Smartphones : Microsoft et Nokia, l'alliance de deux géants en proie au doute

Microsoft va porter la version mobile de sa suite Office sur Symbian, l'OS pour smartphones de Nokia. L'alliance signée entre les deux géants doit leur permettre de repousser les menaces qu'ils affrontent sur leurs marchés respectifs. Et souligne, en creux, les difficultés que traverse Windows Mobile, le système d'exploitation pour téléphones mobiles de Microsoft.

08 12nokiae71 lgCe sont deux leaders écornés qui ont scellé hier leur alliance sur le marché des smartphones. Comme annoncé hier matin par le Wall Street Journal, Microsoft et Nokia vont collaborer pour porter les outils bureautiques et de communication du leader mondial du logiciel sur les smartphones Symbian du numéro un des téléphones mobiles. Malgré les positions de ses signataires, l'alliance apparaît surtout comme un mouvement défensif face aux menaces qu'affrontent ces deux acteurs installés.

En difficulté sur le marché des OS pour téléphones mobiles - où Windows Mobile ne s'octroie plus que 9 % du marché au second trimestre 2009 contre 12 % un an plus tôt -, Microsoft doit aussi faire face à la montée en puissance d'offres bureautiques hébergées et gratuites, émanant notamment de Google, venant concurrencer l'une de ses principales vaches à lait, la suite Office. En portant cette dernière sur un autre OS mobile que Windows Mobile, le premier éditeur mondial tente de barrer la route à Google, qui mène l'offensive sur le terrain des smartphones avec son OS Android couplé à son offre bureautique hébergée. Un mouvement complémentaire de celui annoncé en juillet et consistant à lancer une version Web d'Office. Et tant s'il s'agit au passage de déshabiller un peu Windows Mobile, seul jusqu'à présent à offrir un environnement parfaitement cohérent avec l'offre de l'éditeur à destination des entreprises.

Symbian, un OS objet de spéculations

De son côté, Nokia trouve en Microsoft un allié pour soutenir sa plate-forme Symbian à l'heure où celle-ci suscite de plus en plus d'interrogations. Certes toujours archi-leader du marché des smartphones, le segment de la téléphonie mobile en pleine explosion (+27 % en un an), le géant finlandais perd du terrain face à RIM (le concepteur des Blackberry) et Apple. La part de marché du nordique est ainsi passée de 47,4 à 45 % en un an, selon les derniers chiffres de Gartner, tandis que RIM progressait de plus d'un point (à 18,7 %) et que Apple en gagnait plus de 10 (à 13,3 %). L'arrivée des outils bureautiques et de communication de Microsoft fournit à Nokia une arme supplémentaire, particulièrement pour contrer RIM en environnement professionnel. Cet accord "va rendre les terminaux E series (les premières machines Nokia concernées par l'accord, ndlr) plus intéressantes pour les entreprises utilisant les technologies Microsoft", commente Nick Jones, un analyste du cabinet Gartner.

Aveu de faiblesse pour Windows Mobile
Mettre Office sur la plate-forme rivale de Nokia apparaît comme un aveu des difficultés que traverse Windows Mobile, estime Carolina Milanesi, analyste au Gartner dans les colonnes du Financial Times. D'ailleurs Stephen Elop, le président de la division professionnelle de Microsoft qui a signé l'accord avec Nokia, a admis que cette signature représentait un mouvement stratégique d'importance pour l'éditeur tout en assurant que Windows Mobile restait un investissement clef pour le numéro un du logiciel.
Une assurance qui, si elle ne constitue pas une surprise en termes de communication, pourrait bien être mise à mal dans quelques mois. Nick Jones, analyste du Gartner, estime, lui, que Windows Mobile 7 pourrait bien être la dernière version majeure de l'OS, le premier éditeur mondial ne pouvant se contenter longtemps de la quatrième place qu'occupe actuellement son système mobile malgré de nombreuses années d'investissement. A ce titre, l'arrivée des outils de productivité de Microsoft sur Symbian pourrait constituer une solution de repli pour le parc d'utilisateurs professionnels de Windows Mobile.
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Reste que l'accord n'écarte pas les rumeurs qui entourent l'avenir de la plate-forme Symbian. Dans un article datant d'hier, le Financial Times Deutschland expliquait, citant des sources anonymes, que Nokia envisagerait de remplacer peu à peu cet OS par Maemo, sa plate-forme mobile basée sur Linux, sur le segment des terminaux haut de gamme. De facto, l'architecture de Symbian la rend peu populaire auprès des développeurs, qui lui préfèrent l'environnement iPhone, Java ou Android. Nokia a toutefois immédiatement démenti toute volonté de se détourner de son OS phare. En juin, la société a annoncé vouloir placer son OS mobile en Open Source afin d'appâter un communauté de développeurs plus importante.

Les terminaux Symbian administrés dans System Center

Concrètement, l'accord prévoit le portage sur Symbian des versions mobiles de la suite Office (Word, Excel, PowerPoint, OneNote), celui des outils de collaboration et de messagerie instantanée (Office Communicator Mobile), l'accès aux portails bâtis avec SharePoint et l'intégration des terminaux Symbian dans l'outil d'administration du numéro un du logiciel, System Center. "C'est une bonne  nouvelle pour les entreprises qui s'inquiétaient de l'avenir de Windows Mobile, maintenant elles disposent d'une alternative", signale Nick Jones, du Gartner. Les premiers fruits de cet accord seront disponibles l'année prochaine, d'abord sur les terminaux E series de Nokia. Le communiqué émis hier par les deux sociétés mentionne toutefois, sans plus de précision, qu'il ne s'agit là que d'un premier pas.

S'il est symbolique - avec le portage d'Office sur un OS mobile non-Microsoft -, cet accord apparaît comme une extension d'un premier partenariat signé l'année dernière entre les deux sociétés. Ce dernier facilitait l'accès aux messageries Microsoft Exchange depuis les terminaux du Finlandais. En juin, Nokia s'est également rapproché d'Intel pour développer de futurs terminaux mobiles à la frontière entre informatique et téléphonie.

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