Derrière Mad Max Furiosa, une infrastructure au service de l’IA

Le studio australien KMM a remplacé ses stations de travail, son réseau et sa baie de stockage par des équipements dernier cri, dans le but d’utiliser l’IA générative pour accélérer la production de son film.

En amont de la réalisation de Mad Max Furiosa, la société de production cinématographique australienne Kennedy Miller Mitchell (alias KMM, également connue pour la franchise Happy Feet) a remplacé l’ensemble de l’infrastructure HPE de son studio par des baies de stockage, des stations de travail, des écrans et des switches Dell. Outre la modernisation des capacités de montage en temps réel, le choix de Dell a surtout été conditionné par une faculté bien particulière : avoir des équipements mieux adaptés à l’IA générative.

« Il faut savoir que les producteurs de films font désormais de la prévisualisation. C’est-à-dire que nous réalisons et nous montons tout le film en 3D avant même de le tourner. Cela nous sert à évaluer en amont quelles scènes nous devons réellement tourner et celles que nous aurions tournées pour rien, car nous ne les aurions pas conservées au montage. C’est une approche très économique. Et il devient pertinent d’utiliser l’IA générative pour ce travail préparatoire », explique Yan Chen, le DSI de KMM.

« Nous réalisons et nous montons tout le film en 3D avant même de le tourner. Cela nous sert à évaluer en amont quelles scènes nous devons réellement tourner et celles que nous aurions tournées pour rien. »
Yan ChenDSI, KMM (Kennedy Miller Mitchell)

« Donc nous combinons des modèles de LLM, des modèles de génération d’images – de Stable Diffusion notamment – et des modèles de génération de voix que nous personnalisons (fine-tuning) pour nos propres besoins. Puis, nous les combinons pour générer nos rushes de prévisualisation. Nous pouvons nous targuer d’avoir véritablement mis en place une usine d’IA », détaille notre interlocuteur, que LeMagIT a pu rencontrer dans les allées du salon Dell World 2024 qui vient de se tenir à Las Vegas.

« Vous savez, l’IA générative joue un rôle de plus en plus important dans la réalisation de ces films. Même concernant les images que vous voyez in fine à l’écran. Cela va des deepfakes aux remplacements de voix, en passant par la rotoscopie [transformation d’un personnage filmé en personnage dessiné, N.D.R.] et le compositing [fusion de différentes images, N.D.R.]. L’IA générative est utile pour accélérer de nombreuses étapes dans le flux de production, au tout début, comme à la toute fin », ajoute-t-il.

Au cœur des performances : une baie de stockage PowerScale

En tout, Furiosa, le dernier épisode en date de la franchise Mad Max, a représenté 20 Po de données qu’il a fallu faire traiter par des GPUs uniquement installés sur des stations de travail ; KMM explique qu’il se dotera de serveurs de calcul à terme.

Les stations de travail Dell Precision (en tour) choisies ici sont équipées de cartes GeForce RTX 4090 de Nvidia. Ces cartes GPUs disposent des mêmes circuits Ada Lovelace que ceux que l’on trouve dans les GPUs L40 et L4 que Nvidia vend sur les serveurs pour les tâches d’inférence. Il s’agit en particulier des cœurs Tensor de quatrième génération, également présents dans le GPU Nvidia H100 qui équipe les supercalculateurs.

De telles configurations auraient sans doute trouvé leur équivalent dans le catalogue de HPE. Mais c’est la baie de stockage PowerScale de Dell qui a achevé de convaincre Yan Chen de changer de fournisseur. Version moderne des NAS super élastiques Isilon, la baie PowerScale était la seule à pouvoir communiquer avec les stations de travail à la vitesse de 200 Gbit/s par port Ethernet.

L’avantage de cette baie NAS est sa haute disponibilité : les 20 Po de données sont répartis sur plusieurs nœuds de SSD qui, s’ils donnent tous accès aux mêmes fichiers (quitte à aller les chercher sur un autre nœud), offrent chacun une connexion Ethernet directe vers les stations de travail.

Dans les versions les plus modernes de OneFS, le système d’exploitation sur cette famille de baies, un NAS PowerScale peut communiquer ses données en RoCE (RDMA-over-Converged Ethernet). Ce protocole Ethernet étendu permet de charger les fichiers directement dans la RAM des stations de travail, sans passer par le goulet d’étranglement du processeur.

Yan Chen ne confirme pas que RoCE est en œuvre dans son installation. Mais il indique avoir effectivement déployé de nouveaux switches Ethernet de même marque Dell pour garantir un débit optimal de bout en bout, entre la baie PowerScale et les stations de travail Precision. De fait, RoCE n’est routable que sur des switches qui acceptent eux-mêmes le protocole Converged Ethernet.

Décupler la production de films

« La seule partie que nous n’avons pas remplacée par des équipements Dell dans notre infrastructure, ce sont les switches Ubiquiti qui permettent aux stations de travail de communiquer entre elles », dit Yan Chen.

« À Hollywood, les producteurs estiment que l’IA générative devrait leur permettre de produire 300 ou 400 films par an, contre une trentaine aujourd’hui. »
Yan Chen DSI, KMM (Kennedy Miller Mitchell)

Il reconnaît que remplacer l’ensemble des équipements s’est traduit par une migration informatique particulièrement coûteuse, « mais nous avons profité du budget exceptionnel de 350 millions de dollars australiens (214 millions d’euros) accordé à Mad Max Furiosa. C’est le plus important budget de tous les temps pour un film australien. Il nous a permis de faire cet investissement qui sera très largement rentable dans les années à venir. » Yan Chen estime que ses prochains investissements concerneront des serveurs, cette fois-ci, lorsque des modèles équipés des nouveaux GPU B100 ou B200 de Nvidia seront disponibles.

« Cette infrastructure d’IA générative représente une véritable révolution industrielle dans le cinéma. À Hollywood, les producteurs estiment que l’IA générative devrait leur permettre de produire 300 ou 400 films par an, contre une trentaine aujourd’hui. Néanmoins, cela pose un problème annexe : les gens iront-ils voir autant de films au cinéma ? », s’interroge-t-il, en prédisant un changement radical dans le mode de diffusion des films.

Crédit photo : KMM-Warner Bros.

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