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L’IA générative n’est pas l’Intelligence Artificielle Générale (et autres confusions sur la GenAI)

La GenAI n’est pas « magique ». Elle n’est pas non plus « éthérée ». Ni la seule forme d’IA, et encore moins une solution pour tous les problèmes métiers. BCG X et Ekimetrics tordent le cou à des confusions courantes pour mieux éviter un retour de bâton.

La vague de l’Intelligence artificielle générative a pris une telle ampleur que le grand public ne semble plus trop faire la différence entre « IA » et « GenAI ». Une seconde confusion semble s’ajouter, petit à petit, à la première, y compris dans l’esprit de certains professionnels : celle entre IA générative et IA généraliste (parfois appelée IA Généraliste supérieure – ou AGI+) ; avec à la clef une tendance à voir dans l’IA générative un outil « magique ».

Jeff Walters, directeur associé senior, responsable du centre d’expertise Technology Advantage pour l’Asie Pacifique chez BCG X (la branche Tech du prestigieux BCG), confirme cette impression. « Cela fait écho à ce que nous pouvons voir », confie-t-il au MagIT. « L’excès d’optimisme se traduit parfois par une “croyance” [dans l’IA], comme dans une magie. Avant que les entreprises passent de l’idée à la pratique, il faut parfois dissiper ces deux confusions ».

Première confusion : GenAI = AGI

« Cela peut paraître évident, mais la “GenAI” n’est pas l’intelligence générale artificielle », insiste Jeff Walters. « Il ne s’agit pas d’un système magique qui apprend soudainement tout ce que fait votre entreprise, puis qui en remplace de grandes parties d’un simple coup de baguette magique »

Au contraire, elle demande un travail en profondeur. « Je simplifie à l’extrême, mais l’optimisme que nous voyons aboutit parfois à un excès de confiance et à une sous-estimation de l’ampleur du changement et de la transformation dans une organisation, qui doivent se produire pour réellement tirer profit de la technologie », avertit l’expert.

Deuxième confusion : mettre de la GenAI partout

La deuxième confusion, si l’on considère que l’IA générative est magique (ce qu’elle n’est pas), c’est d’en mettre partout (ce qu’il ne faut pas).

« Il y a aujourd’hui une compréhension imparfaite de l’écosystème qui tend à avoir un côté très “all-in” », constate Jean-Baptiste Bouzige, CEO du cabinet de conseils en IA Ekimetrics. « On met tout sur les LLMs, sans se préoccuper du reste de la chaîne de valeur », regrette-t-il.

Il est important, au contraire, de se concentrer sur les endroits les plus pertinents où la GenAI apportera véritablement de la compétitivité – confirme BCG X.

« Qu’est-ce que je vais changer concrètement avec elle dans le mode de fonctionnement de mon entreprise ? Comment vais-je changer le travail des gens avec elle ? Qu’est-ce que la technologie va automatiser en particulier ? Et où va-t-elle plutôt formuler des recommandations ? », liste Jeff Walters (liste de questions non exhaustive).

Dès que l’on entre dans le vif du sujet, « on s’aperçoit que ce n’est pas de la magie », répète-t-il. Ceci étant, il est beaucoup plus facile de partir d’un point de vue positif et optimiste et de le modérer par la suite que de faire le contraire, plaisante Jeff Walters.

Troisième confusion : l’IA générative ne consomme pas d’énergie

Une autre « croyance » consiste à considérer que les LLMs – les grands modèles de langage derrière les IA génératives – sont des entités éthérées, qui s’entraîneraient et fonctionneraient sans réel impact énergétique.

« Il y a un vrai angle mort sur l’impact énergétique », souligne Jean-Baptiste Bouzige. Or les LLMs sont très énergivores. « Ils ne fonctionnent pas tout seuls. Dans la chaîne de valeur, il y a toujours besoin de stocker ses données, de cloud, de comput, de GPU, etc. », rappelle-t-il.

Des mises en production peuvent même être abandonnées à cause des impacts d’un déploiement à grande échelle. « De toute façon, il y a quelque chose qui empêche de généraliser le champ d’application : les coûts », acquiesce Sylvain Duranton, directeur monde de BCG X.

Car qui dit « consommation énergétique » dit aussi « coûts à payer ».

« Le coût est énorme. Une demande à un LLM peut coûter entre quelques centimes et plusieurs dollars », évalue Sylvain Duranton. « Donc, ce coût sera par définition un mécanisme de restriction pour sélectionner les champs d’application [pertinents] ».

Retour de bâton ou évolutions ?

De quoi susciter un retour de bâton à mesure que le public prend conscience que l’IA générative n’est pas magique, qu’il faut apprendre à s’en servir correctement avec des règles sûres, et que les LLMs ont une très forte dimension « physique » ?

Le directeur du BCG X ne le croit pas. « Il y a quand même de grosses évolutions », répond-il au MagIT.

Une des plus prometteuses est l’arrivée de petits modèles. « Vous n’avez pas toujours besoin d’un modèle super polyvalent et complètement générique pour effectuer certaines tâches », rappelle-t-il. « Dans le cadre de notre travail, nous déployons une combinaison de très grands modèles lorsque c’est nécessaire, mais aussi des modèles beaucoup plus petits pour traiter des cas plus simples », confie Sylvain Duranton.

La philosophie est exactement la même chez Ekimetrics. « Nous recommandons de déporter dans des modèles plus petits, plus spécialisés, un certain nombre de choses qui, notamment, injectent des connaissances métiers » invite Jean-Baptiste Bouzige. « Cette partie peut être traitée par du NLP beaucoup plus classique [N.D.R. : et beaucoup moins énergivore] – même chose pour la reconnaissance des entités nommées ou l’interprétabilité des sentiments ».

BCG X fonde également beaucoup d’espoir dans les recherches sur l’architecture. « Aujourd’hui, nous utilisons tous plus ou moins des GPU de Nvidia. Cette architecture n’est pas la plus optimale en termes de consommation d’énergie et de stockage des données », souligne Sylvain Duranton.

Mais le dirigeant constate que de nombreux fonds de capital-risque investissent pour trouver de nouveaux designs. NVIDIA lui-même travaille sur ces recherches. « Nous pouvons nous attendre à des avancées positives dans ce domaine également », espère Sylvain Duranton.

« Vous ne pouvez pas utiliser [la puissance de] la GenAI pour faire tout et n’importe quoi. Tout comme vous n’utiliserez pas un Boeing 747 pour déposer vos enfants à l’école le matin. »
Sylvain DurantonDirecteur monde de BCG X

La métaphore de l’IA générative et du B747

Parmi les autres solutions pour éviter un hiver de la GenAI, Ekimetrics préconise de travailler en amont sur la sélection et la qualité des données d’entraînement.

Mais, la bonne pratique, évoquée aussi bien par BCG X que par Ekimetrics, est de sélectionner drastiquement les cas d’usage pour cantonner les LLMs là où ils auront un ROI.

« Vous ne pouvez pas utiliser [la puissance de] la GenAI pour faire tout et n’importe quoi. Tout comme vous n’utiliserez pas un Boeing 747 pour déposer vos enfants à l’école le matin », plaisante Sylvain Duranton. « Vous avez d’autres moyens de transport bien plus adaptés pour le faire ».

Cette métaphore deviendrait « super concrète » pour de plus en plus d’entreprises, assure-t-il.

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