Snowflake scelle un partenariat stratégique avec Salesforce

Salesforce vient d'investir dans Snowflake, qui boucle une nouvelle levée de fonds de 479 millions de dollars. L’éditeur de la solution CRM serait intéressé par la plateforme Data Exchange de l’expert du datawarehousing cloud.

Snowflake, le spécialiste américain du datawarehousing dans le cloud a annoncé une levée de fonds de 479 millions de dollars en série G. Sa valorisation grimpe à 12,4 milliards de dollars.

L’opération financière est co-dirigée par deux nouveaux investisseurs : Dragoneer Investment Group et Salesforce Ventures. Altimeter Capital, ICONIQ Capital, Madrona Venture Group, Redpoint Ventures, Slutter Hill Ventures et Sequoia renouvellent leur soutien financier lors de ce tour de table. Au total, Snowflake aurait levé plus d’1,4 milliard de dollars après huit levées menées depuis sa création en 2012.

Ce financement est associé à un partenariat d’envergure avec Salesforce qui sera précisé au début du mois de juin 2020 lors du Snowflake Summit à Las Vegas. Trois questions se posent. Pourquoi Salesforce mise sur Snowflake ? Est-ce que cela change les relations avec les fournisseurs de cloud et les clients ?

Faciliter l’intégration des solutions Snowflake et Salesforce

Selon Benoît Dageville, Président et cofondateur de Snowflake, la levée de fonds a pour principal objectif de souder la relation avec Salesforce et Dragoneer. « Ce n’est pas temps que nous avions besoin d’argent, mais c’était pour créer ce partenariat [avec Salesforce et Dragoneer] », affirme le dirigeant.

L’éditeur engagé dans le datawarehousing cloud ne cesse d’ajouter des connecteurs et des fonctionnalités associées. Il multiplie les partenariats afin de s’assurer que les utilisateurs puissent accéder à de nombreux services d’ingestion de données, de préparation de gouvernance, d’analytiques avancées ou de BI tout en conservant une approche multicloud et multirégion.

Selon Benoît Dageville, le partenariat avec Salesforce vise effectivement à renforcer la compatibilité entre le data warehouse cloud et les services de Salesforce (Eintein Analytics et Tableau, entre autres). « Une majorité de nos clients utilisent Salesforce ou ont besoin de données issues du CRM. Le partenariat va nous aider à traiter les données de Salesforce plus facilement », assure-t-il. « C’est un message très positif pour nos clients ».

Il est déjà possible de synchroniser des données en provenance du data warehouse cloud dans Einstein Analytics ou de l’utiliser pour héberger les données qui seront traitées dans Tableau, mais cette configuration ne serait pas aussi aisée que les clients des deux acteurs le souhaiteraient. « Nous avons beaucoup de clients communs avec Salesforce et beaucoup d’entre eux nous demandent de l’aide pour récupérer leurs données Salesforce dans Snowflake », considère Benoît Dageville. Ce ne serait pourtant pas la raison première de ce partenariat.

Snowflake a introduit récemment sa plateforme Data Exchange qui, comme son l’indique, doit faciliter les échanges de données publiques ou privées entre différents utilisateurs internes ou externes.

« Nous n’avons pas encore annoncé précisément les aspects techniques de ce partenariat avec Salesforce. Nous y travaillons encore », déclare Benoît Dageville. Toutefois, le président de Snowflake considère que la plateforme d’échanges de données a séduit Salesforce et qu’il s’agit d’un des enjeux pour Snowflake. « Data Exchange fait partie d’une stratégie à long terme pour que Snowflake devienne une plateforme où l’on accédera aux données. Cela fait partie de notre plan de s’allier avec les entreprises qui ont les données ».

Une couche technique comme celle de Snowflake permettrait de renforcer le lien entre les outils de Salesforce et ceux de Tableau. D’après le président de Snowflake, le partenariat « permet d’ouvrir des discussions » pour que Salesforce devienne lui-même client de la solution de datawarehousing cloud. « Cela fera peut-être partie des discussions, mais il n’y a pas d’accord en ce sens », tempère Benoît Dageville.

Snowflake veut rester indépendant

« Je suis sûr que Salesforce est intéressé par Snowflake, mais nous, nous ne sommes pas intéressés. Nous voulons rester indépendants ».
Benoît DagevillePrésident et cofondateur, Snowflake.

Il est de notoriété publique que Salesforce veut considérablement augmenter son chiffre d’affaires. Pour ce faire, l’éditeur de CRM pourrait racheter Snowflake.

Cependant, Snowflake et Salesforce évoquent un partenariat et non pas un rachat. « Je suis sûr que Salesforce est intéressé par Snowflake, mais nous, nous ne sommes pas intéressés. Nous voulons rester indépendants. Un mariage demande le consentement de deux personnes », tranche Benoît Dageville « et en plus nous sommes un peu cher maintenant », dit-il, amusé.

Le partenariat est « un moyen de se rapprocher sans se marier », explique le dirigeant franco-américain.

Quant aux relations avec les fournisseurs de cloud, elles « ne devraient pas changer ». « Nous avons toujours la même approche. Nous sommes de gros partenaires [avec les fournisseurs de cloud] et nous essayons de le rester avant tout, bien que quelque part nous aussi concurrents parce qu’ils ont des offres similaires à celle de Snowflake », consent Benoît Dageville.

Pour rappel, Snowflake a renforcé la compatibilité de sa plateforme avec les services de Microsoft Azure en novembre dernier, à la demande de certains clients. L’éditeur a annoncé en juin 2019 un partenariat avec Google Cloud Platform qui sera effectif au cours de l’année 2020.

Snowflake revendique plus de 3 400 clients dans le monde, un chiffre récemment mis à jour. En octobre dernier, Snowflake se félicitait d’obtenir un indice de satisfaction de 74 % et un taux de renouvellement proche de 100 %. Selon Olivier Le Duc, responsable avant-vente Europe du Sud chez Snowflake, ce succès serait lié au modèle de paiement à l’usage et l’architecture technique sous-jacente. D’après lui, l’éditeur fournit sa solution à des clients de toutes tailles, petits comme grands. Toutefois, il compterait parmi ses utilisateurs un quart des Fortune 100. Les grands comptes restent la cible prioritaire et la solution aurait été conçue pour répondre aux problématiques d’industrialisation, selon le président.

L’éditeur serait également connu pour ses pratiques commerciales quelques peu agressives. Il aurait tendance à agacer ses concurrents directs. « Nous essayons d’avoir un message très positif sur nos compétiteurs », répond Benoît Dageville.

« Nous avons un modèle économique qui est très rentable, mais nous investissons beaucoup pour étendre notre présence. Donc le cashflow n’est pas positif ».
Benoît DagevillePrésident et cofondateur, Snowflake

Franck Slootman, PDG de Snowflake, a déclaré auprès de CNBC qu’il avait « probablement pris » 2 500 clients auparavant utilisateurs de Redshift, le service de data warehousing cloud d’AWS. « C’est un fait. Snowflake est en train de faire beaucoup à tous les systèmes conventionnels. Les entreprises réfléchissent au meilleur moyen de migrer vers le cloud, mais Redshift n’a pas été construit nativement pour le cloud », estime le président de Snowflake.

Aller doucement, mais sûrement vers l’introduction en bourse

Par ailleurs, Franck Slootman assure à CNBC que la société a généré plus de 100 millions de dollars de chiffre d’affaires en 2019, mais qu’elle ne serait pas encore rentable. « Nous avons un modèle économique qui est très rentable, mais nous investissons beaucoup pour étendre notre présence. Donc le cashflow n’est pas positif. Nous le serons prochainement, tout simplement en ralentissant l’expansion », précise Benoît Dageville.

Concernant l’introduction en bourse, le PDG est resté prudent et n’a toujours pas validé l’opération attendue de longue date par le marché et par les employés. L’homme derrière l’IPO de ServiceNow a affirmé une nouvelle fois que les investisseurs ne le pressaient pas dans cette direction. Benoît Dageville, le confirme cette introduction en bourse se fera « quand l’entreprise sera prête, probablement au début de l’été 2020 selon Franck Slootman » pour passer d’un statut privé à public. « Nous le ferons si les conditions sont bonnes », conclut-il.

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