« La confiance avec SAP s'érode » (ASUG)

Pour le groupe d'utilisateurs, de plus en plus de clients craignent SAP. Au cœur de cette «anxiété» : les accès indirects. Quant aux réponses de l'éditeur, elles n'empêcheraient plus certains de penser ouvertement à migrer.

Les mots employés par l'ASUG - l'un des plus gros groupes d'utilisateurs SAP au monde - sont durs. Au cœur de la discorde, la question des accès indirects qui ne serait toujours pas réglée. « Loin de là », écrit même Chris Crone, Community Advocates de l'association.

Chris Crone constate dans un billet de blog que le degré de connaissance des membres de l'ASUG augmente sur les subtilités contractuelles des accès indirects ; mais que, dans le même temps, les questions et l'inquiétude progressent.

« Un parent de plus en plus éloigné qu'on apprécie de moins en moins »

De plus en plus, les clients se poseraient la question de la loyauté de l'éditeur envers eux : SAP tente-t-il vraiment de les informer et de les accompagner pour être conformes par rapport aux licences achetées ou au contraire, attend-il les audits pour les redresser ?

L'ASUG ne répond pas directement à la question mais constate que l'ambiance va de « l'incertitude à la franche anxiété ». Un des ses membres fait même une comparaison assassine : « SAP pourrait bien cesser d'être un partenaire de confiance pour devenir un membre éloigné de la famille que l'on apprécie peu ».

Le résultat de ce contexte est, toujours d'après Chris Crone, une défiance grandissante envers SAP qui se manifeste par une prudence sur d'autres investissements et de nouveaux projets SAP.

Certains « repensent même leurs stratégies "SAP first" et envisagent sérieusement de se séparer de SAP », témoigne-t-elle.

La menace n'est pas sans évoquer celle du CIGREF qui rappelait en mars à l'éditeur que bien que très captifs, les clients de SAP avaient d'autres options - dont l'open source - sur le long terme.

Diageo et AN InBev : le feu aux poudres

Pour mémoire, les accès indirects concernent - comme leur nom l'indique - l'accès aux données stockées et générées par un outil SAP via un outil non-SAP. Par exemple, lorsqu'un CRM comme Salesforce est connecté à un ERP comme Business Suite et qu'il va y chercher une information (la fiche d'un client ou la progression d'une livraison), SAP considère par défaut qu'il s'agit d'un "accès" utilisateur à part entière, bien souvent non compris dans les licences. Et ce, même s'il s'agit d'une donnée brute qui appartient à l'entreprise.

Ces accès indirects sont une véritable épée de Damoclès pour les entreprises qui souhaitent faire du "best of breed" et plus encore dans un contexte d'Internet des Objets (IoT). L'IoT multiplie en effet drastiquement le nombre potentiel "d'acteurs" susceptibles d'accéder à l'ERP ou à n'importe quelle plateforme de stockage (HANA), d'intégration ou d'analytique.

Dans ce flou contractuel, SAP n'a pas hésité récemment à « redresser » de plusieurs dizaines de millions d'euros deux de ces clients : Diageo en février et AB InBev en mai. Deux affaires qui ont, semble-t-il, mis le feu aux poudres.

SAP tente de rassurer

Depuis, Franck Cohen - le Chief Commercial Officer français de l’éditeur au niveau monde - a tenté de déminer le terrain. « SAP a désormais éliminé les zones grises sur les accès indirects » déclarait-il au MagIT en mai lors du Sapphire 2017.

Mais les membres de l'ASUG ne sont pas rassurés ni convaincus pour autant.

« Le modèle de licences fondé sur les utilisateurs, vieux de plusieurs décennies, n'a pas suivi l'évolution technologique. Et il n'est plus, non plus, adapté à la façon dont on fait le business aujourd'hui. C'est un fait », diagnostique Chris Crone qui ne voit pas de solutions réelle aujourd'hui. « L'introduction d'un nouveau modèle de licence par SAP ne répond pas encore aux interrogations. Une chose est claire : il y a beaucoup de questions qui restent sans réponse ».

Confiance érodée mais dialogue préservé

La conclusion de l'ASUG est dure : « la confiance s'est érodée » entre SAP et ses clients.

Ceci étant, et pour voir le verre à moitié plein, le dialogue n'est pas rompu et le désamour n'est pas encore totalement devenu un divorce.

L'association souligne qu'elle continue à échanger régulièrement avec le management de SAP pour faire avancer le dossier. Et, qui sait, pour récréer une relation plus saine ? - ce qui, d'ailleurs, est exactement le même défi que celui que tente de relever le grand concurrent de SAP : Oracle.

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