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Transformation digitale : des DAF françaises très IT, mais pas très collaboratives

Une étude de l’éditeur BlackLine montre une forte appétence de la fonction finance pour les technologies, mais aussi des défis IT persistants sur leurs données, le travail hybride et – pour la France – sur la capacité à collaborer avec des collègues d’autres fonctions.

Pour la troisième fois en quatre ans, BlackLine, un des spécialistes de la numérisation des fonctions comptable et financière, a interrogé 1 150 cadres et professionnels de la finance à travers le monde, dont 150 en France (75 et 75).

Premier résultat de cette étude, la confiance des professionnels dans l’exactitude de leurs données semble s’être détériorée.

D’une confiance totale dans les données financières à une défiance souvent radicale

En 2018, les trois quarts des DAF disaient avoir « totalement confiance » dans les chiffres de leurs entreprises (et 21 % « relativement confiance », soit un total de 96 %). En septembre 2020, après la première phase de la crise sanitaire, ils étaient encore 94 % à les considérer comme bonnes, mais déjà seulement 47 % disaient avoir encore « totalement confiance ».

Un an plus tard, c’est la chute. Ils ne sont plus que 11 % à dire avoir « totalement confiance » dans leurs données (et 41 % à leur faire « relativement confiance »).

En sens inverse, et logiquement, une forme de défiance augmente sur la qualité des informations. Mais le point le marquant est certainement que cette défiance est de plus en plus radicale : près d’un professionnel sur cinq (19 %) n’hésite pas à dire ouvertement qu’il n’a pas « confiance du tout ».

Schéma de la dégradation de la fonction finance dans leurs données selon une étude de BlackLine
Schéma de la dégradation de la fonction finance dans leurs données selon une étude de BlackLine

D’où vient cette dégradation ?

Les facteurs évoqués sont, dans l’ordre, le fait de ne pas connaître les compétences des personnes qui ont manipulé les données, le manque de contrôles et de vérifications automatisés, et des outils (comme les tableurs) et procédés dépassés.

En revanche, les questions de l’intégration et du catalogage d’un grand nombre de sources éparses restent certes un problème clef (pour 20 % des sondés), mais en très fort recul (40 % les années précédentes) ; et cela malgré « une dette technologique [N.D.R. : l’existant] » qui persiste, insiste Lucie Bordelais, directrice développement EMEA de BlackLine.

Le télétravail n’est plus un problème pour les DAF… ou presque

L’année passée, les DAF avaient positionné le télétravail comme le deuxième facteur le plus important qui expliquerait cette donnée financière de moins bonne qualité. Mais là aussi, les choses changent.

« Il y a un vrai décalage entre ce que les jeunes attendent de l’entreprise et un monde qui n’est souvent pas aussi numérique que nos vies privées. »
Lucie BordelaisBlackLine

« Pointé du doigt il y a encore un an [pour 36 % des sondés], le télétravail semble une problématique appartenant au passé [3 %, et dernier facteur] », souligne l’étude.

L’évolution est encore plus impressionnante lorsque l’on parle de recrutement et d’attractivité. « Un tiers des professionnels admettent que le fait de ne pas proposer de travail hybride risque de décourager certains candidats » tout comme « le manque d’attractivité des conditions de travail, comme le travail flexible ».

Reste que 33 % des entreprises françaises sondées envisageraient un « retour à la normale » sans aucun télétravail.

« Cela pose une question : les entreprises qui ne se mettront pas au diapason du travail hybride arriveront-elles à recruter les meilleurs talents ? », questionne Lucie Bordelais.

« Il y a un vrai décalage entre ce que les jeunes attendent de l’entreprise, de ce qu’ils en imaginent (un monde ultra connecté, avec un accès à beaucoup de données, de la BI voire de l’IA) et un monde qui se transforme et qui n’est souvent pas aussi numérique que l’est notre vie privée », souligne-t-elle par ailleurs.

Des DAF français peu portés sur la collaboration ?

Autre enseignement, la collaboration (définie par Lucie Bordelais comme « la capacité à collaborer avec des collègues d’autres fonctions ») ne semble pas, pour les responsables français, être une compétence prioritaire pour de futurs chefs financiers.

Elle arrive derrière la capacité à gérer les risques, à comprendre les bonnes pratiques et à analyser les données.

La comparaison avec leurs homologues américains montre ici une approche profonde du métier par les financiers et les comptables français. « En France, la collaboration n’est qu’un point parmi d’autres », constate la responsable de BlackLine. « Aux États-Unis, la collaboration entre la fonction financière et les autres fonctions de l’entreprise, c’est le point numéro 1. Je pense que l’on va voir cette problématique monter parce que c’est un réel enjeu », entrevoit Lucie Bordelais, notamment pour mettre la DAF au centre des projets de transformation, et la sortir « de ses fonctions régaliennes ».

Des DAF très IT

Enfin, l’étude confirme que la finance s’est beaucoup transformée avec le numérique.

La preuve en est, lors des recrutements, les cadres estiment que leur entreprise a besoin, en plus des compétences traditionnelles, de connaissances technologiques en intégration des systèmes financiers (34 %), en RPA (33 %), en solutions d’automatisation des finances (30 %), en Intelligence artificielle (27 %), sans oublier la blockchain (19 %).

Un quart des décideurs financiers estiment même que les cours des étudiants devraient se concentrer davantage sur les compétences technologiques.

En conclusion : les direction financières veulent des jeunes talents avec plus de compétences numériques, et les jeunes talents veulent des directions financières plus digitales.

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