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Données agricoles : les ambitions européennes d’API-AGRO

API-AGRO est l’éditeur français d’une plateforme d’échange de données agricoles entre professionnels de la filière. Il compte bien se développer en Europe en s’appuyant sur la stratégie numérique exprimée par la Commission européenne et ses partenaires.

À la fin du mois de février, la Commission européenne a annoncé sa volonté de mettre en place une plateforme d’échange de données industrielles sectorisées. L’autorité se donnait alors deux ans pour déployer une plateforme cloud hybride avec un budget de deux milliards d’euros. Parmi les secteurs phares privilégiés par la CE, l’agriculture prend une place de choix. L’objectif est de multiplier le partage des données afin de favoriser les échanges économiques, et faire avancer la recherche à partir de données interopérables. Ces échanges seraient sécurisés et respecteraient le consentement des parties.

« Nous nous portons candidat auprès de la Commission européenne, pour que notre initiative soutenue par nos partenaires soit reconnue comme compatible avec les recommandations issues de sa stratégie “Data” », affirme Sébastien Picardat, directeur général d’API-AGRO.

« Dans sa stratégie numérique, la Commission européenne a identifié deux enjeux : la sécurisation du partage des données, avec la gestion du consentement et de l’identité numérique, et la mise en place d’espaces communs d’échange de données pour le secteur agricole. Ces deux enjeux-là nous les adressons avec le projet Agdatahub », ajoute-t-il.

Agdatahub, une plateforme d’échange de données vouée à s’exporter

API-AGRO est une société à l’initiative des Chambres d’Agriculture et des Instituts Techniques Agricoles. Elle a développé AgdataHub, une plateforme SaaS d’échange de données et de service réservée aux professionnels du secteur agricole. Cette solution est hébergée sur le cloud souverain de la filiale de Dassault Systèmes et basée sur les technologies de Data Exchange de Dawex.

Techniquement, les données sont exposées par API via une interface aux utilisateurs. Ils peuvent les télécharger s’ils ont le bon niveau d’accès. Les jeux de données sont partagés, monétisés selon les modalités des entreprises ou des institutions qui en sont propriétaires. Ces données peuvent être également ouvertes, une fonctionnalité qui sera disponible à la première moitié de l’année 2020.

La société vise les professionnels agtech, les institutionnels, les chercheurs, les semenciers, les fabricants de produits phytosanitaires et de matériels agricoles. Elle défend une bonne connaissance de la filière parce qu’elle compte parmi ses partenaires la FNSEA, le premier syndicat agricole en France (plus de 212 000 adhérents). Les utilisateurs de la plateforme peuvent se servir des données échangées pour concevoir des applications pour les exploitants agricoles.

« Nous nous sommes rendu compte de l’importance du stockage souverain et du consentement pour les producteurs de données, les agriculteurs. »
Sébastien PicardatDG, API-AGRO

« Lors du développement de notre projet, nous nous sommes rendu compte de l’importance du stockage souverain et du consentement pour les producteurs de données, les agriculteurs », explique Sébastien Picardat. « C’est pourquoi nous avons choisi 3DS Outscale comme fournisseur de cloud et OBS (Orange Business Services) pour assurer le routage du consentement ».

Pour apporter cette brique, la société s’est appuyée sur l’initiative Data-Agri, portée par la FNSEA et les Jeunes Agriculteurs. Cette charte adapte les principes du RGPD à l’usage des agriculteurs. Elle définit 13 principes qui reposent sur des notions de lisibilité, de transparence, de sécurité et de maîtrise des données.

Comme dans d’autres secteurs, les données agricoles sont émises et collectées sous divers formats, selon leur provenance : d’une machine, d’un satellite, d’un capteur de température ou d’une station météorologique. Cette question de l’interopérabilité, API-AGRO l’a confié à GS1 France, l’inventeur du code-barres, qui a développé un modèle de standardisation des données.

« Nous avons la capacité de monter en puissance avec nos partenaires. Agdatahub est une plateforme issue d’une approche sectorielle qui peut être déployée à tout moment sur l’ensemble des états membres de l’Union européenne », affirme Sébastien Picardat. « Nous sommes déjà présents aux Pays-Bas, en Belgique, en Allemagne, en Grèce et en Serbie dans le cadre de projet de recherche ».

Selon David Chassan, directeur de la communication chez 3DS Outscale, le fournisseur de cloud français a les capacités d’assurer les déploiements nécessaires dans les différents pays européens. En Europe, ses services sont disponibles depuis deux régions cloud (dont l’une est réservée aux solutions gouvernementales) reposant sur sept datacenters localisés en France (14 au total). Pour rappel, la filiale de Dassault Systèmes a obtenu la certification de sécurité SecNumCloud de la part de l’ANSSI en décembre 2019.

Une première phase de déploiement à consolider en France

« Le véritable enjeu, c’est d’ouvrir d’autres pays d’ici à trois ans dans une logique d’extension à l’échelle européenne ».
Sébastien PicardatAPI-AGRI

API-Agro a pour l’instant une envergure « nationale et régionale en France ». La société est en train de construire un réseau de partenaires composé d’ESN et de pôles de compétitivité. « Le véritable enjeu, c’est d’ouvrir d’autres pays d’ici à trois ans dans une logique d’extension à l’échelle européenne ».

En fin d’année dernière, API-AGRO présentait le volet open data d’Agdatahub, un développement issu des avancées de son partenaire Dawex. « Cela permet d’avancer sur des projets de recherche agronomique ». En 2020, API-AGRO va mettre à disposition son infrastructure à trois projets issus des territoires d’innovation numérique désignés par le chef du gouvernement : Occitanum (Occitanie), Vitagora (Bourgogne – Franche-Comté), un projet avec la société Ouest Élevage (Bretagne) et un autre en Auvergne porté par Limagrain, un important semencier français. La solution envisagée avec Limagrain vise à récolter et à échanger des données issues de l’IoT (entre autres) entre grands groupes industriels. « Notre but c’est de déployer notre infrastructure de stockage, d'échange de données et consentement dans des projets collectifs en s’appuyant sur une seule méthode » prévoit le directeur général d’API-AGRO.

API-AGRO a identifié dix comptes clés qui doivent soutenir la croissance de la plateforme en proposant leurs jeux de données. En mars, le ministère de l’Agriculture devait diffuser sur Agdatahub des données publiques comme la carte des sols, des données météo, le registre parcellaire anonymisé (type de cultures, données satellites, mesures phytosanitaires, liste des exploitations biologiques, etc.). Ce projet sera sans doute décalé en raison de la crise sanitaire.

Le modèle économique est divisé en quatre offres (open data, basique, standard, premium). API-AGRO veut attirer plus de 100 abonnés BtoB (instituts de recherche, chambres d’agriculture, exploitations, entreprises, etc.) d’ici la fin de l’année 2020 et plus de 250 à la fin de l’année 2022. « Le nombre d’utilisateurs physiques est beaucoup plus important », explique Sébastien Picardat.

La société veut également router le consentement de 50 000 agriculteurs d’ici à la fin de l’année 2022. Cette phase passe par des partenariats avec les chambres d’agriculture, des ESN comme SMAG ou ISAGRI. « Nous venons apporter un routeur de référence pour le secteur » vante le directeur général d’API-AGRO.

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