Serveurs lames et virtualisation : le duo gagnant ?

Après une bonne année 2006, l'adoption des serveurs lames s'est encore amplifiée tout au long de 2007. Dans les entreprises, on observe aujourd'hui une forte corrélation entre l'adoption des serveurs lames et celle des technologies de virtualisation. Les deux technologies semblent promises à un bel avenir… commun.

Après la progression de 2006, on aurait pu s'attendre à un ralentissement des ventes. Il n'en a rien été. Tout au long de l'année 2007, l'adoption des architectures de serveurs lames s'est poursuivie à un rythme accéléré avec une croissance de plus de 41% des achats d'entreprises entre le dernier trimestre 2006 et le dernier trimestre 2007. Pour la première fois depuis leur apparition, les serveurs lames ont franchi la barre des 10% des serveurs vendus dans le monde. Cette croissance s'explique en partie par le succès même du format, notamment apprécié pour sa densité, mais aussi par le fait que les serveurs lames sont particulièrement adaptés à la virtualisation.

HP séduit plus qu'IBM, Sun et Dell reviennent

Sans surprise, le marché des lames reste dominé par les deux grands spécialistes historiques du genre, HP et IBM, le premier ayant profité de 2007 pour reprendre un net ascendant sur le second. HP termine ainsi l'année 2007 avec plus de 47% des ventes, un record tandis qu'IBM doit se contenter de 32,5%, après avoir assuré plus de 40% des livraisons tout au long de 2006.

parts march constructeurs

2007 aura aussi été marqué par le dynamisme retrouvé de Sun Microsystems. Le constructeur californien, sous la houlette de son employé n°1, Andy Bechtolsheim, a mis à son catalogue pas moins de deux architectures lames différentes (les châssis Blade 6000 et Blade 8000) et a engrangé les commandes au cours du dernier trimestre 2007. Egalement en forme, Bull a réalisé une bonne année 2007 avec ses lames et devrait en toute logique encore améliorer ses ventes du fait de l'adoption de plates-formes calquées sur le BladeCenter H d'IBM. 2008 s'annonce aussi intéressant côté Dell qui propose depuis le début de l'année un châssis entièrement repensé et une offre logicielle dopée par un accord de licence avec Egenera.

Le succès des lames s'étend au monde Unix

Autre facteur dopant pour les serveurs lames, ils ne sont plus limités au seul monde x86. IBM, avec ses lames Power 6 et Cell, HP avec ses lames Itanium, Sun avec ses lames UltraSparc T2 et bientôt T2 +, Bull avec sa lame Power 6 ont tous commencé à susciter l'intérêt de leur base installée Unix, notamment dans le cadre de renouvellements de parcs de serveurs d'entrée de gamme. Les lames ont pour eux une façon de faire baisser les prix et donc d'enrayer la progression des serveurs x86 dans les datacenter.

L'adhésion croissante des utilisateurs aux architectures de serveurs lames est largement liée à leur polyvalence. Si les premières installations se sont cantonnées au domaine du calcul, scientifique ou financier, avec des exemples emblématiques en France comme la Compagnie Générale de Geophysique ou la Société Générale, les lames séduisent aujourd'hui largement pour les grands projets de virtusalisation, qu'il s'agisse de consolidation d'applications ou de centralisation d'applications, à la Citrix Presentation Server.

Comme l'explique Sébastien Truttet, le responsable de l’infrastructure informatique d'Altran, le plus important cabinet de conseil en innovation français, "les serveurs lames ont un vrai intérêt pour les projets de consolidation notamment lorsqu'on les couple à des technologies de virtualisation". Altran a ainsi déployé l'hyperviseur ESX Server de Vmware sur des lames Dell, avant d'étendre leur usage à l'hébergement d'applications Citrix, mais aussi à l'hébergement de la messagerie. L'adéquation des lames aux applications de virtualisation et de consolidation est appuyé par Fabrice Rafart, le responsable infrastructures et production de l'Etablissement français du sang Ile de France, qui a choisi de centraliser toutes ses applications sur une ferme de serveur Citrix motorisée par des serveurs lames HP

Les nouveaux châssis et serveurs lames s'adaptent aux besoins de la virtualisation

Cette évolution doit beaucoup aux améliorations apportées par les constructeurs à leur dernière génération de châssis. Si la première génération privilégiait les critères de densité et d'aptitude à la consolidation physique, les derniers-nés des constructeurs comme le châssis BladeSystem c-Class d'HP, le Blade 6000 de Sun ou le PowerEdge M1000e font la part belle aux capacités d'extensions et aux capacités d'entrées/sorties, nécessaires aux environnements virtualisés. Leurs lames vont ainsi du bi au quadri-processeur, offrent bien plus de connecteurs de mémoire DIMM que les générations antérieures et peuvent accèder à de multiples cartes Ethernet ou Fibre-Channel installées dans le châssis. Les constructeurs soignent aussi l'environnement applicatif de leurs châssis pour les applications de virtualisation. HP a ainsi récemment adapté son outil Insight Manager à la gestion des environnements virtualisés sous Citrix XenServer et VMware ESX Server, tandis que Dell a pris une licence du PAN Manager d'eGenera, un logiciel également utilisé par Fujitsu Siemens pour sa propre offre de serveurs lames.

Vers la virtualisation physique des entrées/sorties

A terme, les capacités des châssis devraient être encore plus séduisantes. Dans le courant 2008 et en 2009, les constructeurs devraient ajouter à leur architecture le support des extensions de virtualisation d'entrées/sorties spécifiées par la norme PCI-Express 2.1 (PCIe IOV). La composante"multi-root" de PCIe IOV permettra notamment à plusieurs serveurs de partager les ressources I/O d'une même carte Ethernet ou Fiber Channel. On pourra ainsi n'installer que quelques cartes 10-gigabit dans un châssis et les faire partager par les 10 ou 12 serveurs lames du châssis.

Au-delà de leurs aptitudes à la virtualisation, les lames continuent à séduire pour leur simplicité de déploiement et leur compacité. L'un de leurs grands atouts réside en effet dans la mutualisation de composants essentiels au sein du châssis, comme l'alimentation ou les éléments d'entrées/sorties. Cette mutualisation permet de simplifier les déploiements et l'administration mais surtout de maximiser la densité en limitant de près de 80% l'espace habituellement consacré à la connectique. Sébastien Truttet, d'Altran, souligne ainsi qu'il effectue "les connexions essentielles (alimentation électrique, stockage en réseau et Ethernet) à la réception du châssis", de façon à ne plus avoir aucune autre connexion à réaliser lors de la mise en œuvre d'une lame serveur dans le châssis. Laurent Roinsard, le responsable du service production du conseil général du Val d'Oise, qui utilise des lames pour sa ferme de serveurs Citrix, met aussi en avant "le gain de place que permettent les serveurs lames et la mutualisation des connexions réseau".

Respecter quelques précautions de base

Bien sûr, tous prennent la précaution de souligner qu'il faut respecter quelques principes de base en ce qui concerne la répartition des serveurs, la préparation de la connectique ou la mise à disposition de ressources de stockage. D'un point de vue physique (alimentation électrique, refroidissement…), la densité des architectures lames nécessite ainsi d'agencer ses serveurs avec prudence dans un datacenter prévu de préférence pour tolérer leurs contraintes spécifiques d'alimentation et de refroidissement. Un rack configuré à plein avec des châssis lames peut ainsi consommer jusqu'à 20 KW/h en crête, soit bien plus que ce qu'un datacenter traditionnel est capable de délivrer. Et, dans de telles conditions, on note l'apparition de points chauds difficile à refroidir correctement, avec les risques que cela suppose en matière de fiabilité des équipements. Souvent, les entreprises choisissent de ne pas remplir leurs racks de serveurs à plein. Ce qui revient alors à diminuer la densité, un des arguments du format. Pour tirer pleinement parti de cet aspect, il n'y a guère d'autre solution que d'exploiter les machines dans des racks refroidis et installés dans un datacenter moderne.

Des architectures indissociables du stockage en réseau

Un autre aspect à prévoir tient au stockage. Les lames n'ont que peu d'espace pour accueillir des disques internes et il faut de préférence les raccorder à un espace de stockage en réseau (iSCSI ou Fibre Channel). Une architecture de stockage qui est de toute façon indispensable pour tirer parti au mieux des capacités de déplacement et de migration des machines virtuelles d'hyperviseurs tels que XenServer ou ESX Server.

Alors que ses concurrents comme IBM ou HP se concentrent sur leurs châssis 9 U ou 7 U et mettent l'accent sur leurs nouveaux châssis compacts pour PME, Sun a récemment pris le contrepied. Avec un châssis impressionnant, en fait une armoire rack complète capable d'accueillir jusqu'à 48 lames serveurs Opteron, Xeon ou UltraSparc de sa série Blade 6000. Le Blade 6048, c'est le nom de cette "armoire-châssis", se destine avant tout aux grandes entreprises et aux centres de calcul, puisqu'il peut contenir jusqu'à 48 lames à lui seul.

Avec ce châssis d'exception, Sun a encore amélioré la densité de son architecture lames, puisque le Blade 6048 peut accueillir huit lames de plus qu'un rack de 42 pouces traditionnel équipé de quatre de ses châssis 10 U Blade 6000. L'astuce ? Le fond de panier du Blade 6048 utilise la pleine largeur de l'armoire ce qui permet de positionner deux lames de plus par étage, dans la largeur de l'armoire. Au total, l'armoire peut accueillir 4 rangées de 12 serveurs, soit un maximum de 192 processeurs quadri-cœurs Xeon ou Opteron ou de 96 processeurs octo-cœurs UltraSparc T2. Le constructeur estime également que le Blade 6048 peut accueillir une puissance de calcul 50% supérieure à celle d'un rack rempli de serveurs Bladesystem c-class d'HP et 70% supérieure à celle d'un rack rempli de serveurs bladecenter H d'IBM. Cette avance dans la course au gigantisme pourrait toutefois n'être que temporaire. Le concept d'armoire de lames aurait en effet séduit IBM. Des rumeurs prêtent à la firme un projet similaire à celui du Blade 6048.

Des capacités d'entrées-sorties hors normes

Parmi les autres bénéfices apportés par l'intégration complète de l'infrastructure lames dans l'armoire, on peut aussi signaler l'impressionnante capacité d'entrées/sorties offerte par le Blade 6048 (près de 30 Tbit agrégés). Ce dernier peut ainsi accueillir jusqu'à 96 modules d'extension PCI express (Gigabit, 10 Gigabit, Fibre Channel ou InfiniBand) et jusqu'à huit modules de commutation Gigabit Ethernet 12 ports

Le tout est alimenté par huit blocs redondants (deux par étagère) d'une puissance de 5600 ou 8400 W chacun et peut être piloté à distance au moyen de quatre modules ILO (Integrated Lights Out). Ces blocs d'alimentation à haut rendement sont d'autant mieux utilisés que chaque étage de l'armoire contient 12 serveurs contre 10 dans une configuration normale de châssis Blade 6000. Notons enfin que l'intégration complète de l'infrastructure lames dans l'armoire permet une réduction du poids, puisqu'un Blade 6048 rempli à pleine capacité pèse 930 Kg. Soit 250 Kg de moins qu'une armoire rack traditionnelle remplie de châssis Blade 6000.

En 2007, Altran a mené un vaste projet de consolidation de son SI, jusqu'alors très fragmenté, au sein d'un datacenter groupe. Dans ce cadre, le cabinet de conseil a redéfini ses standards de serveurs et a notamment sélectionné deux modèles de serveurs lames Dell sur les quatres types de serveurs x86 retenus pour la consolidation de son SI.

"L'un des avantages que l'on a reconnu aux serveurs lames est la réduction de l'encombrement et la simplicité de câblage. Les connexions essentielles (alimentation électrique, stockage en réseau et Ethernet) sont effectuées à la réception du châssis. Aucune autre connexion n'est à réaliser lorsque l'on installe une lame dans le châssis (…).Dans un datacenter, c'est très pratique et efficace par rapport à des serveurs en rack…" explique Sébastien Truttet, le responsable de l’infrastructure informatique d'Altran. Les serveurs lames ont aussi été retenus pour leur bonne adéquation aux applications de virtualisation.

Des lames biens adaptées aux environnements virtualisés

Environ un tiers des lames utilisées par Altran sont virtualisées sous ESX Server et une autre bonne partie est utilisée pour la ferme de serveurs Citrix du cabinet de conseil. "Nous avons retenu les lames pour ces applications car nous pouvons accroître nos capacités bien plus facilement qu'avec des serveurs en rack", souligne Sébastien Truttet. Pour des raisons de prudence, Altran limite à entre 4 et 6 le nombre de machines virtuelles par serveur, chaque serveur étant équipé de 8 Go de mémoire et de deux cartes Fibre Channel 4 Go. "Le seul point limitant avec nos PowerEdge 1955 est qu'il n'y a que deux ports gigabit dans les lames" indique Sébastien Truttet (une limitation levée par le nouveau châssis et les nouvelles lames Dell). Globalement Altran apprécie l'interchangeabilité des lames en environnement virtualisé : "Le fait d'avoir les mêmes serveurs simplifie les opérations sous ESX et en cas de défaillance d'une lame, il est simple de basculer les applications sur une autre lame".

Une solution économique par rapport au rack

Environ 50 % des serveurs exploités par Altran dans son datacenter de Roissy sont aujourd'hui des lames (environ 60 lames Dell PowerEdge). Ce choix a permis au cabinet de conseil de réduire sensiblement ses coûts par rapport à des serveurs rack. Ainsi, selon son responsable de l'infrastructure, le coût d'une architecture à base de lames est inférieur à celui d'une architecture à base de racks dès que la société installe plus de 6 lames dans un châssis prévu pour en contenir 10.

Altran en bref

Activité : conseil en technologies

Siège : Rue Paul Vaillant-Couturier, Levallois Perret

Effectifs (2006) : environ 17 000 salariés

CA 2006 : 1,5 milliard d'euros

Le projet : Consolidation de l'ensemble des applications du SI au sein d'un datacenter groupe, virtualisation de certains environnements et harmonisation des plates-formes serveurs (environ 150 serveurs en production au total)

L'offre des constructeurs

Constructeur Système Châssis / nb de lames max. Principales lames Site Web
IBM BladeCenter H 9U / 14 Xeon, Xeon LV, PowerPC et Cell (1 ou 2 CPU), Opteron (1, 2 ou 4 CPU) Le site Blade de Big Blue
HP BladeSystem c7000 10U / 16 Xeon, Itanium 2 (1 ou 2 CPU), Opteron (1, 2 ou 4 CPU) Le site du châssis c7000 d'HP
Dell PowerEdge M1000e 7U / 10 Xeon (1 ou 2 CPU) /Opteron (1 ou 2 CPU) Le M1000e sur le site de Dell
Bull Bull Blade Châssis 9U / 14 Xeon (1 ou 2 CPU), Power6 Le catalogue de lames de Bull
NEC Computers Sigmablade 6U / 8 Xeon (1 ou 2 CPU) L'offre SigmaBlade
Fujitsu-Siemens Primergy BX600S2 7U /10 Xeon (1 ou 2 CPU), Opteron (1 ou 2 CPU). Possibilité de lier 4 lames Opteron pour former un serveur SMP octo-processeur L'offre lames x86 de FSC
Sun Microsystems Blade 6000 10U / 10 Xeon (2 ou 4 CPU), Opteron (2 ou 4 CPU) Le châssis Blade 6000 de Sun
Sun Microsystems Blade 8000 19U / 10 Xeon (2 ou 4 CPU), Opteron (2 ou 4 CPU) Le châssis Blade 8000 de Sun

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