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OVHcloud souhaite lui aussi verticaliser son offre

Les fournisseurs de cloud, tout comme les grands éditeurs tels Salesforce ou Snowflake se sont lancés dans la verticalisation de leurs offres. OVHcloud se prépare à faire de même, en commençant par le secteur de la santé et l’industrie spatiale.

OVHcloud le sait. Il n’a pas l’offre de services pléthorique de ses compétiteurs américains que sont AWS, Google Cloud, et Microsoft Azure. En revanche, par le truchement réglementaire, il sait qu’il peut convaincre les organisations dans des secteurs clés en France et en Europe.

Lors de la conférence Very Tech Trip, Octave Klaba, président du conseil d’administration et fondateur d’OVHcloud, a défendu une stratégie d’expansion sur trois axes : les régions cloud, les produits et les segments d’activité.

 « Notre travail consiste à observer les verticaux, par exemple, la santé, les affaires publiques, etc. Puis, il s’agit de prendre en compte les certifications nécessaires dans ces différents secteurs et de les intégrer dans nos produits », indique-t-il.

Cela demande parfois de modifier les produits ou d’en créer de nouveaux. Il y a deux verticaux qu’OVHcloud souhaiterait cibler en particulier.

Un futur entrepôt de données de santé « made in OVHcloud »

D’abord, le fournisseur souhaite héberger les charges de travail liées à la santé, à savoir celles des laboratoires de recherche et de l’industrie pharmaceutique. « Il y a quatre grands cas d’usage : détecter et prévenir les maladies, trouver les nouvelles molécules, organiser la phase de test des traitements, puis suivre sur le terrain les bénéfices et les effets secondaires », liste Octave Klaba.

« Pour gérer ces données-là, et en extraire de la valeur, il faut mettre en place un entrepôt de données de santé (EDS). Vous allez voir prochainement des annonces d’OVHcloud consacrées à ce sujet », promet-il.

Pourquoi OVHcloud s’intéresse-t-il à la santé ? Est-ce une réponse au dossier Health Data Hub ? Selon les dires de Thierry Souche, CTO d’OVHcloud, ce sont surtout les entreprises du secteur qui sont venues voir les équipes du fournisseur.

« Aujourd’hui, séquencer le génome humain, ce n’est pas cher et rapide : les laboratoires utilisent pour cela des GPU ou des puces FPGA. Or ces entreprises se sont développées aux États-Unis, il y avait toutes les infrastructures nécessaires là-bas », explique-t-il au MagIT. « Mais ai-je vraiment envie que mon génome soit accessible aux autorités américaines ? Pas complètement ».

Le renforcement du droit européen en matière de protection des données et la volonté de certains États comme la France à privilégier les solutions souveraines les obligeraient à changer d’approche.

« Nous avons des discussions avec des entreprises américaines qui viennent nous voir pour qu’on les aide à monter un vrai service conforme au RGPD », poursuit-il.

Le fournisseur cloud français a conscience qu’il ne peut pas répondre seul à ce type de demande.

« Nous leur expliquons que ce n’est pas uniquement une histoire d’infrastructure : la manière dont ces organisations vont opérer le service compte également », confirme Thierry Souche. « Nous les éduquons pour qu’avec des partenaires européens, l’on arrive à faire une “triangulaire”, afin de lancer des services rentables, mais qui soient conformes aux droits français et européen ».

Ces échanges restent toutefois récents. « Il y a deux ans, nous n’avions pas ces discussions. Elles s’accélèrent depuis ces neuf derniers mois ».

Gérer le coût des données d’observation de la Terre

OVHcloud souhaite également convaincre les acteurs de l’industrie spatiale.

« Avec la réduction des coûts de lancement et la miniaturisation des satellites, il y a deux marchés qui sont en train d’exploser : les télécommunications et l’observation de la Terre », informe Octave Klaba. « Nous allons avoir des satellites qui vont observer la Terre sur un spectre de plus en plus large, fournir de plus en plus de détails et de plus en plus souvent. Cela va générer une quantité d’informations incroyable » anticipe-t-il.

À titre d’exemple, la NASA a stocké 70 pétaoctets de données d’observation de la Terre depuis 1980. Leur mise à disposition sur une large communauté amplifie le phénomène. Le projet Copernicus a favorisé le téléchargement de l’équivalent de 511 pétaoctets de données en provenance de satellites de la mission Sentinel. Les responsables du projet Copernicus stockent une quarantaine de Po.

« Si l’on ne fait rien sur le coût de stockage de ces informations, l’on ne va pas pouvoir s’en servir. On va devoir les effacer ou les sauvegarder sur bandes. Notre R&D se penche sur ce problème. Nous avons déposé quelques brevets pour stocker moins cher les données en provenance des satellites », dévoile Octave Klaba.

Mais le président du conseil d’administration d’OVHcloud veut surtout soutenir les usages commerciaux de ces données permettant de développer des applications propulsées au machine learning et deep learning « pour détecter les feux de forêt, trouver des fuites dans les gazoducs, prévoir les récoltes, cartographier les activités les plus polluantes, etc. ».

Arianespace utilise depuis peu les infrastructures du fournisseur cloud. Ce n’est qu’un début.

 « L’observation de la terre n’a pas réellement démarré. Pour l’instant, l’argent vient du secteur public, de l’Union européenne ou des États », poursuit Octave Klaba. « Ce qui m’intéresse, c’est de développer le “business”, aider les entreprises privées à tirer la valeur des images satellites et de créer un écosystème autour de ce sujet ».

Ne pas investir dans l’informatique quantique, un « risque pour l’Europe » selon Octave Klaba

Par ailleurs, Octave Klaba – dont l’influence sur la feuille de route d’OVHcloud n’est pas négligeable – veut que les entreprises s’intéressent à l’informatique quantique.

« À cause de l’informatique quantique, d’ici à quatre/cinq ans, maximum sept ans, il faudra renouveler tous les équipements matériels et logiciels de chiffrement », prévient le président du conseil d’administration qui anticipe les exploitations malveillantes des processeurs quantiques. Ces mêmes « puces » pourraient accélérer la recherche moléculaire, ajoute-t-il.

C’est avant tout un message qu’Octave Klaba veut faire passer.

« Il y a une chose à retenir : si une entreprise réalise 1 milliard d’euros de chiffre d’affaires, elle doit investir un million d’euros par an dans l’informatique quantique. »
Octave KlabaPrésident du conseil d’administration et fondateur d’OVHcloud

« Il y a une chose à retenir : si une entreprise réalise 1 milliard d’euros de chiffre d’affaires, elle doit investir un million d’euros par an dans l’informatique quantique. Il faut commencer dès maintenant ».

« Si les entreprises ne s’intéressent à cette technologie que le jour où l’ordinateur quantique est disponible, elles auront un retard considérable par rapport à leurs concurrents qui ont déjà investi et mis les bonnes mesures en place. C’est un risque pour l’Europe », prévient-il.

Les rêves d’Octave se confrontent à la dure réalité. Avant la généralisation de l’informatique quantique ou du traitement des données satellites, OVHcloud devra prouver qu’il est digne de confiance. Il doit encore gérer les conséquences légales de l’incendie de son centre de données strasbourgeois.

Depuis le 2 février, les clients de ses offres Bare Metal utilisant les versions antérieures à VMware Sexies 7.0 U3i sont les cibles d’une cyberattaque d’envergure mondiale. Si le fournisseur assure qu’aucun de ses services managés ou de cloud privé n’est impacté, que les utilisateurs de cette solution de VMware sont invités à mettre à jour l’hyperviseur depuis 2021, et qu’il accompagne ses clients dans cette épreuve, il faudra également gérer les possibles effets de bord d’une telle campagne malveillante.

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