France Quantum 2025 : l’heure est à la création d’un vrai marché

Les expérimentations de l’informatique quantique se multiplient. C’est un des enseignements de l’édition 2025 de France Quantum. Mais pour que les acteurs de l’écosystème deviennent pérennes, il faut des clients et poser les bases d’un marché, insiste Octave Klaba (OVH) qui explore lui-même le quantique.

Station F (Paris) – Pour la quatrième année, l’évènement France Quantum a réuni, « sous le haut patronage du président de la République » l’écosystème français de l’informatique quantique. Cette édition 2025 a affiché une ambition européenne – avec des start-ups hollandaises et anglaises – et une mise à l’honneur de l’Allemagne. Elle témoigne surtout d’un virage.

Une multiplication de projets

Côté acteurs, les « stars » – IBM, Pasqual, Quandela, Alice&Bob, Qubit Pharmaceuticals, welinq (la start-up co-fondée par Eleni Diamanti) ou C12 pour n’en citer que quelques-unes – étaient toutes là, au milieu de start-ups un peu moins médiatisées comme ColibriTD (algorithmes quantiques), Q*bird (sécurité), Paragraf (hardware à base de graphène) ou Multiverse Computing (qui a travaillé avec le Crédit Agricole).

Les projets d'informatique quantique listés par France Hybrid HPC Quantum Initiative
Les projets d'informatique quantique listés par France Hybrid HPC Quantum Initiative

Côté utilisateurs, en plus des « sponsors » comme le Crédit Agricole, la DGA ou le CEA, des groupes industriels (Merck, Renault, Airbus), les spécialistes du ferroviaire Deutsche Bahn et la SNCF, et le CNES sont venus témoigner de leur intérêt pour le « quantum ».

Il y a donc bien des explorations de l’informatique quantique dans des domaines très variés. Le stand de l’initiative nationale France Hybrid HPC Quantum Initiative confirme la tendance, avec une liste d’une quinzaine de projets (de Air Liquide, à la Société Générale, en passant par Naval Group, TotalEnergies ou Airbus).

Sur la grande scène de l’évènement, Octave Klaba, fondateur d’OVHcloud et cocréateur de l’évènement avec Damien Gromier (Artefact et serial entrepreneur), confirme que l’informatique quantique est rentrée dans une nouvelle phase. Mais pour lui, il faut aller plus loin. Et plus vite.

« Créer le marché »

« Maintenant, il faut créer le marché », lance-t-il. Comment ? « En mettant autour de la table les start-ups et les clients », le tout « avec l’aide [actuelle] du gouvernement » et plus largement des pouvoirs publics.

« À chaque fois que je vois une entreprise avec une super technologie [quantique], je leur demande “qui est votre premier client ?”. Sans revenus, vous ne survivrez pas. »
Octave KlabaOVHcloud

« On dit que pour chaque milliard de revenu que génère une entreprise, il faut qu’elle investisse un million pour tester les ordinateurs quantiques [physiques]… Aujourd’hui, on fait ce milliard, donc on s’applique cette règle », continue-t-il. De fait, OVHcloud va se doter de nouvelles machines sur le second trimestre 2025 après avoir acheté sa toute première en 2023.

Le but que revendique Octave Klaba, plus que d’avoir une nouvelle « business unit », est de créer cette synergie avec un OVH Quantum Cloud. « Le terme est marketing », concède lui-même le dirigeant, qui fait la promotion de ce « cloud » en le présentant plus comme une place de marché où il est possible de venir consommer des ressources quantiques en « pay as you go ». Et donc, pour les startups, de séduire des clients.

« Je le répète souvent, mais pour durer il faut du chiffre d’affaires. À chaque fois que je vois une entreprise avec une super technologie [quantique], je leur demande : “c’est qui votre premier client ?”. Sans revenus, vous ne survivrez pas. », insiste Octave Klaba en évoquant son histoire personnelle d’entrepreneur, qui a commencé presque sans capital, et a fait, dès le début, reposer le financement d’OVHcloud sur la vente de ses produits.

La Quantum Valley est à Paris

Mais pour créer un marché, il faut aussi des clients. Si certains commencent à venir (comme ceux cités précédemment), Octave Klaba invite les grandes entreprises européennes à accélérer et à se pencher plus largement sur la technologie. D’autant que l’écosystème leader serait en France.

« Il y a la Silicon Valley aux États-Unis, mais la Quantum Valley, elle est ici », sourit-il. « Vous n’avez pas besoin de prendre l’avion pour tester, essayer et rencontrer les acteurs. Tout au plus, c’est à 30 minutes de taxi ! ».

Le hardware, bien réel, présenté sur le stand de Quandela
Le hardware, bien réel, présenté sur le stand de Quandela

L’invitation peut paraître en avance de phase étant donné que la technologie quantique n’est pas encore mûre – en tout cas pas pour des cas à l’échelle et en production.

Mais pas autant en avance que cela, réplique Octave Klaba. OVHcloud a déjà exploré, en interne, la piste quantique pour la cybersécurité (et générer des chiffres réellement aléatoires), confie-t-il avant de recommander de « commencer avec les émulateurs ».

« Et quand cela fonctionne dans ces environnements [de simulation], [il faut] tester les machines physiques pour voir comment cela se passe », conclut-il.

Le début d’un tournant ?

Quand les ordinateurs quantiques seront-ils efficients ? Nul ne le sait vraiment.

Certains disent cinq ans, d’autres dix, d’autres plus. Mais la petite histoire retiendra que l’année 2024/2025 aura marqué le début d’un tournant vers un embryon de marché. Avec de vrais acheteurs.

C’est en tout cas ce qu’espère tout l’écosystème. Un écosystème que regardent par ailleurs de plus en plus les acteurs de la Défense, comme en a témoigné la présence, en clôture, du ministre des Armées, Sébastien Lecornu.

Que ce soit à l’Élysée ou à Balard, le quantique est plus que jamais stratégique pour la France. C’est l’autre grande confirmation de cette édition de France Quantum.

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