule en grande majorité un débit de 1 Gbit/s.

« Nous ne voulons pas faire une course à l’armement. Notre enjeu est de proposer une solution simple, peu chère qui garantisse du haut débit à la connexion Wifi située dans vos pièces », dit Emmanuel André. Il n’exclut cependant pas de fournir un débit plus élevé avec la prochaine génération de box.

Huawei, en revanche, a fermement l’intention d’imposer ses solutions POL en guise de réseau Ethernet accéléré dans les PME européennes. Sur son stand, l’équipementier présentait ainsi des routeurs capables de délivrer du 50 Gbit/s en optique qui peut être décliné, grâce à un splitter, en fibres 1, 2,5, 10 ou 25 Gbit/s. Dans un premier temps, cette solution doit permettre à de grandes surfaces commerciales, des hôpitaux ou des campus d’installer très simplement en filaire des bornes Wifi, des caméras ou tout autre équipement connecté aux quatre coins de leurs sites.

Au moment de quitter le stand, LeMagIT a découvert que Huawei avait même déjà mis au point une variante PoE de ses fibres optiques. À peine plus épaisses que celles conçues pour le FTTR, elles intègrent aussi deux fils électriques pour alimenter et connecter l’appareil distant avec un seul câble.

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