Airbus fait décoller sa réalité mixte vers le métavers

Le groupe Airbus travaille sur la réalité mixte depuis plusieurs décennies. Après un décollage des usages en 2015, l’industriel regarde aujourd’hui vers le métavers, aussi bien pour ses salariés (collaboratif immersif) que pour ses clients (support augmenté).

Le géant européen de l’aéronautique a fait de la réalité virtuelle (VR) et de la réalité augmentée (AR) une priorité pour l’ensemble du groupe. Ses filiales Airbus Commercial, Airbus Defense & Space et Airbus Helicopters collaborent toutes à la conception d’applications de réalité mixte – combinaison de l’AR et de la VR.

Les premiers pas d’Airbus dans ces technologies sont déjà anciens. L’entreprise a démarré à la fin des années 90 en se concentrant sur la réalité virtuelle. Quinze ans plus tard, la démocratisation de ces solutions allait marquer un tournant majeur pour ces projets. Un décollage en quelque sorte.

2015 : un décollage pour la réalité mixte industrielle

Au milieu des années 2010, arrivent en effet des modèles de casques de réalité virtuelle plus avancés et plus portables comme l’HoloLens de Microsoft. Ces nouveautés de l’époque ont constitué une opportunité pour les professionnels, en particulier en termes de déploiement. Auparavant, Airbus se concentrait sur des équipements coûteux uniquement destinés à l’industrie.

2015 a représenté un « gros virage » dans ce domaine, souligne, à l’occasion de l’IMAgine Day Metaverse, Fabien Dumon, lead of holographic academy pour Airbus Defense & Space, un studio de développement interne pour la réalité mixte et le métavers. La mise sur le marché de technologies « grand public » permettait des projets de réalité virtuelle pour des budgets compris entre 5 000 et 10 000 euros, contre quelques millions auparavant, chiffre-t-il.

Airbus a donc enclenché une étape d’exploration des usages pour le monde industriel. Notamment pour l’AR. « La réalité augmentée est chez nous l’enjeu principal d’industrialisation et d’utilisation dans nos usages industriels », déclare Hervé Routin, Head of mixed reality platform au sein d’Airbus Commercial. « La réalité virtuelle est en forte industrialisation chez nous, mais c’est un domaine sur lequel nous avons un peu moins d’usages aujourd’hui ».

Dans cette optique de passage à l’échelle, le groupe a repensé son organisation en s’appuyant sur des équipes dédiées dans ces trois différentes entités, réparties dans le monde (Europe, États-Unis et Australie).

Ces « core teams » assurent le développement en interne des applications de réalité mixte pour le groupe. « Airbus a fait le choix d’industrialiser ces technologies en interne. Cela constitue une force en permettant à chacune des équipes de bénéficier des succès des autres et de construire tous ensemble les produits d’AR/VR en usage industriel » justifie Hervé Routin.

Infographie de la carte des équipes chez Airbus
Carte des équipes

Une plateforme et des équipes mutualisées

Ces « core teams » possèdent toutes les compétences nécessaires à l’industrialisation. Sont intégrés, des représentants du business et des spécialistes chargés de comprendre leurs besoins et leur expérience. « Il ne s’agit pas seulement de comprendre l’expérience en réalité mixte que les métiers souhaitent, mais l’ensemble du process sur lequel ils interviennent pour que nous puissions définir le besoin avant de définir la solution technique. »

S’y ajoutent des compétences de développement, d’intégration IT, d’architecture et de gestion de projet. Celles-ci interviennent dans la définition des briques technologiques des applications. Enfin, le « cœur du réacteur » se compose des développeurs groupe, supportés par des équipes UX/UI pour la conception des solutions.

Enfin, ces développements se déploient au sein d’un écosystème afin d’embarquer les sources de données, la cybersécurité, le digital workplace, et enfin l’infrastructure et la plateforme. Cette dimension écosystème prend de l’ampleur pour tenir compte de la multiplication des sources de données (IoT, ERP, etc.) et « demain, de la plateforme connectée de l’avion pour acquérir des données et les partager dans ces expériences. »

Outre son organisation, Airbus a repensé sa plateforme. Les applications mises au point couvrent différentes parties du cycle vie des équipements fabriqués. Initialement, chaque application était indépendante. « Nous avons rapidement réalisé qu’avec la multitude de métiers au sein d’Airbus et de sources de données, nous avions besoin d’une plateforme centrale. »

Au niveau du groupe, Airbus s’est donc doté d’une plateforme commune, baptisée R3. Celle-ci regroupe l’ensemble des services d’accès aux données (3D, données de process pour la fabrication, etc.), mais aussi un « SDK spécifique ».

Ce kit de développement participe à l’accélération des développements d’applications. La centralisation permet en outre de faciliter la sécurité, gérée au niveau de la plateforme et non plus unitairement pour chaque application.

Infographie de la plateforme commune R3
Plateforme commune R3

Des prototypes au passage à l’échelle du métavers

Grâce à ces fondations, Airbus a mené une première phase d’exploration et de recueil des besoins. Ont ainsi été identifiés près de 80 cas d’utilisation, sélectionnés pour leur apport en termes de valeur. Ce sont en outre 100 prototypes qui ont été développés pour tester et vérifier cette hypothèse de valeur. 

La deuxième phase est celle de l’industrialisation, pour aller au-delà des prototypes. « Le but à présent, c’est de passer à l’échelle. Nous disposons déjà de quelques applications utilisées en mode industriel, sur les lignes d’assemblage », annonce Vivien Pacqueteau, Mixed reality & IoT digital manager d’Airbus Helicopters.

Outre le passage à l’échelle, le groupe se fixe comme objectif d’ajouter « toutes les fonctionnalités de collaboration dont nous avons besoin et qui vont nous rapprocher du métavers industriel. »

Métavers industriel, support augmenté et collaboratif immersif

Cette dimension collaborative permettra « de mettre plus qu’un orteil dans le métavers ». Elle vise ainsi à faire émerger deux cas d’usage additionnels que sont l’assistance à distance et la collaboration immersive.

La « remote assistance » offrirait des applications dans « tous les secteurs du groupe » avec comme bénéfices une réduction des dépenses et des émissions de CO2 et un raccourcissement du temps opérationnel.

Le collaboratif immersif portera notamment sur la conception des pièces et permettra aux personnes concernées d’interagir via des avatars. Airbus réfléchit aussi à des workshops entre équipes et pour répondre aux demandes internes sur le travail hybride.

Infographie usages immersifs
Usages immersifs

D’autres applications du métavers en approche

Le catalogue d’applications de réalité mixte de l’avionneur porte également sur le recours à la réalité augmentée pour le suivi de procédures de fabrication, par exemple la pose de câblages.

Revues 3D en bureau d’études, rendu HQ pour le marketing dans la personnalisation des produits, simulation de vol militaire (reconstitution en 3D de zones de combats). Les cas d’usage du métavers sont multiples. Airbus souhaite en tirer parti pour fournir une expérience « immersive et augmentée » à ses salariés, ainsi qu’à ses clients.

Côté clients justement, l’immersion permettra de « présenter nos produits, de plus en plus complexes, et de les embarquer dans une expérience autour de ces produits », entrevoit déjà Hervé Routin.

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