5G privée : Rapid.Space la rend aussi simple que du Wifi
Le fournisseur français vend désormais un package qui offre une couverture mobile privée, dont le rayon dépend du type de fréquences choisi par l’utilisateur. Ses équipements sont plus légers que ceux fournis par les opérateurs.
De la 5G privée aussi facile à installer qu’une borne Wifi. Tel est le slogan que le Français Rapid.Space a trouvé pour promouvoir la dernière version de sa solution ORS, désormais commercialisée dans une boîte aussi pimpante qu’une imprimante HP et, surtout, a priori enfin vendue à des milliers d’exemplaires en France.
Précisons : ces ventes étaient inespérées. Cela faisait des années que Rapid.Space bataillait contre les quatre opérateurs nationaux qui verrouillaient toutes ses opportunités, contre une administration peu pressée de faciliter l’achat des bonnes fréquences et contre des décideurs trop frileux pour conclure un contrat avec des acteurs alternatifs.
« Je ne pourrai pas dévoiler le nom du client qui nous achète quelques milliers d’unités avant avril, car si son nom paraît dans la presse, les opérateurs nationaux vont encore l’appeler pour le convaincre de plutôt travailler avec eux », lance Jean-Paul Smet, le PDG de Rapid.Space (en photo en haut de cet article), lors d’une rencontre sur le récent salon MWC 2025, qui vient de se tenir à Barcelone.
« Mais la situation est la suivante : il existe une opportunité de déployer de la 5G privée dans tous les cas d’usage qui impliquaient jusqu’ici des talkies-walkies. Parmi, ces cas d’usage, il y a toutes les brigades d’intervention – de police, de gendarmerie, de pompiers, de secours – à qui le ministère de l’Intérieur avait promis le RRF [Réseau Radio du Futur, N.D.R.]. En vain. »
« Ces gens se retrouvent aujourd’hui avec un Wifi transportable bien moins efficace que la 5G privée envisagée au départ. 5G privée que le prestataire choisi par l’État a été tout bonnement incapable de fournir. Donc, ils viennent nous voir », raconte Jean-Paul Smet.
La 5G privée, un Wifi bien meilleur
L’enjeu de la 5G privée est de fournir un réseau sans fil à des appareils dans un périmètre donné, comme le Wifi. Mais à la différence de celui-ci, la 5G privée a le mérite d’être bien plus fiable, d’offrir une couverture plus étendue et de se montrer plus sécurisée. Il existe à ce jour deux cas d’usage, l’un fixe et l’autre mobile.
Le cas d’usage fixe correspond au déploiement d’une seule borne 5G, montée sur un mur ou un pylône, pour couvrir tout un site industriel ou agricole. La couverture permet ici de communiquer avec des machines-outils, des robots, des drones, des caméras. La 5G est bien plus adaptée dans ce cas que le Wifi, car celui-ci nécessiterait d’installer un plus grand nombre de bornes, son signal aurait du mal à traverser les obstacles en métal des installations et il perdrait suffisamment de paquets pour faire échouer une opération devant se dérouler en temps réel.
Le cas d’usage mobile, où l’antenne 5G est montée sur le toit du véhicule d’intervention, assure un réseau de communication privé aux membres d’une équipe qui se déploient sur une zone alentour. Au-delà de la fonction talkie-walkie – par exemple un bouton permet à quelqu’un de parler à tout le monde en même temps, ce que ne peut pas de faire la téléphonie standard –, les smartphones de chacun servent aussi à partager des images de manière totalement étanche. Il est aussi possible de piloter depuis le véhicule d’intervention des robots de reconnaissance.
Plusieurs implémentations de la 5G privée sont possibles. Orange, SFR, Bouygues et Free proposent par défaut de louer une bande passante privée sur leurs antennes publiques. Mais encore faut-il qu’elles existent à l’endroit voulu, qu’elles ne soient pas déjà saturées par les abonnés traditionnels et que le client accepte de payer tous les mois cette 5G privée sous la forme d’un forfait.
Contourner la problématique des fréquences
La solution ORS de Rapid.Space se basait historiquement en France sur la bande 38, à savoir la plage de fréquences comprise entre 2570 et 2620 MHz et sur laquelle peuvent communiquer tous les appareils compatibles avec la 4G. Le problème est que l’utilisation de cette bande de fréquence passe par l’achat d’une licence d’utilisation sur une parcelle de terrain donnée et que la démarche, organisée par l’Arcep, le gendarme des télécoms, est décourageante.
Surtout, pour chacun des dossiers ouverts, l’Arcep accorde en priorité la licence d’exploitation à l’un des quatre opérateurs télécoms nationaux, s’il en fait la demande. En clair, Rapid.Space invitait ses prospects à faire la démarche et, une fois celle-ci initiée, un opérateur qui avait vent du projet pouvait venir préempter ladite licence pour se substituer à Rapid.Space.
Dans ce cas, l’opérateur propose généralement au client de lui installer des équipements télécom traditionnels, plus lourds, plus chers, le plus souvent de marque Nokia. Jean-Paul Smet se désole que les opérateurs n’aient jamais préféré lui acheter de boîtiers ORS.
« L’amplificateur radio est la seconde petite carte électronique à l’intérieur de nos solutions. Il nous suffit de la changer pour que le boîtier ORS communique sur la plage de fréquence que vous souhaitez. »
Jean-Paul SmetPDG, Rapid.Space
Dans sa version « boîte prête à l’emploi », Rapid.Space a trouvé une parade. La borne ORS communique sur la plage de fréquences qui va de 1880 à 1900 MHz, celle des téléphones sans-fil d’intérieur, dits DECT. Elle est libre d’accès, il n’y a aucune démarche à faire pour l’utiliser. Évidemment, cette version prête à l’emploi est livrée avec cinq téléphones Android compatibles avec les fréquences du DECT. De plus, le DECT est limité à un rayon de quelques dizaines de mètres, contre plusieurs kilomètres en bande 38.
« L’amplificateur radio est la seconde petite carte électronique à l’intérieur de nos solutions. Il nous suffit de la changer pour que le boîtier ORS communique sur la plage de fréquence que vous souhaitez. Le DECT, si vous voulez être totalement libre. La bande 38 si vous achetez une licence auprès de l’Arcep. Et même la bande n77, qui correspond au spectre 3700 à 3800 MHz et qui est utilisable par les appareils 5G », explique Jean-Paul Smet.
En l’occurrence, la bande n77 ne sera pas commercialisée par l’Arcep avant la fin de l’année, mais le gendarme des télécoms autorise dès à présent les entreprises à l’utiliser pour mener des tests de 5G privée. Moyennant, encore une fois, une démarche bureaucratique.
Les bandes DECT, 38 et n77 ont le mérite d’être utilisables partout en Europe. Mais sous des conditions qui varient d’un État membre à l’autre. A priori, c’est en Allemagne que l’accès à une licence est le plus simple, le gouvernement ayant mis en place un portail web qui sert à la fois à faire la demande et à régler l’achat.
Un acteur français qui vend surtout à l’étranger
De fait, c’est surtout au Moyen-Orient et en Asie que l’activité de Rapid.Space s’est jusqu’ici déployée. Le fabricant français y a trouvé l’opportunité de vendre ses boîtiers radio aux opérateurs locaux.
« Nos solutions n’ont pas besoin de puces spécialisées. Elles fonctionnent grâce à des logiciels Open source mis au point en France, qui sont exécutés par de simples processeurs Intel. »
Jean-Paul SmetPDG, Rapid.Space
« En France, nous proposons de petits boîtiers pour la 5G privée. Mais la même technologie nous sert à faire des stations de base très peu chères, que les opérateurs peuvent facilement installer dans les campagnes pour étendre leur réseau mobile. Et, là, nous parlons de ventes qui peuvent se compter en dizaines de milliers d’exemplaires », indique Jean-Paul Smet.
« Encore une fois, nous sommes beaucoup moins chers que les équipementiers traditionnels, car nos solutions n’ont pas besoin de puces spécialisées. Elles fonctionnent grâce à des logiciels Open source mis au point en France, qui sont exécutés par de simples processeurs Intel », ajoute-t-il.
En l’occurrence, les boîtiers radio de Rapid.Space reposent sur une petite carte électronique qui coûte moins de 100 € à fabriquer. « Il s’agit juste d’une carte avec un processeur Intel Atom qui calcule à la fois la forme des ondes, via les algorithmes Open source d’Amarisoft, et exécute tous les services de communication du cœur de réseau. Nos concurrents proposent des équipements propriétaires à base de puces spécialisées Qualcomm ou NXP bien plus chères » dit Jean-Paul Smet.