Au CeBIT, le « Green IT » reste un vœu pieux

Entre l’enthousiasme affiché par les organisateurs du salon et les critiques de Greenpeace, nous avons voulu savoir si cette édition 2008 du CeBIT, qui se déroule jusqu’au 9 mars à Hanovre, est vraiment « green ». Et tenté de faire le point sur la qualité environnementale des parcs informatiques installés.

Autant le dire tout de suite, ce CeBIT 2008 est bien loin de la « vert-attitude » mise en avant par ses organisateurs. Au-delà des critiques de Greenpeace – justes sur le fond en dépit d'une méthodologie discutable –, les illustrations concrètes d’une émergence de prise de conscience écologique ne manquent pas, tant du côté des industriels que des utilisateurs. Les organisateurs du gigantesque salon, eux, semblent plus à la peine.

Derrière la promotion, une installation au régime sec

Le « Village Green IT », tout d’abord, est bien loin de l’image que Deutsche Messe AG, société organisatrice du CeBIT, essaie de lui donner à travers une communication débordante. Petit, le village se résume à une poignée de stands mis en scène dans un cadre sommaire tout de blanc et de vert. Côté visiteurs, c’est loin d’être l’affluence. Carla Kleinjohann, de Design Company, qui coordonne l’opération avec Deutsche Messe, a tenté de nous rassurer : « il y beaucoup de monde qui vient ; je ne saurais compter le nombre de journalistes que nous avons reçu. Hier soir [le mercredi 5 mars], jusqu’à 19h, il y avait là huit caméras ; les journalistes faisaient la queue. » Peut-être, mais combien de visiteurs ?

Au-delà de la langue de bois, des exposants critiques

Loin de cet auto satisfécit, certains exposants du « village Green IT » laissent entendre quelques grincements de dents. Andreas Dischl, architecte consultant chez Cisco, souligne qu’il y a effectivement « de la fréquentation » même si elle n’a rien à voir avec « celle des stands technologiques. » Même son de cloche, du côté de Dileep Bhandarkar, ingénieur infrastructure chez Microsoft.

Au passage, Deutsche Messe se fait quelque peu égratigner : le montage du « village Green IT » n’aurait été décidé que tardivement, d’où un emplacement limité aux confins du vaste salon [dans le Hall 9, pour être précis, qui se trouve à l’opposé de chacune des entrées principales du CeBIT], un choix qui ne manque pas de susciter quelques regrets.

Une conscience écologique encore balbutiante

Les exposants du « village Green IT » reconnaissent quasi-unanimement rencontrer tant des visiteurs très concernés par la question écologique que d’autres, simplement curieux.

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Pour autant, force est de constater que la conférence-débat organisée ce mardi 4 mars par l’initiative « Climate Savers Computing » n’a pas fait recette : moins d’une dizaine de participants ne s’y bousculaient pas. Même chose pour la table ronde organisée par IBM sur le thème de la maîtrise des dépenses énergétiques, dans un salon privé sur son stand. Il faut dire que le constructeur n’avait pas fait grand chose pour attirer les foules : l'événement était réservé aux germanophones... sur un salon international et à propos d’une problématique éminemment globale.

Mais Dileep Bhandarkar le reconnaît volontiers : les meilleurs moyens de faire passer les concepts de Green IT passent par le portefeuille. Et d’expliquer que « même si l’environnement ne vous touche pas, vous ferez des économies en achetant un équipement efficace, sur le plan énergétique. » Plus loin, il précise même ne pas chercher à pousser au renouvellement des équipements existants mais plutôt à encourager les bonnes pratiques telles que l’activation de fonctions logicielles d’économie d’énergie. Pour faire simple : parlons sous ; il n’y a que ça qui fonctionne. Jürgen Strate, consultant d’IBM spécialisé dans les centres de calcul, ne le contredira pas : les entreprises qu’il conseille pensent avant tout finances. Le coût croissant de la facture énergétique n’est donc pas étranger à la croissance de l’intérêt pour les solutions écologiquement correctes.

Des équipements obsolètes ou démesurés

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Et s’il fallait encore assombrir le tableau, les SI actuels semblent loin des l’écologiquement presque correct qu’autorisent les derniers progrès technologiques. Magnus Piotrowski, chargé des questions relatives aux réglementations techniques et environnementales chez Lenovo en Allemagne, n’y va pas par quatre chemins : « le bureau d’un utilisateur en 2008 ressemble plus à celui de 2003 qu’à celui de 2008 », tels qu’ils sont très vertueusement présentés dans le « village Green IT » du CeBIT. Jürgen Strate évoque quant à lui la situation difficile des centres de calcul, des structures techniques conçues pour un cycle de vie bien plus élevé que celui des équipements informatiques : leur révolution verte prendra du temps. Pour compléter le tableau, Alan Mac Neela, analyste chez Gartner, relevait en janvier dernier, que « la route est longue pour l’industrie du support informatique » vers l’informatique écologique.

Enfin, et surtout, loin des discours, des déclarations d’intention ou encore des réflexions sur le futur standard Energy Star 5.0, il y a la réalité de constructeurs informatiques qui continuent de jouer la démesure avec des PC surcadencés à l’extrême, des alimentations gargantuesques – 1000 voire 2000 W pour un PC grand public ! Sûrement de quoi inciter à la sobriété électrique. Mais l'on dira qu'il en va de l'informatique personnelle comme de l'automobile...

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