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Avec Secoda, Atlassian s’équipe d’un catalogue de données pour ses agents Rovo AI
L’acquisition de Secoda par Atlassian fait suite à celles de Data.world par ServiceNow et d’Informatica par Salesforce. Les éditeurs de logiciels de gestion de services d’entreprise se livrent à une course effrénée pour améliorer leur gestion de données à l’ère de l’IA agentique.
Atlassian a acquis la société Secoda pour un montant non divulgué. Basée à Toronto au Canada, elle est spécialisée dans le traçage et le catalogage de données. Elle avait convaincu des sociétés comme Panasonic et Deezer. L’objectif est de renforcer la gestion des données structurées par son produit Rovo AI.
Un catalogue de données pour des agents IA
Cette transaction, rendue publique cette semaine, s’inscrit dans une tendance plus large. Par exemple, ServiceNow a mis la main sur Data.World. Salesforce, après quelques allers-retours, a signé l’acquisition d’Informatica pour 8 milliards de dollars. Tous visent le même but : mieux organiser et gérer les données utilisées par les agents IA.
Le catalogue de données doit présenter une vue unifiée des ressources de données d’une entreprise, y compris leur emplacement de stockage, leur date de création et d’accès, ainsi que leur transformation et leur flux entre les systèmes.
Les agents Rovo AI d’Atlassian connaissent une forte adoption cette année. Or, les grandes entreprises peinent à organiser leurs vastes volumes de données structurées pour les rendre exploitables, selon Tiffany To, vice-présidente directrice d’Atlassian.
« Les clients se disent qu’ils doivent faire quelque chose avec l’IA, ils nous demandent donc d’accéder aux LLM », affirme-t-elle auprès d’Informa TechTarget [propriétaire du MagIT]. « Puis ils réalisent qu’ils doivent d’abord faire leurs devoirs avec leurs données. Si mes données ne sont pas organisées, si je n’ai pas de contexte ni de gouvernance sécurisée, beaucoup restent bloqués ».
Infuser les données structurées dans le Teamwork Graph
Actuellement, Teamwork Graph, le graphe de connaissances d’Atlassian, prend en charge les données non structurées. Il traite les tickets Jira, documents Confluence et les fichiers Google Drive. Mais pour compléter le tableau, les clients ont également besoin d’un accès aux données structurées.
« Les clients posent souvent des questions comme : “Combien de tickets Jira sont en cours ?” ou “Cette équipe est-elle en avance sur le planning ?” », relate Tiffany To. « Ces requêtes concernent les métadonnées qui suivent tous les projets. Aujourd’hui, c’est fait manuellement avec des outils d’analyse. Le processus prend beaucoup de temps ».
Selon la dirigeante, les clients veulent utiliser les agents Rovo pour répondre à ces questions. « Mais cela veut dire que Rovo doit profondément comprendre l’organisation des données. Le Teamwork Graph trace les relations entre les objets. Secoda apporte le contexte supplémentaire sur ce que sont ces objets ».
Un client d’Atlassian, Pythian, utilise déjà Rovo Enterprise Search depuis neuf mois. La firme de consultance canadienne spécialisée dans l’analytique a une douzaine d’agents en production et beaucoup d’autres en test. « Les déploiements IA nécessitent des fondations de données solides pour être précis », confirme Kasia Wakarecy, vice-présidente chez Pythian. « Toute méthode supplémentaire de gouvernance des données est critique ».
Comme ServiceNow et Salesforce, Atlassian s’inspire du modèle de Palantir
Secoda ajoutera une ontologie d’entreprise spécifique à chaque client au graphe de connaissances Teamwork, comprend Charles Betz, analyste chez Forrester Research.
« Nous avons besoin que l’IA dispose d’un modèle sémantique clair, également appelé ontologie ou glossaire », résume Charles Betz. « Les agents IA vont fonctionner à grande vitesse et avec beaucoup de puissance à travers les API et toutes sortes de ressources internes, et s’ils sont confus quant à la signification fondamentale des données dans un magasin de données, cela va être un désastre total », souligne-t-il.
ServiceNow, Salesforce et Atlassian s’attaquent à ce problème d’une manière similaire à Palantir, avec une stratégie que l’industrie a baptisée « volant d’inertie des données » (data flywheel, aussi portée par SAP, partenaire de Palantir).
« Palantir met continuellement à jour un modèle de données dynamique… en examinant constamment la signification du travail effectué par une entreprise et les définitions du langage utilisé, en construisant un graphe dynamique, puis en l’utilisant pour informer les flux de travail », explique l’analyste de Forrester.
Ce qui distingue une entreprise comme Atlassian de Palantir, ce sont les données dont elle dispose déjà dans Jira. Charles Betz voit là une « véritable mine d’or d’informations sémantiques sur des milliers d’entreprises à travers le monde ».
« Ce type de métadonnées renforce la capacité de l’organisation à se comprendre elle-même et à créer de la valeur ajoutée, car c’est dans Jira que les collaborateurs commencent à raconter ce sur quoi ils travaillent et ce qu’ils sont censés faire ».
Dans un premier temps, la propriété intellectuelle de Secoda sera intégrée à Jira Assets. C’est la base de données de gestion de configuration d’Atlassian. C’est une fonctionnalité essentielle de sa plateforme cloud qui sous-tend également des produits tels que Jira Service Management. Le travail se concentrera d’abord sur la création d’informations à partir de données structurées, séparément des données non structurées intégrées dans le Teamwork Graph. Mais le plan final est d’unifier ces deux aspects, selon Tiffany To.
Les utilisateurs auront un accès direct à un workflow de formation pour les agents de Secoda dans le cadre de cette intégration. Une capacité qui a scellé la décision d’Atlassian de racheter la startup, après avoir évalué les acteurs du marché.
« Secoda partage avec l’utilisateur la logique suivie par l’agent pour assembler le contenu, ce qui est très important, car cela permet également à l’utilisateur de réagir », explique-t-elle. « Il existe donc une boucle d’interaction entre l’utilisateur et l’agent pour décider de la bonne approche selon les objets et leur définition ».
