Stockage en cloud : Lucidity a un moyen pour en réduire les coûts

La startup américaine a mis au point un agent, qui surveille l’utilisation des disques virtuels chez les hyperscalers, et un service SaaS, qui calcule le bon moment d’en ajouter ou d’en retirer. Elle propose aussi un outil qui optimise le tiering.

Lucidity propose une plateforme d’optimisation du stockage en cloud, qui automatise l’extension et la diminution des volumes en mode bloc en observant en temps réel les besoins des applications. Outre alléger considérablement la charge de travail des équipes IT, cette solution contribuerait à réduire drastiquement les dépenses.

Le système se compose d’une couche dite NoOps qui fonctionne de manière autonome et qui s’intègre aux applications et environnements existants, sans nécessiter la moindre intervention dans leur code. À cela s’ajoutent deux logiciels d’administration : Autoscaler pour le dimensionnement des volumes et Lumen pour le tiering, à savoir la répartition automatique des données entre différentes classes de stockage, selon qu’elles nécessitent plus de performances ou méritent moins de coûts opérationnels.

« Pour respecter les objectifs de performance et anticiper les pics de demande, les entreprises sur-provisionnent souvent leur stockage cloud. »
Vatsal RastogiCofondateur, Lucidity

« Le cloud public promet de l’élasticité, mais diminuer la quantité de ressources de stockage en mode bloc dans les services en ligne reste un processus complexe, manuel et sujet aux erreurs à grande échelle ; j’en ai fait l’expérience en tant qu’ingénieur logiciel chez Swiggy et Microsoft », commence Vatsal Rastogi, cofondateur de Lucidity, que LeMagIT a pu rencontrer lors d’un événement IT Press Tour consacré aux acteurs de la Silicon Valley qui innovent dans le stockage.

« Pour respecter les objectifs de performance et anticiper les pics de demande, les entreprises sur-provisionnent souvent leur stockage cloud. Cependant, le redimensionnement du stockage est fastidieux, impacte les performances, risque de causer des temps d’arrêt et est donc rarement réalisé. Ce qui entraîne une sous-utilisation de plus de 50 %, soit un gaspillage estimé à 21,5 milliards de dollars de dépenses en stockage cloud en bloc d’ici 2028. »

« Le redimensionnement du stockage est fastidieux […]. Ce qui entraîne [...] un gaspillage estimé à 21,5 milliards de dollars de dépenses en stockage cloud en bloc d’ici 2028. »
Vatsal RastogiCofondateur, Lucidity

« Nous avons fondé Lucidity pour éliminer ces complexités et aider les entreprises à gérer leur stockage cloud de manière fluide, à respecter leurs SLA et à réduire considérablement leurs coûts », argumente-t-il.

Créée voici quatre ans par deux ingénieurs indiens basés aux États-Unis, Vastal Rastogi et Nithan Badhauria, Lucidity a pour objectif d’optimiser l’usage des disques virtuels que proposent GCP, AWS et Azure pour accompagner le fonctionnement de leurs machines virtuelles, au sein desquelles s’exécutent les applications des entreprises.

La startup a levé au début de l’année 21 millions de dollars en série A auprès de Westbridge Capital, après une première levée de 10 millions auprès de AlphaWave. Depuis sa création, l’éditeur revendique une croissance de 400 % par an et emploie aujourd’hui une centaine de personnes à Boston, Bangalore, Londres et Abu Dhabi.

Économiser 50 % des coûts du stockage cloud en mode bloc

Vatsal Rastogi estime que chaque fournisseur de cloud a ses propres spécificités, ses propres complexités et ses propres limites en matière de coût, de performance, de disponibilité, de sécurité et, enfin, de gouvernance. Dans ce contexte, redimensionner les volumes, gérer différents niveaux de stockage (ou tiering), ou encore définir des règles selon la latence virerait au chemin de croix pour les équipes IT.

« Prenons l’exemple de l’un de nos plus gros clients : il dispose de près de 60 000 disques virtuels et exécute environ 200 applications chez deux fournisseurs de services cloud. Jongler avec tous ces éléments, sur une multitude de disques et d’applications, et les ajuster manuellement est si difficile qu’il s’est retrouvé avec des applications de 30 % trop lentes et des dépenses additionnelles pour des interventions manuelles », poursuit M. Rastogi.

Pour parer à ces difficultés, les clients des services cloud auraient tendance à sur-provisionner les ressources en ligne. « Mais cela signifie que les entreprises paient généralement trois fois plus cher que ce qu’elles utilisent réellement. Et c’est le problème que nous essayons de résoudre avec Lucidity. »

Il explique que ses logiciels rendent la gestion de la capacité dynamique. « Plus votre consommation de données augmente, plus la capacité augmente. Et lorsque la consommation de données diminue, la capacité diminue également. En pratique, le client dont je viens de vous parler n’utilisait que 30 % des ressources qu’il achetait avant de travailler avec nos solutions. Désormais il les utilise à 80 %. Cela a entraîné une réduction d’environ 50 % des dépenses liées au stockage en bloc ».

Un agent qui sonde l’activité, un service SaaS qui calcule quand changer d’échelle

Le fonctionnement en toute autonomie est présenté comme le point fort des solutions de Lucidity. « No-Ops garantit qu’une fois intégrée à la plateforme Lucidity, l’entreprise cliente n’a plus à se soucier de la gestion de la capacité et, dans la plupart des cas, n’éprouve même plus le besoin d’aller sur le tableau de bord du stockage que fournit l’hébergeur cloud », plaide M. Rastogi.

No-Ops repose sur un agent, à savoir un processus d’arrière-plan léger qui s’exécute sur chaque machine virtuelle (VM) ayant accès à un certain nombre de disques virtuels. L’enjeu est d’utiliser le bon nombre de disques virtuels, ce qui dépend de la charge des applications, laquelle varie sans cesse.

Cet agent interagit avec le système d’exploitation de la VM et collabore avec son noyau pour surveiller activement les métriques de stockage. Métriques qu’il transmet au service SaaS Autoscaler, le cerveau du système. Ce service interprète ces métriques et calcule le moment opportun pour la mise à l’échelle. Techniquement, la mise à l’échelle est ici le fait de monter ou démonter des unités de disques.

Lorsqu’Autoscaler estime qu’il est temps d’augmenter ou de réduire le stockage utilisé, il transmet la commande de mise à l’échelle à l’agent, qui demande au système d’exploitation de l’exécuter. Ainsi, dès qu’une réduction de la capacité de stockage est réalisée, elle est restituée au fournisseur de cloud, qui n’a plus à la facturer. Les économies sont donc immédiates, ou du moins sont actives au bout d’environ 90 secondes, selon Lucidity.

De même, il est possible d’effectuer l’opération inverse pour éviter une situation de saturation.

Afin de convaincre de la pertinence de sa solution, Lucidity propose un outil d’évaluation gratuit, qui répond exactement à la question du potentiel retour sur investissement. L’éditeur tient à souligner qu’il n’a aucune connaissance des données qui transitent sur les différents systèmes de stockage où l’agent est installé.

Gérer plus finement le tiering

Forte des premiers succès, l’entreprise s’est employée à aller au-delà du redimensionnement automatique. Son nouveau produit, Lumen, est conçu pour optimiser le tiering. En effet, il existe en cloud plusieurs niveaux de stockage selon les besoins et les applications.

Très souvent, les clients choisissent les tiering les plus performants, donc les plus chers, alors que cela n’est pas forcément nécessaire. Il convient de préciser que le changement de tiering s’accompagne d’un arrêt du service. Lumen est conçu pour analyser avec précision la répartition et proposer des améliorations afin de réduire les temps d’arrêt, les goulots d’étranglement, le placement des données sur les disques les plus adaptés.

« Au-delà de la récupération des dépenses inutiles, l’objectif de Lumen est d’améliorer l’efficacité [...] des équipes IT, grâce à un moyen très simple de dimensionner ou de hiérarchiser leurs instances de stockage. »
Vatsal RastogiCofondateur, Lucidity

Tout ceci s’effectue depuis un tableau de bord à partir duquel les utilisateurs visualisent l’efficacité du stockage par rapport au nombre de disques. Ils prévisualisent s’ils le désirent le bénéfice de déplacer les données vers des unités ayant des niveaux de performance et de coût plus adaptés. Et, ce, sans aucune interruption de service ni aucun redémarrage.

« Il existe dans l’interface sur un outil de recommandations qui liste les optimisations techniques possibles et le retour sur investissement. Pour déterminer ces optimisations, nous prenons en compte environ 90 jours d’accès aux données », détaille M. Rastogi.

« Avant de prendre une décision, les administrateurs auront le moyen de consulter les tendances d’utilisation, de constater leur impact sur les charges de travail. Et s’ils planifient une optimisation, il suffit d’un clic. Au-delà de la récupération des dépenses inutiles, l’objectif de Lumen est véritablement d’améliorer l’efficacité opérationnelle des équipes IT, grâce à un moyen très simple de dimensionner ou de hiérarchiser leurs instances de stockage », vante-t-il.

Payer pour ce qui est consommé

Lucidity a choisi un modèle simple et indirect (via un réseau de partenaires) basé sur la capacité de stockage gérée en cloud. Cela signifie qu’un client qui avait préalablement provisionné 1 Po – et qui, après installation d’Autoscaler, n’utilise plus que 300 To – sera facturé sur 300 To. Concernant Lumen, le principe devrait être le même, mais n’est pas encore définitif, car le produit a été lancé voici quelques jours seulement.

Pour des volumes importants, Lucidity proposera des remises sur ce tarif. « Cependant, même si nos clients sont venus à nous pour réaliser des économies, ils restent surtout pour l’automatisation », se gargarisent les fondateurs. Cette phrase est d’ailleurs devenue le slogan de l’entreprise. Il n’en reste pas moins vrai que la chasse aux dépenses inutiles peut être plus que substantielle. Dans l’exemple cité plus haut, le gain serait supérieur à 3,5 millions de dollars sur cinq ans.

Parmi les entreprises qui lui font confiance, Lucidity mentionne l’une des plus grandes compagnies aériennes américaines et un fournisseur de téléphonie mobile. Ces deux clients sont sujets à la saisonnalité de leurs activités et sur-provisionnaient massivement en vue de ces périodes de forte activité. L’opérateur de téléphonie aurait économisé un demi-million de dollars, soit 60 % de ses dépenses globales en IT, après avoir déployé la plateforme de Lucidity.

La startup mentionne encore le cas d’une société de gestion qui aurait récupéré 1,5 million de dollars par an, soit 50 % de ses coûts après déduction des sommes versées à Lucidity.

Actuellement, Lucidity n’est compatible qu’avec les services de stockage en mode bloc d’Azure, AWS et GCP. La startup n’exclut pas d’étendre son champ d’action à d’autres plateformes, comme Oracle OCI ou IBM Cloud, en fonction de la demande du marché.

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