Stockage en cloud : Leviia se pose en concurrent français de Wasabi

La startup, fondée par deux experts de Ceph, a conçu une offre de stockage objet en ligne qui coûte moins de 6 €/mois, tous frais compris, et qui est exclusivement hébergée dans les datacenters français d’OVHcloud.

Un tarif record de 5,99 € par To et par mois pour du stockage objet S3 en cloud, mais sur le territoire français, sans frais en plus pour rapatrier les données ni pour les interroger. Tel est l’argument commercial d’une jeune société française, Leviia, créée en 2020 par deux frères, ex-administrateurs système de datacenters chez plusieurs grands groupes, dont la BNP.

Après s’être essayés au stockage en cloud avec un service de partage de fichiers pour le grand public et les TPE, Arnaud et William Méauzoone (respectivement à gauche et à droite sur la photo) ambitionnent désormais de proposer aux entreprises une offre en mode objet – compatible avec tous les logiciels de sauvegarde et les applications d’analytique – qui soit à la fois plus souveraine, plus robuste et surtout moins chère que les autres services S3 du marché.

Bien moins cher que les hyperscalers, plus souverain que Wasabi

Si l’on se réfère à la calculatrice du cabinet d’études Cloud Mercato, un stockage de 100 To coûte chez AWS 2 319,20 €/mois, auxquels il faut ajouter 8 093,47 € quand on récupère sur site ces 100 To (dans le cas d’une restauration après une cyberattaque par exemple), auxquels on ajoutera encore 3 975,04 € à chaque fois que l’on aura interrogé ne serait-ce que 10 Go de ces données via des API (applications analytiques, sites web, etc.). Dans cet exemple, la facture mensuelle chez AWS peut varier d’un peu plus de 2 300 € à près de 14 400 €. Pour une même quantité de données (et quel qu’en soit l’usage), la facture mensuelle de Leviia serait de 599 €.

« Bien entendu que nous payons nous aussi des frais de réseau et des frais de serveurs pour que notre service fonctionne. Il n’empêche : nous maintenons que les géants du cloud font de très grandes marges sur leurs offres de stockage objet. Nos tarifs sont calculés au plus juste par rapport aux coûts réels de l’infrastructure utilisée et ils nous permettent encore de faire de la marge », assure William Méauzoone.

Dans les faits, le stockage objet en cloud de Leviia se compare plutôt à celui de l’Américain Wasabi, dont le tarif de 5,99 $/mois est équivalent. Ces deux services ont la contrainte de ne pouvoir être interrogés que par des comptes utilisateurs privés. Il n’est pas possible de les utiliser par exemple pour fournir simultanément du contenu à une myriade d’instances d’un site web public qui multiplierait d’autant les accès parallèles que sa fréquentation serait élevée.

« L’offre d’un stockage S3 pour diffuser des données sur le web viendra dans un troisième temps. Il sera alors même possible de créer des sites web statiques [non applicatifs, N.D.R.] sans même avoir besoin de faire de l’administration système pour déployer des instances selon l’activité. Nous gérerons la montée en charge au niveau du stockage objet. Techniquement, nous savons déjà la faire, mais cette offre n’est pas encore au catalogue », précise Arnaud Méauzoone.

Une solution basée sur Ceph et sur des serveurs Bare metal d’OVHcloud

Reste à savoir ce que vaut réellement l’offre de Leviia. William Méauzoone accepte de lever le capot pour répondre au MagIT : « nos services de stockage en ligne reposent sur des serveurs en bare metal que nous louons chez OVHcloud et, ce, sur leurs trois sites français. Les données écrites sur un site sont répliquées sur les trois autres, par Erasure coding, ce qui nous permet de garantir que les données survivront même en cas de désastre sur un site. »

Arnaud Méauzoone donne plus de détails techniques : « notre technologie est basée sur le système de stockage Ceph, dont nous sommes devenus des spécialistes lorsque nous étions administrateurs système pour de grands groupes français. Nous greffons dessus un accès S3 pour notre stockage objet et (ce qui est plus complexe à faire) le logiciel Open source Nextcloud pour notre offre initiale de partage de fichiers. »

Selon les explications que LeMagIT a pu obtenir, les deux services nécessitent différentes configurations de serveurs chez OVHcloud. Notamment, Leviia évalue la fraîcheur des données qui sont stockées sur son service et les répartit sur des SSD plus ou moins rapides selon l’intensité des accès utilisateurs. On notera que le service de partage de fichiers est plus cher que celui de stockage objet – il est facturé tous les mois 2,40 € pour 100 Go aux particuliers et 50 € HT/mois pour 1 To, 5 utilisateurs et 180 jours de sauvegardes automatiques. En cause, Nextcloud, véritable plateforme collaborative, nécessite plus de puissance de calcul et de modules fonctionnels (bases MariaDB…).

Concernant Nextcloud, Leviia se targue d’être l’un de ses plus gros utilisateurs et même de contribuer à son développement. « Nous sommes par exemple les seuls à pouvoir tester pour eux des fonctionnalités avec 2 000 utilisateurs connectés en même temps sur un même compte », se félicite William Méauzoone.

Déjà 10 000 clients

Mieux : c’est justement parce que Leviia utilise Nextcloud que la jeune entreprise a pu séduire une multitude d’acteurs du secteur public : collectivités locales, ministères… « Entre le grand public plus les TPE, le secteur public et un nombre croissant de PME comme de grandes entreprises, notre service de partage de fichiers compte aujourd’hui 10 000 clients, soit 300 000 utilisateurs réguliers », ajoute William Méauzoone. À date, le stockage géré par Leviia chez OVHcloud représenterait « plusieurs dizaines de Po. »

Leviia veut croire que tous ses clients professionnels actuels adopteront son système de stockage objet, ne serait-ce que pour héberger leurs sauvegardes. William Méauzoone fait remarquer que ce service a une caractéristique que Wasabi ne peut offrir : il est souverain, dans le sens où les données sont intégralement situées sur le territoire français, dans les datacenters du Français OVHcloud.

Pour l’heure, le stockage objet de Leviia est déjà certifié par Atempo pour les opérations de sauvegardes (y compris immuables), de restauration et de PRA réalisées par ses logiciels. Les solutions de Veeam sont en cours de certification. D’autres éditeurs devraient suivre.  

Le choix d’OVHcloud peut surprendre, dans le sens où la startup est en partie financée par la holding de Xavier Niel, lequel est actionnaire du concurrent Scaleway. « Nous avons évalué tous les hébergeurs de cloud français. Le fait est que seul OVHcloud était en mesure de nous garantir une connexion en 50 Gbit/s entre trois sites éloignés de plus de cent kilomètres, une condition essentielle pour permettre à notre Erasure coding de répliquer nos données en temps réel », conclut William Méauzoone.

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