L'hébergeur toulousain nFrance parie sur le libre pour son cloud IaaS

Fondé en 1997 et revendiquant une dizaine de milliers de clients, le Toulousain nFrance vient de lancer son offre IaaS à la demande, à un prix inférieur à ceux des géants US.

Spécialiste historique de l’hébergement open source, la société toulousaine nFrance propose aujourd’hui des services de cloud d’infrastructure à la demande basés sur des technologies libres. Fondée en 1997, la société s’est à l’origine développée en fournissant des services d’hébergement. « Nous avons traversé les époques avec succès et survécu à la bulle Internet. Nous avons toujours été rentables », explique son directeur général, Pierre Sintés. Cet ex-ingénieur général de l’armement, qui a aussi dirigé l’ENSTA (Paris Tech) de 1986  à 1994, a suivi son fils, fondateur et aujourd’hui président de la société dans l’aventure. « Notre credo dès le départ a été de fournir des capacités d’hébergement en France sur la base de technologies libres. Ce choix initial de l’open source s’est fait pour des raisons économiques, mais avec l’expérience, on s’est rendu compte que ce choix nous permettait d’avoir une bien plus grande souplesse ».

Un historique dans l’hébergement et l’intégration autour des technologies libres

L’offre initiale d’hébergement mutualisé connaît un succès important et elle est complétée en 2005 par une offre d’hébergement de serveurs dédiés. En 2009, la société se lance dans la construction de son propre datacenter à Toulouse, un site capable d’accueillir près de 1 500 serveurs et desservi par trois opérateurs télécoms de rang un. Ce site vient compléter les capacités de l’hébergeur dans deux autres datacenters tiers. Au tournant de 2010, nFrance dispose de près 15 000 clients pour l’essentiel en hébergement.  La société décide alors de faire une pause et de refondre sa stratégie. « Nous nous sommes rendus compte que nous faisions 80 % de notre chiffre d’affaires avec 250 gros clients sur un total de 15 000. La plupart des autres disposaient d’une machine en hébergement mutualisé à 100 € par an ». L’hébergeur décide alors de mettre l’accent sur la valeur ajoutée et de se recentrer sur des prestations à plus forte valeur. Au passage, il voit sa base installée chuter à 10 000 clients, mais son chiffre d’affaires doubler (la société emploie 19 salariés et a vu son CA passer à 2,5 M€ l’an passé). La recette : nFrance a multiplié les prestations d’intégration autour de ses offres d’hébergement, des prestations souscrites par un grand nombre de ses clients. Ces derniers sont pour l’essentiel des PME : « C’est assez logique », explique Pierre Sintés. «  Quelque part le client et le fournisseur doivent avoir quelque chose de commun. On ne peut pas avec notre taille parler à des groupes internationaux. Et puis, il faut aussi que les clients aient la même éthique que les fournisseurs… ».

Une offre de cloud IaaS public et privé sur base open source

Pierre Sintés est directeur général de nFrance

La transformation de nFrance s’effectue alors que le cloud commence à faire parler de lui. « Au début, nous n’avons pas cru au cloud, car nous y avons vu un exercice cosmétique », explique franchement le directeur général de nFrance. «  Les gens se gargarisaient avec le cloud sans trop savoir de quoi ils parlaient. Pour nous, ce n’était pas une panacée. » Finalement, la société décide de franchir le Rubicon : « Nous l’avons fait pour de multiples raisons : tout d’abord parce que le cloud apporte plus de facilité, plus de souplesse et plus de scalabilité à nos clients. Ensuite et très franchement parce que nos clients nous demandaient de moins en moins de serveurs physiques. Au début, nous tentions de leur expliquer qu’ils n’avaient pas besoin de cloud, mais nous perdions des clients. On peut en quelque sorte dire que nous sommes venus vers le cloud de façon rétive ».

De façon rétive mais aussi réfléchie. Car nFrance n’a pas fait dans la mesure avec son offre de cloud. Cette dernière peut ainsi être souscrite sans engagement et par carte bancaire et elle est configurable à la demande. Bâtie sur un socle open source (hyperviseur Xen, stockage ZFS…), l’offre de nFrance permet aux clients de configurer librement le nombre de vCPU, la quantité de mémoire, le volume de stockage persistant ainsi que la bande passante réseau de leurs VM. Et ces paramètres sont modifiables à tout moment, tant à la hausse qu’à la baisse. L’offre est déployée sur plusieurs datacenters et peut donc être accompagnée de services de PRA opérés par l’hébergeur (ces derniers sont des services d’intégration proposés sur mesure au-dessus de l’offre de cloud IaaS). NFrance propose aussi à ses clients des prestations d’infogérance d’exploitation au-dessus de son cloud. Ces prestations d’intégration sont toutefois limitées aux environnements open source. Nous pouvons sans aucun problème accueillir des environnements Windows sur notre cloud, mais nFrance n’en assure pas l’exploitation. Le client doit le faire lui-même ou s’appuyer sur un de nos partenaires. « Nous sommes de ce point de vue pragmatiques et fidèles à notre ligne », explique Pierre Sintès. Il est à noter que parallèlement à son offre de cloud public, nFrance propose aussi à ses clients des architectures de cloud privé et hybride. Le cloud hybride répond d’ailleurs bien aux besoins de la plupart des clients, note Pierre Sintés.

Un hébergement en France et des tarifs moins chers qu’Amazon

Ce qui est aussi rafraîchissant est que l’offre de nFrance - garantie sans subventions d’État – est moins coûteuse que les offres des grands du marché, mais aussi que l’offre d’Amazon AWS. Ainsi avec un hébergement garanti en France, nFrance propose l’équivalent d’une instance m1 large d’Amazon (2 VCPU, 8 Go de RAM, 410 Go de stockage) pour 177 € HT/mois alors qu’il en coûte 195 € HT sur Amazon. Cerise sur le gâteau, le prix de nFrance inclut une bande passante dédiée et illimitée de 25 Mbit/s burstable à 50 Mbit/s alors que les échanges de données sont facturés en sus par Amazon AWS.  Pour l’équivalent d’une des nouvelles instances m3.large (4 cœurs, 15 Go de RAM) d’Amazon, nFrance est encore plus concurrentiel. Une machine virtuelle Linux avec 16 vCPU, 15 Go de RAM et 100 Go de stockage persistant est ainsi facturée 217 € HT par mois (avec 25 Gbit de bande passante) alors qu’Amazon facture 371,25 € hors coût du stockage EBS et hors coût de la bande passante. Il est à noter que l’infogérance de l’OS libre par nFrance ajoute 40 € par mois au prix standard. Ces tarifs sont en ligne avec ceux d’autres acteurs comme Gandi ou Ikoula - eux aussi moins chers que l’hébergeur américain.

De tels tarifs permettent de faire mettre en doute les affirmations de certains acteurs américains selon lesquels il ne serait possible de proposer des prix bas dans le cloud qu’au prix d’une industrialisation de masse. Ce credo était déjà contrarié en France par les prix très serrés des serveurs dédiés chez des acteurs comme OVH ou Online. Les prix bas proposés par des acteurs comme nFrance, Ikoula ou Gandi, sur leurs services de cloud en sont une démonstration supplémentaire. Les marges brutes des géants du cloud comme Amazon seraient d'ailleurs confortables. Selon plusieurs anciens salariés d’Amazon et de grands du web interrogés aux États-Unis par LeMagIT, elles dépasseraient de loin les marges des constructeurs de serveurs.

Et histoire d’enfoncer un peu plus le clou, on peut aussi rappeler que des offres de cloud public comme celles de nFrance, Gandi ou Ikoula ont le mérite d’être portées par des sociétés françaises,  d’être hébergées en France et surtout d’être disponibles dès maintenant. De plus grands acteurs, ayant bénéficié des largesses de l’État via les financements du grand emprunt, ne peuvent toujours pas en dire autant...

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