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Atlas : pourquoi OpenAI se lance-t-il dans la bataille des navigateurs IA ?

Atlas d’OpenAI veut (un peu) bousculer la domination de Chrome et (beaucoup) devenir une porte d’entrée sur le web. Il intègre nativement les agents de ChatGPT pour effectuer des tâches dans le navigateur. Mais des questions stratégiques demeurent.

OpenAI se lance à son tour dans la grande bataille des navigateurs, et plus exactement des navigateurs augmentés à l’intelligence artificielle.

Après Microsoft, qui a infusé son assistant Copilot dans Edge, après Opera qui a lancé son IA « Aria », après le moteur de recherche Perplexity qui a sorti Comet, c’est donc le créateur de ChatGPT qui va tenter de se faire une place à côté de Google Chrome, détenant 70 % du marché, avec un navigateur : « Atlas ».

L’IA agentique dans le navigateur, à quoi ça sert ?

Mettre l’IA dans le navigateur a pour objectif de la rapprocher de l’usage quotidien des internautes. Par exemple, en résumant une page web, en rédigeant une ébauche de réponse dans un formulaire en ligne, ou en synthétisant une réponse à partir de plusieurs sources. Une autre application est de diriger le navigateur en langage naturel, par exemple en écrivant « rouvre la page de l’article du MagIT que j’ai lu cet été sur les agents d’OpenAI ».

Atlas et son assistant IA
Atlas en mode assistant (à la Copilot)

La logique d’OpenAI va cependant un pas plus loin. Elle vise certes à démocratiser encore plus son assistant, mais aussi, voire surtout, à mettre ses agents en actions.

Rappelons qu’un agent est une IA qui agit : elle peut ouvrir des onglets, cliquer sur des boutons, sélectionner des items à acheter en fonction de critères définis par l’utilisateur, ou encore réserver des créneaux dans un agenda en ligne.

« Au début de l’année, nous avons lancé ChatGPT Agent⁠. Nous l’avons désormais optimisé pour qu’il fonctionne plus rapidement et de manière native dans Atlas », confirme OpenAI. « Dans Atlas, vous pouvez demander à ChatGPT d’agir et d’effectuer des tâches pour vous directement dans votre navigateur », insiste l’éditeur.

Atlas en mode agent
Atlas en mode agentique

Mais quelles tâches ? Pour le milieu professionnel, OpenAI cite l’organisation d’un voyage d’affaires par exemple. « Au bureau, vous pouvez demander à ChatGPT d’ouvrir et de lire les documents de votre équipe, d’effectuer de nouvelles recherches sur la concurrence et de compiler les informations recueillies dans un rapport », illustre également l’éditeur.

Quel est l’intérêt stratégique d’un navigateur pour OpenAI ?

OpenAI arrivera-t-il à détrôner Chrome avec ces fonctionnalités ? Ce sera difficile, mais ce n’est a priori pas non plus l’idée. Le but est plus d’étendre la « consommation » de l’IA d’OpenAI et de se positionner encore davantage en « front » des utilisateurs.

« En s’attaquant au monde des navigateurs, les géants de l’IA ne veulent plus être une URL qui affiche un chatbot, mais la porte d’entrée des utilisateurs sur le web », résume Jean-François Deldon, CEO de Yakadata, expert de la transformation numérique et de l’usage des IA en entreprise.

« Leur intérêt c’est de maîtriser le trafic de bout en bout, de s’intégrer progressivement dans la vie des utilisateurs et de capter une partie du trafic Google et d’éventuels revenus publicitaires associés ».

« En s’attaquant au monde des navigateurs, les géants de l’IA ne veulent plus être une URL qui affiche un chatbot mais la porte d’entrée des utilisateurs sur le web. »
Jean-François DeldonCEO de Yakadata

Mais Jean-François Deldon s’interroge sur l’intérêt profond de ces fonctionnalités augmentées ; à rebours de la kyrielle d’influenceurs, souvent artificiellement extatiques, qui affirment qu’« OpenAI vient juste de changer la navigation web pour toujours ! » [sic] ou qu’« Internet ne sera plus jamais le même ! » [re-sic.]

Plus modéré, le président de Yakadata estime que « ce qui compte, c’est l’usage des outils et la problématique à laquelle ils répondent ». Or d’après lui, l’IA intégrée a déjà eu des effets déceptifs à cause, justement, d’un manque de cas d’usage à réelle valeur ajoutée. « Les Copilot ou Gemini de Microsoft et Google ont fait beaucoup de bruit… pour finalement être très peu adoptés », rappelle-t-il.

Parler à son navigateur est certes séduisant, mais la promesse de valeur devra suivre, pour ne pas être, elle aussi, décevante.

En cas de réussite, étendre l’IA au navigateur pourrait cependant devenir une piste de monétisation.

OpenAI perd des milliards de dollars et annonce des investissements massifs dans des infrastructures pharaoniques, resitue en substance Jean-François Deldon. « Si les concepteurs de modèles d’IA cherchent à se rendre “indispensables” en modifiant les habitudes de navigation, n’est-ce pas pour préparer une augmentation de tarif ? », anticipe-t-il.

D’autres analystes imaginent, quant à eux, qu’une manière de se « rémunérer » pour OpenAI pourrait être de collecter ces données de navigations.

« Une première étape »

Mais OpenAI n’en est pas encore là. « Il s’agit d’une toute première étape. Des erreurs peuvent survenir dans les workflows plus élaborés », avertit l’éditeur. « Nous améliorons rapidement la fiabilité, la latence et la réussite des tâches complexes », promet-il.

Pour l’instant ChatGPT Atlas est disponible sur macOS. Windows, iOS et Android suivront « prochainement ».

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