Affaire Wipro NewLogic : réunion clef dans la ville de Christian Estrosi, la direction sous pression

L'affaire Wipro pourrait connaître une forme d'apaisement ce vendredi 25 septembre, à l'occasion d'une rencontre à la préfecture de Nice - la ville du ministre de l'Industrie, Christian Estrosi - entre délégués du personnel de NewLogic (la filiale que le groupe indien entend fermer), représentants du ministère et direction française de Wipro. A condition que cette dernière réponde aux nombreux griefs de salariés très remontés et qui ont su capter l'attention du ministre.

Suite à notre article paru hier matin (Wipro France : "Nous ne sommes pas des patrons voyous"), nous avons joint au téléphone une représentante du comité d'entreprise de NewLogic, la filiale française spécialisée dans la micro-électronique dont la fermeture est programmée pour octobre. Celle-ci revient sur les négociations entre les 61 salariés de cette filiale et le groupe, mis en cause ces jours derniers par Christian Estrosi, ministre de l'Industrie. "Le processus de négociations a bien été ouvert le 11 juin dernier. Mais à l'époque, les dirigeants voulaient fermer le site en un mois !", explique la représentante des salariés. Ces derniers finissent toutefois par obtenir la signature d'un accord de méthode pour discuter plus en détails du plan de reclassement. "Mais, jusqu'à il y a 10 jours, les experts qu'avait mandaté le CE peinaient à obtenir les informations demandées à la direction. C'est pour cela que nous avons fait appel au ministre. Il a pris le sujet à cœur", explique le comité d'entreprise. Rappelons que Christian Estrosi a manifesté publiquement et à plusieurs reprises son indignation face aux pratiques du groupe indien.

Le 8, Wipro encaisse ; le 11, Wipro dégraisse

Il faut dire que, d'emblée, les discussions entre salariés et directions partaient sur de mauvaises bases. Selon les délégués du personnel, le 8 juin, Wipro encaisse 5,3 millions au titre du Crédit Impôt Recherche (CIR) pour les années 2006 à 2008. Dans la nuit du 10 au 11 juin - deux jours plus tard -, les représentants de la direction imprimaient les documents relatifs à la restructuration, qu'ils remettaient le lendemain aux délégués du personnel. "Et début juin, la direction de la société a refusé de signer un important contrat qui aurait permis d'amener de l'activité au site", déplore la représentante de salariés qui ont la nette impression que la fermeture de leur implantation était décidée depuis quelques temps déjà.

Au-delà du climat de suspicion que font naître des concordances des temps aussi troublantes, les salariés dénoncent un projet de reclassement au rabais. Et de s'insurger contre les rapprochements qui sont faits entre le montant du CIR perçu par Wipro en juin et l'enveloppe consacrée par le groupe au plan social : "c'est honteux. Est-ce au contribuable français de payer le plan de licenciement d'une entreprise indienne qui va bien ?"

Apaisement lors d'une réunion demain ?

Un ministre indigné, une direction qui s'estime dans son bon droit, des salariés chauffés à blanc : la rencontre qui réunira les représentants de l'Industrie, les délégués du personnel et la direction française de Wipro, demain à la préfecture de Nice, s'annonce tendue. D'autant qu'aucun repreneur n'aurait été trouvé pour le site, selon les déclarations de Christophe Martinoli, le directeur général pour la France de Wipro, aux salariés de NewLogic. Pour l'instant, une partie de l'activité pourrait être reprise par deux spin-off (une autour du WiFi, l'autour autour de Bluetooth), concernant entre 10 et 20 emplois et montés par des employés de NewLogic. "Mais une fois encore, on ne reçoit aucune aide de la direction. On aimerait notamment que Wipro cède à ces structures la propriété intellectuelle relative à ces projets ainsi que du matériel", explique le CE.

L'image de la France écornée ?
La presse indienne suit assurément les évolutions de la situation chez Wipro NewLogic à Sophia-Antipolis. Dans un entretien accordé à nos confrères de l’Economic Times, un dirigeant de SSII indienne – qui a requis l’anonymat – s’inquiète notamment de « l’interférence du gouvernement » dans des décisions « business [prises] dans une économie de marché libre », uniquement susceptibles, selon lui, de « réduire l’attractivité de la région ». Le tout dans un contexte décrit comme difficile par nos confrères alors que, en Europe continentale, « la plupart des organisations privilégient les SSII locales. » Ce qui n’empêche pas quelques grosses prestations de partir pour le sous-continent indien, directement via des prestataires indiens ou par le biais des implantations locales de SSII européennes.
De son côté, Karthik Shekkar, secrétaire général du syndicat Unites pour l’Inde, ne cache pas son intérêt pour la situation, y trouvant une source d’inspiration pour ses propres luttes. En juillet 2008, Karthik Shekkar soulignait d’ailleurs au MagIT l’opposition de Wipro au syndicalisme. Une situation qui, selon lui, n’a guère évolué.

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